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Mozart, c’était un peu le Power Symphonique de la musique classique. C’est-à-dire, une recette qui fonctionne avec des éléments simples mais qui sont très bien agencés et qui rendent la musique vivante malgré une recherche harmonique peu torturée (si on sort cette musique de son contexte historique, bien sûr). C’était une vraie machine à "tubes" en réalité (des tubes avec du sens, c’est un art qui se perd), et, cette façon d’être accessible, on la retrouve dans une musique comme le Power Symphonique. C’est un style qui parle aux gens grâce aux éléments qui sont utilisés : la fantasy, les sons symphoniques, les mélodies épiques et catchys etc. Le groupe de power « parfait » doit donc savoir se renouveler dans une œuvre sans nécessairement innover. Il doit savoir trouver de nouvelles sonorités sans faire dans l’expérimental. Il doit savoir être évolué tout en restant très simple car c’est dans un répertoire de « chansons » qu’il évolue, et non de morceaux instrumentaux qui se veulent intellectualisés. Et tout cela n’est pas tâche facile ! C’est à cette fameuse tâche que Damnation Angels a voulu s’attaquer avec ce premier album : « Bringer Of Light ». Mais, par conséquent, dans ce disque, il faut faire la différence avec la volonté de départ (très bonne) qu’on y ressent, et ce qui a vraiment été enregistré car le résultat n’est pas parfait.  L’introduction « Ad Finem » (oui c’est paradoxal), très épique, très hollywoodienne et à la fois assez mélancolique nous plonge directement dans un bon sentiment. En effet, les sons orchestraux sont de bonne facture et maintiennent une impression de réel. Les phrasés sont très corrects pour du synthé, et, par conséquent, ça n’est absolument pas ridicule ! Dans le cadre du Power Symphonique, c’est un bon début. On sent aussi des qualités d’écriture dans les lignes d’orchestre. C’est assez fin, bien amené, avec de la nuance et ce n’est pas trop –facile-. On trouve de la couleur dans l’écriture (grâce à des retards, des voix qui s’entremêlent et d’autres qualités) qui reste, somme toute, assez verticale. On a donc droit à une très bonne musique de film. D’ailleurs au passage, je sais que je vais me battre contre le vent en disant cela, mais il faudrait arrêter d’appeler ce style du métal « Symphonique ». Ecoutez la 9ème de Beethoven et dites-moi franchement s’il y a un rapport avec le style que nous affectionnons. Il y a un groupe qui avait trouvé le bon terme ! C’est Rhapsody avec son idée de Hollywood Metal. Merci à eux car c’est bien de cela qu’il s’agit (alors que paradoxalement, Rhapsody se rapproche beaucoup plus de la musique classique que Nightwish par exemple). Tout ça pour dire qu’on retrouvera ces orchestrations de qualité tout au long de l’album et c’est un bonheur. Puis, lorsque le reste de la bande arrive enfin, la première chose à laquelle on fait attention, c’est la production ! Alors, parlons-en !  Celle-ci est très propre mais, comme dans la plupart des productions du genre, très impersonnelle et c’est bien dommage. Par conséquent on n’a pas l’impression d’écouter un groupe si différent des autres vis-à-vis du son.  La basse est assez absente du mix et c’est un très mauvais point car il s’agit d’un instrument à part entière et c’est agaçant de la voir si discrète et quasiment –inutile-. La batterie est vraiment basique et assez artificielle. Les toms sonnent parfois un peu "plastique" ce qui est un tantinet gênant. Au niveau du jeu c’est très carré mais ça manque de musicalité. Il n’y a pas de nuances et les coups sont très (trop ?) égaux. On a presque l’impression d’avoir affaire à une machine. Madame quantification a dû passer par là ! Pour ce qui est de la guitare, le son est correct mais impersonnel aussi. J’ai déjà entendu ce son maintes fois (assez creusé dans les médiums, assez peu de grain, typé métal neutre quoi). Le jeu est tout aussi propre que le reste, le timbre dans les soli reste agréable, mais le phrasé est trop machinal tout comme la batterie. Il y a un côté « scolaire » un peu décevant. Cela ne gâche pas non plus totalement l’écoute car à côté de cela, c’est propre et on ne saute pas au plafond en entendant des énormités. Mais, au final, seul le clavier est vraiment nuancé et dynamique (encore un terme souvent mal compris : dynamique signifie une grand amplitude de volume, du plus doux au plus puissant).  La voix est bien enregistrée, on entend bien le timbre de Pelek. Elle est aussi assez expressive, mais de façon un peu maladroite. On sent une bonne technique ainsi qu’une grande étendue dans la tessiture typée ténor léger, mais, la façon de respirer à la Matthew Bellamy (argh) et cette manie de dégueuler les fins de phrases médiums et graves rend le tout beaucoup trop maniéré et c’est bien dommage. On retrouve donc parfois un côté un peu facile et artificiel, notamment dans les passages ultra-bateaux ou le piano et la voix se partagent le devant de la scène (dans « Someone else » par exemple…c’est du cliché lourd mais est-ce étonnant pour une power ballade ? Exercice malheureusement trop difficile pour le groupe). Il se trouve que les parties aiguës sont exécutées avec un belting (mélange de voix de tête et de voix de poitrine pour monter plus facilement dans les aigus sans perdre le timbre) pas toujours très équilibré (donc trop de voix de tête dans ce cas-là) ce qui a pour conséquence de leur faire perdre de l’assise et de la puissance. Malgré tout, on sent de l’émotion dans ce type de passage grâce à la sincérité du chanteur qui a l’air de croire à ce qu’il chante. Cela sauve le tout car c’est aussi le plus important finalement. La technique est là pour aider à tendre vers ce but. Le refrain du titre d’ouverture, dont nous allons parler, le démontre assez bien d’ailleurs.  L’album débute donc vraiment sur le assez long (10 minutes au compteur) « The Longest Day Of My Life » (comme quoi le titre est bien accordé). Ce titre est un bon résumé de ce qu’a fait le groupe dans « Bringer Of Light ». On retrouve les orchestrations symphoniques assez épiques et mélancoliques ainsi que la cavalerie plutôt métal/heavy. Le côté mélancolique semble être la marque de fabrique du groupe. C’est censé atteindre le cœur si je puis dire. L’émotion est donc souvent au rendez-vous malgré un certain nombre de maladresses sur lesquelles nous reviendrons. Le titre est cependant un peu long et trop peu varié dans les ambiances pour retenir l’attention jusqu’au bout. On retrouvera cette couleur épico/mélancolique tout au long du disque. Il aurait donc été plus stratégique d’en faire un morceau court comme « Reborn », avec son refrain excellent de par sa mélodie très efficace et profonde à la fois, en guise de titre d’ouverture. Les morceaux plus courts ont généralement beaucoup plus d’impact. On pourra malheureusement reprocher au disque d’être trop uniforme au niveau de la façon de composer.  En effet, le concept est très vite reconnaissable, puis assimilé. On trouve des riffs et des grilles d’accords basiques, une batterie qui soutient le tout sans en faire trop et un orchestre qui va faire quasiment tout le reste. Le boulot de synthé est donc énorme car c’est lui qui crée les couleurs et la richesse de l’harmonie (Merci d’ailleurs ! même si ça n’est pas exceptionnel). L’orchestre fourmille de détails et de lignes qui s’entrecroisent. Cela alimente l’écoute d’une façon plaisante. Les mélodies sont toujours bien trouvées au niveau de la voix. Mais le souci c’est que tout est trop semblable. En effet la même recette est réutilisée tout au long du disque. Les morceaux manquent donc un peu de personnalité et forme un tout trop compact. On ne respire pas assez. A côté de ça le groupe a quand même de bonnes qualités de recherche et nous montre qu’il sait moduler (trop peu souvent malheureusement) et faire des passages instrumentaux intéressants. Celui de « Bringer Of Light », par exemple, est un des rares moments qui sort un peu de la routine instaurée par le groupe grâce à la caisse claire qui se décale sur un gros riff et le très bel unisson guitare/piano qui s’ensuit. Il y a de bonnes idées rythmiques qui sortent des croches ou des doubles répétées et c’est très plaisant même si c’est assez rare aussi (le riff de « Shadow Symphony » qui « grooverait » presque). Le tout a quand même un côté assez pop parfois au niveau de l’arrangement et cela empêche peut-être à l’œuvre de gagner en force. D’ailleurs on trouve une grosse erreur dans le malheureux titre de transition vers le dernier morceau : « No Leaf Clover » (qui est une reprise de Metallica). Celui-ci est vraiment rebutant à cause de son refrain type tube-moderne (il me fait penser à du Hollywood Undead par moments…j’entendrais presque les « Shake it baby »…) vraiment limite et ses « Yeaaaaah » dégueulés absolument ridicules. C'est un titre qui ne va pas du tout à Damnation Angels. Il est totalement hors sujet vis à vis du reste de l'album.  Mais, à la fin du disque, il y a le final fabuleux…le morceau auquel on ne s’attendait vraiment pas : « Pride (The Warrior’s Way) » ! Voilà ce qu’on voulait ! De nouvelles couleurs ! De l’originalité ! Une façon de se renouveler sans forcément innover ! En effet, ce titre possède une ambiance totalement différente du reste tout en restant dans la ligne d’écriture du groupe. Celle-ci est portée vers l’Asie et c’est assez rare pour le souligner. On entend des timbres d’instruments traditionnels comme le Shamisen, des mélodies pentatoniques bien trouvées pour les cordes et le tout ravi nos oreilles avides de voyages sonores grâce au très bon mélange avec le métal. Et, cette fois-ci, le titre est long mais tellement plaisant qu’il ne lasse pas ! Bon évidemment, c’est cliché hein, mais c’est bien fait donc on s’en fou. De toute façon, je ne pense pas que la musique du théâtre No aurait eu sa place ici. Certaines mélodies ferait presque penser à du Joe Hisaishi ! Bon, il y a des défauts comme le solo de violon au milieu qui est un peu maladroit parce qu’on entend clairement que c’est du synthé mais après une telle claque mélodique on pardonne tout. Surtout que le passage qui s’en suit nous transporte vraiment. Il n’y aucun déballage instrumental, tout est dans l’ambiance et les mélodies et ça, c’est beau ! Les cris guerriers qu’on entend en fond sur la fin avec la jeune demoiselle chantant en japonais finissent de nous achever. On remercie le groupe de nous avoir offert un tel titre en final de cet album plutôt bon mais un peu longuet et répétitif.  Du coup, j’ai beaucoup hésité pour la note que j’allais donner car ce morceau m’a littéralement retourné. J’ai finis par accorder un 6/10 (j’ai longuement hésité avec le 7/10 grâce au morceau en question), bien que le groupe ait du potentiel et que le disque possède des qualités qu’on ne retrouve pas toujours chez ses concurrents. Mais il faut savoir que si j’avais pu, j’aurais mis 6,5/10. « Bringer Of Light » est donc un album très correct mais pas encore assez intéressant, varié et inventif pour côtoyer l’excellence. Il a un grand nombre de défauts que je n’ai pas pu oublier malgré un final fantastique. Il faudra peut-être encore quelques albums à Damnation Angels avant de pouvoir prétendre devenir les « porteurs de lumière », voire plus…  Adrian Frost

0 Comments 04 avril 2013
Whysy

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