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4 ans, c'est long. C'est pourtant le laps de temps qui sépare chaque album du quartet allemand, mieux réglé qu'une montre suisse depuis la sortie de Nightfall in Middle-Earth en 1998. C'est bien simple, si l'on compare Blind Guardian aux autres groupes phares de leur génération, le constat est affolant. Alors qu'il faut quatre longues années au gardien aveugle pour composer, enregistrer et sortir un album, Rhapsody met à profit cette même période pour sortir trois chefs-d'oeuvre, et Sonata Arctica passe de groupe inconnu à cheval de bataille de la nouvelle scène du speed finlandais.  Vous l'aurez compris, c'est le silence radio chez nos amis teutons depuis près de quatre berges, et si Hansi s’autorise quelques apparitions sur les albums des copains ici et là, le groupe reste très discret sur son nouvel album. Du moins jusqu'en décembre dernier, avec la révélation du single Twilight of the Gods, de la pochette, du concept et de tout le tracklisting. Blind Guardian, c'est tout l'un ou tout l'autre.  Alors certes, 4 ans, c'est long, mais 12 ans, ça l'est encore plus. Pourquoi 12 ans ? Vous vous souvenez peut être des déclarations du groupe après la sortie d'A Night at the Opera. Hansi et André formulaient le souhait de sortir "prochainement" un album symphonique, avec un vrai orchestre à l'appui, des chœurs, et tout le toutim. Il aura donc fallu plus d'une décennie à Blind Guardian pour concrétiser ce rêve, mais c'est aujourd'hui chose faite avec Beyond the Red Mirror, enregistré avec pas moins de deux orchestres de 90 personnes, et 3 chœurs différents pour pas moins de 200 choristes. En bref, une superproduction digne du grandiose Symphony of Enchanted Lands II de Rhapsody.  En plus d'un orchestre (et même de deux), Beyond the Red Mirror s’embarrasse d'un concept : vous savez, une histoire, qui permet de faire passer l'album pour un opéra-rock. Un peu à la Ayreon, mais en moins poussé. Bref. Depuis des années, Blind Guardian sort des albums à gimmicks. Nightfall in Middle-Earth, c'était le Silmarillion mis en musique (avec brio!), A Night at the Opera c'était la référence à Queen avec son épique de 15 minutes, A Twist in the Myth c'était l'hommage à Mike Oldfield avec Fly (déjà rendu quelques années auparavant avec la reprise de To France sur Forgotten Tales) et At the Edge of Time avait partiellement servi à la bande-originale du (pas très bon) jeu-vidéo Sacred 2. Pour Beyond the Red Mirror, c'est une histoire, qui se découvre au fil des paroles, et qui fait suite à certains morceaux d'Imaginations from the Other Side (pour ne pas les citer, Bright Eyes, And the Story Ends et la titletrack !) Pour faire court, c'est du Lewis Caroll bas de gamme. Je dis ça sans méchanceté aucune, étant moi-même fan de Fredrick Brown. Je vous passe les détails du scénario, les enfants, vous m'excuserez, ma période Pain of Salvation est loin derrière moi.  Mais alors, question musique, qu'est-ce que ça vaut? Je dirais que là où Dream Theater ou Threshold simplifient le prog, Blind Guardian donne de la profondeur au power. Si vous ajoutez les compositions d'André à l'orchestre, plus les chœurs, plus les influences celtiques, vous obtenez un album extrêmement riche. On notera d'ailleurs une belle utilisation des chœurs depuis plusieurs albums, plus proche de cette fameuse musique celtique que du power moderne. Ainsi, ils font partie intégrante des morceaux. Plutôt que de simplement amplifier la ligne de chant d'Hansi. ils lui font échos. Il subsiste néanmoins un petit goût d'inachevé au cœur de ses quelques dix compositions : l'orchestre est assez discret sur une partie des morceaux, et le mariage semble moins réussi que sur un Bible of the Beast (Powerwolf) ou un Once (Nightwish). Toutes proportions gardées, on se retrouve face à un album à deux vitesses, où morceaux taillés pour l'orchestre côtoient ceux qui le subissent plus qu'autre chose. Il faut croire que le style symphonique sied moins bien à Blind Guardian qu'à Nightwish ou Rhapsody. Ainsi, Ashes of Eternity semble assez quelconque malgré un solo énergique d'André, et Sacred Mind est un peu longuet. Quant à The Holy Grail, il réussi le tour de force d'être le tube de l'album avec un refrain excellent sans réellement faire appel au côté symphonique. Du power classique, en somme.  Mais passé ces quelques "déceptions" ou plutôt "étonnements", Beyond the Red Mirror est une pure réussite, notamment grâce à un Frederik (batteur) qui ne cesse de faire ses preuves depuis A Twist in the Myth et le départ de Thomen. Les morceaux sont longs, avec une moyenne de 5 ou 6 minutes, et bien écrits. Si Hansi est toujours aussi reconnaissable (et talentueux), la partie instrumentale est autant sinon plus réussie. Au nombre des réussites de l'album on trouve donc pêle-mêle : Ninth Waves, un véritable monument de power symphonique, très bien écrit, une véritable vitrine orchestrale pour bien démarrer le disque. Mais aussi Prophecies qui rappelle l'époque d'Imaginations from the Other Side, avec son intro très réussi, ou encore The Throne, épique à souhait, avec un refrain puissant, une belle utilisation de l'orchestre et des lignes de chant intéressantes. Twilight of the Gods, le single dont je vous parlais plus haut, s'en sort lui aussi très bien, et sonne comme un hommage aux compatriotes cucurbitacées de Blind Guardian. At the Edge of Time et Grand Parade sont quant à eux les morceaux qui bénéficient le plus de l'apport de l'orchestre, outre Ninth Waves bien évidemment. Si le premier vaut surtout pour son refrain, le second est un joyeux foutoir où se mêle tout ce qui fait la qualité du groupe, et se veut être un final épique. Il n'atteint cependant pas le degré d'excellence d'And then there was Silence (à mon sens !) On finira sur Miracle Machine, une ballade peu inspirée : on est loin de The Bard's Song ou A Past and Future Secret.  Beyond the Red Mirror est donc est un très bon album de power metal, et un bon album de Blind Guardian. Il divisera très certainement les fans, comme A Twist in the Myth en son temps, mais possède tout de même d'indéniables qualités, comme la profondeur de ses compositions et le souci du détail de la production. On en attendait un 10/10 digne d'un chef-d'oeuvre, il récolte finalement un solide 8. Ç'aurait pu être un 9, mais c'est Blind Guardian dont on parle, et Beyond the Red Mirror nous a coûté 4 ans d'attente. Et 4 ans c'est long.

0 Comments 10 novembre 2014
Whysy

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