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Déception. Voilà le mot est laché d’entrée de jeu, pas de courbette ou de politesse, à l’image de la musique de nos amis grecs : autant ne pas y aller par quatre chemins. Trois ans après l’opus Aealo acclamé par la critique et le public, Rotting Christ est de retour dans les chaumières pour nous délivrer un tout nouveau disque et essayer de confirmer leur statut de fer de lance du Metal Hellenique. De l’eau a coulé sous les ponts car désormais les frères Tolis sont les deux seuls maîtres à bord : Themis s’occupant de la batterie et Sakis... du reste (guitares, basse, chant et claviers) mais finalement rien de neuf sous le soleil méditérannéen puisque Rotting Christ a toujours été le bébé des Tolis depuis le départ de Jim “Mutilator” Pastouris dans les années 90.

Vous l’aurez compris, Rotting Christ reprend les grandes lignes de son précédent opus à savoir un Metal Extrême personnel et martial qui sent bon le Parthénon et le Pirée. Mais l’ensemble va se révéler un peu moins inspiré, un peu moins puissant, un peu moins “grec”, en résumé un peu moins bon. J’avais presque espéré que les quelques concerts donnés à l’automne par le groupe où les setlists étaient composées de titres tirés des albums les plus anciens leur donnent quelques idées mais il n’en est rien puisque qu’on retrouve le groupe là où on l’avait laissé. Tant pis pour ceux qui attendait quelques surprises.  

En tout cas, si vous aimez la guitare vous allez être servis. Κατά τον δαίμονα εαυτού (comment ça vous ne lisez pas l’alphabet grec?) est une aude à la six cordes. Tout y passe: riffs racés (“Gilgames”), soli flamboyants (“Iwa Voodoo”) et envolées sublimes (“Ahura Mazdā-Aŋra Mainiuu”) sont de la partie. Le lead de guitare de “P'unchaw kachun - Tuta kachun” est, par exemple, probablement l’un des riffs les plus entrainants qu’il m’ait été donné d’écouter. Et forcément le disque à tendance à se reposer sur ces moments épiques à la guitare au détriment des ambiances rendant l’ensemble déséquilibré (“Grandis Spiritus Diavolos”). Comme si le reste des compositions n’était qu’un hors d’oeuvre avant les quelques mesures à la six cordes. Ou que leur beauté mettait en lumière les défauts des autres parties des compositions.

En effet, les lignes vocales sont loin d’être toujours une réussite et s’intégrent parfois mal aux compositions (“Gilgames”). Quand ce n’est pas ces dernières qui ont du mal à décoller (les deux premières minutes de “Χ ξ ς'” “In Yumen - Xibalba” “Cine iubeşte şi lasă”). Conséquence : l’écoute a tendance à s’éterniser et l’ennui vient parfois pointer le bout de son nez. Et c’est d’autant plus vrai sur la longueur, car si le disque fait forte impression lors des premières écoutes, son intérêt s’effrite beaucoup avec des écoutes répétées. Signe s’il en est que le millésime 2013 du groupe ne sera pas une cuvée exceptionnelle et même pas une bonne cuvée.

Et ce même avec l’ajout d’une voix féminine (“Cine iubeşte şi lasă”, "Ahura Mazdā-Aŋra Mainiuu") et de choeurs pour donner du relief et de la profondeur aux compositions (“Grandis Spiritus Diavolos”). Que celà soit à l’unisson ou seuls les différents types de chant essaient de faire décoller le disque sans y arriver tout à fait. Les refrains consistent à répéter le nom de la chanson, les morceaux changent mais les patterns restent indubitablement les mêmes. On note bien l’utilisation de cornemuse (“Κατά τον δαίμονα του εαυτού”) mais l’ensemble reste trop sage alors qu’on aurait été en droit d’attendre un peu plus de folie.

En revanche, la forme est une réussite totale, la production est splendide et le son d’une clarté impressionante. Tout est fait pour guider le public dans l’univers torturé de Rotting Christ sans jamais dénaturer la violence des compositions. La basse est un peu en retrait mais cela ne gène en rien le confort de l’écoute et la puissance de la rythmique qui repose surtout sur la guitare rythmique et la batterie diabolique de Themis qui martèle ses fûts avec véhémence, même si un son un plus cru sur la caisse claire n’aurait pas été de refus.

Alors oui, “seulement” cinq, malgré les efforts au niveau des compositions; l’impression d’être sur des faces B d’Aealo se fait un peu trop ressentir. Et malheureusement Κατά τον δαίμονα εαυτού est bien trop limité dans le temps pour qu’il reste dans les mémoires. Les schémas de compositions ont tendance à tous se ressembler à terme et le feeling grec si particulier de son prédécesseur a presque disparu laissant sa place à un tempo guerrier un peu moins personnel et convaincant. C’est puissant et précis mais presque parfois un peu trop calculé pour convaincre totalement. Je suis peut être dûr mais lorsque qu’on est au devant d’un groupe qui a sorti des albums de la trempe de Thy Mighty Contract ou Theogonia on attend l’excellence. Une déception je vous dis.

Balin


Un petit extra avec une excellente interview des grecs suite à leur précédent album avec des questions sur la situation en Grèce et d'autres un peu plus “décalées” :
http://lesnotulesmetalliques.blogspot.fr/2010/04/gods-of-war-interview-rotting-christ.html

0 Comments 06 mars 2013
Whysy

Whysy

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