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Changer pour évoluer. Evoluer pour progresser. Progresser pour Survivre. Survivre pour Rester. Rester pour Etre. Etre pour ne pas changer.

Changer ou rester, muter ou se fossiliser, évoluer ou trahir: telles sont les questions éternelles qui se posent à tout groupe proposant une certaine ambition artistique. Hé oui, amis lecteurs, vous conviendrez avec moi que ce dilemme n'est pas nouveau dans le landernau métallique. Peut-on en effet continuer un style de musique indéfiniment sans être accusé de conservatisme pantouflard? Peut-on changer en permanence sans perdre son identité? Les fans de métal ne seraient-ils pas aussi un tantinet agaçants? :p... Le groupe français Adagio n’échappe pas à ces interrogations existentielles depuis qu’il a entrepris le remodelage de son identité après le pourtant très acclamé Underworld. En effet la formation néoclassique et progressive a décidé de noircir et de durcir son propos pour muer en un métal néoclassique sombre et théâtral avec interventions au chant black, riffs plus lourds ou coulés, et des paroles moins angéliques (on ne risque plus de retrouver Avé Mariiiiiiia … ).

Et cela ne s’était pas fait sans mal auprès des fans: on avait ainsi laissé ce groupe prometteur avec un Dominate mitigé tant les apports des voix criées et le virage extrême présenté par les compositions relevaient autant de l’assemblage mal digéré ou tout simplement du sacrilège que du renouvellement audacieux d’une vision artistique. Sans revenir sur cet opus, l’album d’Archangels in Black devait clarifier l’évolution artistique du groupe. Le titre et la pochette laissant peu de place pour un retour en arrière, ce n’est pas sans curiosité que l’on découvre le nouveau volet d’Adagio version dark.

Alambiqué et violent sont les premiers qualificatifs qui me viennent à l’esprit à l'écoute d'un Archangels in black qui évite les petits défauts de son prédécesseur. La juxtapositon maladroite d'éléments dissemblables est aujourd'hui totalement dépassée et cet album apparaît très vite comme plus maîtrisé et abouti que Dominate. Puisant la source de son inspiration dans des univers fantastiques et échevelés, la musique du quintet présente des orchestrations subtiles ou grandiloquentes relevées par la guitare toujours aussi tranchante du maestro Forté. Kevin Codfert réalise aussi une prestation éblouissante par sa puissance suggestive , il contribue grandement au développement des ambiances baroques de l’album. L'introduction au piano d' Undead est ainsi digne de Frédéric Chopin.

Le nouveau chanteur, Christian Palin, s'insère parfaitement dans cet univers contrasté. Il se rapproche assez de la voix de David Readman glorieux vocaliste du non moins glorieux Sanctus Ignis. Ce type de chant est particulièrement efficace mais inutile de regarder trop longtemps vers un passé mythique, il ne reviendra plus. Cette rupture fait et continue de faire débat tant les deux premiers albums étaient prometteurs et magiques. Chacun dans leur veine ils avaient défini une certaine identité à base d ‘inspiration technique, d’ambiances travaillées et de passages orgiaques à la guitare.
Peut-on néanmoins évaluer cette nouvelle production sans tenir compte des encombrantes et prestigieuses expériences passées ? Est-ce seulement souhaitable ou possible ? Je ne le pense pas tant on retrouve des réminiscences des fastes néoclassiques d’antan dans ces archanges en noir. Intermèdes classieux au piano, soli aériens et inspirés de Stephan Forté, Adagio développe des compositions vivantes et riches comme sur son premier album.

Les nouveautés proviennent des contrastes développés entre des riffs modernes et tranchants (imite industriels parfois) qui cotoient le foisonnement mélodique de mouvements soli très fluides et véloces. Cette diversité permet l'immersion immédiate de l'auditeur dans un monde sombre et inquiétant. Noir, gris et rouge telles sont les nouvelles teintes que le peintre Forté a choisies pour construire son univers horrifique et théâtral à l'image d'une pochette torturée. Archangels in Black s’écoute ainsi véritablement comme une pièce de théâtre tant les morceaux révèlent avec force leur unité dans un enchaînement des plus fluides. Les compositions, évidente pour Fear Circus, irrésistible sur The Astral Pathway (Seal with Me, I will carry on your sorrow) aux plus alambiquées (Codex oscura et the fifth Ankh), recèlent d’ambiances colériques, mélancoliques ou survitaminées (Getsu Genshi) qui se muent en de véritables développements cinématographiques sur les magnifiques débuts d' Archangels in Black et le très inspiré Codex Oscura où la trame introductive tourmentée me fait penser à l'attente angoissante d'un mystique devant le Jugement Dernier.

Tout irait ainsi dans le meilleur des mondes s'il n'y avait pas le cas épineux des passages chantés Black. Ce type de chant sec et nerveux apporte une dimension ombrageuse et gothique là où les premiers albums développaient les atmosphères illuminées et romantiques. Distillées avec parcimonie, ces interventions de chant râpeux sont dans l’ensemble superflues (poussifs sur Twilight At Dawn) ou désagréables (un véritable gâchis sur Undead ou sur la fin de codex oscura. Les meilleurs titres étant ceux où ils sont absents (The Astral Pathway, ou discrets Archangels in Black). Une exception selon ma subjectivité personnelle, The Fith Ankh où ils se prêtent à l’atmosphère théâtrale et dialoguées d’un titre assez déroutant. Je ne me permettrais pas de juger le choix global d’une telle ambition, le chant criard offre une certaine diversité et il s’intègre bien mieux à l’ensemble que sur Dominate. Seulement vous l’aurez compris, amis lecteurs, le chant criard (black ou death) n’est souvent que le masque de la radicalité et beugler comme un snorkies qui servirait de cobaye à un chirurgien aveugle :p n'est pas le meilleur moyen de prolonger le dynamisme des morceaux..Et même en reconnaissant que c’est bien fait, l’évolution est encore difficile à digérer.:)

Archangels in Black confirme le virage entrepris par Dominate mais ….paradoxalement se rapproche plus par son efficacité de Sanctus Ignis !! Plus maîtrisé, toujours aussi néoclassique et grandiloquent, la bande à Forté révèle une fois de plus la qualité de son travail, la richesse de ses compositions et la puissance de ses mélodies.

0 Comments 02 février 2009
Whysy

Whysy

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