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Un véritable bordel que ce Circus Pandemonium, nouvel album très attendu des suédois d'A.C.T. Voilà un groupe qui a parfaitement compris tout l'intérêt de faire un style aussi ouvert que le rock prog, puisque c'est bien sous cette bannière que vous pouvez vous permettre de faire du circus metal délirant et halluciné sans que ça ne choque grand monde. Ouvrir les portes, fracasser les murs et fusionner les genres, voici le credo de ce groupe génial et pourtant méconnu au-delà des frontières suédoises. Cerise sur le gâteau, le groupe n'est pas de ceux qui se touchent le manche en faisant des grimaces pour la beauté du geste, car il y a chez ACT une putain de qualité d'écriture, et un pool de compositeurs de top niveau.

Après huit années d'absences le groupe remet le couvert en tentant la passe de cinq, et cette fois a mis les petits plats dans les grands : à celui qui aime les élucubrations du style rien ne sera épargné. Car s'il y a un truc que ces suédois semblent détester c'est les morceaux calmes, planants et répétitifs. Tout ici n'est que virtuosité (ou tentative de virtuosité), chœurs criards et surprenants, riffs courts et évolutifs, et rythmiques saccadées et changeantes. Et surtout, ce que j'aime vraiment chez eux et qui dans le cas de cet album est un véritable facteur X, c'est la distance qu'ils ont pris sur eux-mêmes, leur musique et leurs textes, et qui se ressent dans l'album.

Je ne peux qu'imaginer, mais peut-être qu'échaudés par le semi-échec de Silence, leur précédent opus paru en 2006, les suédois ont pris le temps de réfléchir à ce qui leur était arrivé, et se sont sans doute dit que se faire virer d'une major, y avait pire dans la vie. Et qu'entrent le délire et la rigolade. Je ne peux pas voir un hasard dans les titres évocateurs que sont Manager's Wish ou Freak Of Nature (il est vrai que musicalement les suédois sont vraiment à part), et le thème du cirque en lui-même peut se considérer comme une référence au show-business, souvent comparé à un cirque.

Arrêtons-nous un moment sur l'incroyable A Truly Gifted Man : difficile ici de déterminer ce qui est de l'ordre du couplet, du refrain, du pré-refrain, ou du couplet séparé en deux parties. Disons qu'on y entend un mélange de ragga-metal (je ne sais même pas si ça existe) et de riffs plus puissants et épiques, enchaînés avec un refrain composé de chœurs neo-prog et de mélodies pop 80's, avant un sublime et hilarant pont/parodie, vibrant hommage à... Toto. Indescriptible, je relis ce que je viens d'écrire et je me rends compte que c'est presque incompréhensible, bref, y a pas à tortiller plus longtemps, allez-y les yeux fermés.

Quand il le faut, le groupe sait rappeler qu'il est issu d'une scène prog importante et réputée, comme sur l'excellent Confrontation, placé au cœur d'un long épique cette fois-ci plus narratif et découpé en courtes pièces. C'est ici que l'on distingue parfois certaines faiblesses d'écriture (A Mother's Love, un peu trop convenu sauf dans son énorme conclusion). Et il est vrai que le thème « cirque » finit par lasser, c'était inévitable. Mais qu'à cela ne tienne, les morceaux s’enchaînent, dès le début et le superbe The End, et l'incroyable jubilation mélodique que manie si bien l'école scandinave se ressent jusqu'au moindre motif. L'album se termine néanmoins dans une exigence de qualité moins forte, et il faut attendre le dernier morceau (Freak Of Nature) pour retrouver un peu de la vigueur du début de ce Circus Pandemonium.

Car malheureusement cet album a les défauts de ses qualités : autant il était difficile d'imaginer une telle créativité virtuose (et pourtant les suédois l'ont fait), autant il semblait impossible de les voir dans le même temps canaliser cette énergie débordante (et dans ce domaine précis ils ont échoué). Une Circus Pandemonium génial et bordélique, mais qui a tendance à partir un peu dans tous les sens.

0 Comments 06 juillet 2014
Whysy

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