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En seulement quelques années, Sabaton a réussi le tour de force de s’imposer sur la scène métallique comme un grand groupe à coup de tournées chaleureuses et efficaces, d’une parution régulière d’albums excellents remplis d’hymnes irrésistibles et la réalisation d’un disque culte The Art Of War. La spécialisation thématique du groupe dans l’histoire militaire a été un ingrédient majeur de ce succès par la création d’un véritable univers propre au groupe et suffisamment large pour éviter le piège de la redite. (Les autres formation de Heavy Metal spécialisé vont avoir plus de mal à se renouveler comme Alestorm et ses pirates, Lordi et ses zombis ou Powerwolf et ses vampires libidineux)
Sixième livraison discographique des Suédois, Carolus Rex dénote cependant par plusieurs aspects en s’écartant de ses prédécesseurs. En un mot cet album fera date dans la carrière du groupe et suscite de nombreuses questions:

Dans quel contexte a été composé cet album? Quelles sont ces caractéristiques et ses singularités? Retrouvons nous la qualité d’écriture présentée dans les précédents albums? Ce Carolus Rex contient-il LE TITRE majeur qui prolongera la lignée prestigieuse des tubes sabatoniens?
Nous découperons cette chronique en quatre partie, le Contexte; le Sujet de l’album, la musique et la version suédoise inédite adressée en bonus.

Tout d’abord il convient d’évoquer LE CONTEXTE très particulier de cet album:
La formation Sabaton vient de connaître le premier grand bouleversement de son histoire: Les deux tiers de son effectif ont quitté le groupe pour former un nouveau projet baptisé Civil War et les derniers rebondissements laissent supposer que la séparation a été loin d’être amicale. Le départ du groupe s’est fait en deux salves, d’abord les deux guitaristes et le batteur avant que le claviériste Daniel Myhr les rejoignent en pleine sortie et promotion de Carolus Rex. L’album est donc le fruit d’une atmosphère très particulière, marquée par les tensions, les divisions, et une ambiance de fin d’une ère.

Le succès croissant, la signature sur un label groupophage , la professionnalisation grandissante et les tournées à rallonge ont vraisemblablement eu un impact sur l’entente des membres. Ce fut une mauvaise surprise voire même une douche froide pour tous les fans du panzer suédois tant l’entente affichée en concert, la bonhommie potache et communicative du groupe faisait pourtant plaisir à voir et constituait un facteur indéniable de la réussite récente des Suédois et de l’attachement qu’ils pouvaient susciter.
La formation d’un nouveau groupe Civil war par les quatre ex Sabaton est assez révélatrice et qualifie cette rupture de scission et non plus de simples départs. Seul le bassiste Par Sundstrom, en fidèle lieutenant, est resté auprès du vocaliste/inspirateur/compositeur/tête pensante Joakim Broden. Sa direction était-elle dictatoriale? Ses choix s’imposaient-ils aux autres? Nul peut le dire en l'état mais il n’est pas galvaudé de penser qu’avec cette scission Sabaton essuie le premier revers de sa carrière. Dans quelle atmosphère a pu être réalisé cet album? Comment les membres ont-ils pu s’investir totalement dans le projet avec de tels doutes sur leur avenir? La titularisation des nouveaux membres a été si rapide que les contacts ont dû être pris pendant l’enregistrement de l’album ou avant: Broden a même un temps demandé au génialissime Tommy Johansson de ReinXeed de rallier le navire ce qui prouve l’anticipation lointaine de l’implosion.
Mais revenons donc à cet album qui restera charnière à plus d’un titre. Tout d’abord parce que c’est la dernier avec la team historique mais aussi car pour la première fois Sabaton se lance dans l’exercice de style auquel ses thématiques guerrières semblaient présdestinées le concept album.

II Le sujet:
Le heavy épique guerrier à thématique militaire a toujours évité les écueils du patriotisme pompier ou de l’exaltation belliciste mais pour la première fois, le thème renvoie à l’histoire nationale de leur pays avec le risque de sombrer dans la caricature ou la lourdeur chauvine. Le choix du groupe s’est porté sur le XVIIième siècle et principalement le roi Charles XII, période la plus fastueuse de l’Histoire suédoise post viking. Victoires, conquêtes, épopée militaire mais aussi défaites et déboires sont propices aux développements épiques qu’affectionnent les Suédois dont l’investissement dans le projet est remarquable. Ils se sont adjoints les services et les conseils d’un historien, Bengt Liljegren, spécialiste de l’empire suédois (1611-1718) et biographe de Charles XII, ce qui a permis d’éviter certains écueils même si les louanges d’un conquérant est moins porteur en identification, en projection que les combats idéologiques de la seconde guerre mondiale.
L’unité conceptuelle est en tout cas une expérience singulière puisque les interludes narrés de The Art of War fondés sur le livre de la guerre de Sun Tzu ne pouvait s’appréhender comme telle. Toute l’épopée sanglante et aventureuse de la Suède impérialiste est retranscrite dans ses gloires et ses déroutes.Mais l'heure est venue de parler de l'essentiel:

III La Musique:
Le renouvellement, l’orignal, l’innovation ou l’expérimentation sont encore absents de la musique sabatonienne. Carolux Rex délivre un heavy carré, massif qui reprend les techniques de l’introduction instrumentale puissante, des refrains en latin et de riffs percutants. Sabaton ne peut se concevoir sans ses tubes et une nouvelle fois le savoir faire est au rendez vous même si les compositions relèvent d'un classicisme à la limite de la facilité. Sabaton fait du Sabaton et il le fait bien:
Quelle puissance, quelle virilité quelle pêche et ce son, digne d’un T34 dans la permanence nouveau centre d’une ville périurbaine. The Lion From the North qui évoque Gustave Adolphe, Gott Mit Uns qui rappelle l’enjeu religieux des incursions suédoises dans l’Allemagne déchirée entre catholiques et protestants ou Killing Ground hachent menu les esgourdes par leur efficacité rythmique. Sabaton excelle dans cet exercice de style mais a déjà démontré par le passé de meilleurs résultats.
Au final c’est bien peu car aucune de ces réussites n‘égale le panthéon sabatonien des Primo Victoria, Attero Dominatus, Metalizer, 40 to one…. LE sujet s’est imposé sur la trame musicale pour coller à la ligne conceptuelle et au final peu de mélodies restent dans ma mémoire embrouillée. Il me coute d’écrire ces lignes mais Sabaton semble sur une pente descendante au niveau inspiration et efficacité depuis The Art Of War, la fraicheur s’émousse la créativité s’étiole et on retrouve des pastiches recopiés de ses gloires passées (1648, Killing ground). L’album développe beaucoup de mid tempi comme The carolean Prayer ou Long Live The King pour fortifier la trame narrative mais cela participe à l’essoufflement de l’album. Seul Carolus Rex dont les mélodies sont reconnaissables et assez captivantes parvient à s‘extraire dans le milieu d‘album. Ce morceau de bravoure rejoint les titres tubesques précités mais l’impression d’ensemble reste peu satisfaisante.

IV La Version suédoise:
La proximité thématique de Sabaton avec son sujet et surement l’envie de nouveauté ont poussé le groupe à utiliser pour le première fois du Suédois dans ses paroles. L’emploi de cette langue scandinave s’est imposée par la nature des textes, et les tentatives premières ont été jugées si fructueuses que l’expérience a été généralisée. Ce qui, semble t’il aurait dû n’être qu’un essai pour un éventuel bonus constitue en fait la puissante singularité de Carolux Rex dans la discographie de Sabaton.
Tout l’album a reçu sa version Kriskroll ce qui relance grandement l’intérêt des compositions même si la valeur ajoutée n’est pas déterminante. L’intérêt du double cd est ainsi quasi nul, Qui écoutera plus d’une fois le deuxième cd après qu’il aura tranché sur sa version préférée?
Pour ma part je préfère grandement la version autochtone, avec une diction martiale et exotique qui apporte un supplément d’âme à des titres monochromes en version anglaise.

Conclusion:
Sabaton produit un Coat of arms en moins bien. Carolus Rex s’en sort grâce à la version suédoise, mais il est à souhaiter que le renouvellement des deux tiers du line up parviennent à dynamiser et oxygéner la créativité des Suéduois tant le schéma dans lequel ils ronronnent semble s’essouffler.Une unité conceptuelle et un ou deux tubes vraiment Sabatoniens ne suffisent vraiment plus à maintenir la qualité mélodique mais entretiendront la flamme auprès des fans.

0 Comments 22 juin 2012
Whysy

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