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De la tristesse naît la beauté : c’est avec ce leitmotiv dans la tête que les anglais de Anathema ont dû composer Alternative 4. Si certains groupes cherchent à atteindre cette beauté musicale par le fragile équilibre entre violence et mélodie (on peut penser notamment à certains groupes de black), Anathema prône ici le minimalisme et la sublimation première des émotions pour atteindre son but.

Volontairement, et j’insiste sur cet aspect, les anglais mettent de côté la recherche du son parfait, et laissent libre cours aux instruments bruts, primaires. Et c’est intéressant de voir combien un son peu travaillé peut paraître si vivant, si humain.

Car Anathema cherche aussi à toucher l’auditeur au cœur, à faire remonter à la surface toute la mélancolie présente en nous. La chanson pivot de cet album, celle qui illustre sans aucun doute l’état d’esprit du groupe, est illustrée par Lost Control. Pour avoir écouté un nombre conséquent de « belles » chansons métal, voici assurément l’une de mes préférées : une intro feutrée, intimiste entre le piano, souffle discret, et la voix de Vincent Cavanagh, sorte de complainte lascive presque inanimée, déshumanisée, un refrain touchant et des paroles qui ne le sont pas moins, des breaks instrumentaux où les deux instruments leaders, la guitare acoustique d’abord et le violon pour clore la chanson, prennent une dimension dramatique d’une intensité rare. Difficile de ne pas être touché par la simplicité et la beauté de cette chanson, le titre de la chanson n’est pas usurpé, on a vraiment cette impression enivrante et spéciale de perdre tout contrôle.

Le reste de l’album n’est pas moins riche, oscillant entre parties plus heavy, assez simples dans leur construction mais qui accrochent par leurs rythmiques souvent hachées, saccadées, et les ballades qui font la part belle aux instruments et qui adoptent parfois des tons doom, avec des riffs très lents pour accentuer sur l’effet dépressif de la musique. Les anglais ne cherchent pas la complication superflue, n'insistent pas sur la construction millimétrée des morceaux. C'est souvent simple, mais joué et interprété avec une qualité qui ne peut pas laisser de marbre. On note par exemple un superbe duo à la fin de l’album, Better Off Dead, un duo vocal féminin / masculin du plus bel effet, non surjoué, juste sincère.

Si Anathema est parfois inscrit au rang de groupe de métal atmosphérique, il n’y a là pas de hasard. S’il y a bien une chose de certaine ici, c’est que l’efficacité n’est pas le maître mot de l’album : le groupe se focalise sur les ambiances, les atmosphères, les émotions brutes, les sons sans artifices électroniques. Alors évidemment, on atteint aujourd’hui des niveaux de production tellement élevés que ce Alternative 4 peut apparaître bien faible au niveau du son, mais il ne faut pas oublier que la démarche est volontaire. Et force est d’avouer que la magie n’opérerait pas avec une recherche de perfection sonore. De plus, l’aspect un peu décousu de l’album pendant les premières écoutés peut surprendre voire rebuter.
Cependant, on entre avec Anathema dans un monde primaire, où l’émotion prime sur la raison et sur la technique, où l’on peut laisser libre cours à son imagination mélancolique. Alternative 4 est un album intimiste, privé presque, et c’est comme cela qu’il doit être appréhendé pour délivrer toutes ses dimensions et toute sa richesse.

0 Comments 22 mai 2005
Whysy

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