Vous recherchez quelque chose ?

Le Devin Townsend Project, devait pour son créateur, être un défi personnel. Clôturer dix ans de compositions dans un bilan musical et personnel en quatre albums bien distinct, sorti dans un délai assez court. Commencé en 2009 par la sortie de Ki, album très intimiste et pur puis suivi du très pop Addicted, la quadrilogie prend fin cette année avec la sortie simultanée des deux derniers volets Deconstruction et Ghost.

Avant d’aller plus loin et voir ce que ce troisième album à dans le ventre, un retour et une explication du concept de ces deux derniers albums s’impose. Finalement, tout se résume dans le titre “Deconstruction”. Devin "déconstruit" tous les albums de sa carrière pour en extraire l’essence de chaque. Des ambiances d’Ocean machine aux expérimentations d’Infinity en passant par Ziltoid, Ki, Addicted ou encore Strapping Young Lad, tous les albums clés de sa discographie sont présents.

L’album est parsemé de clins d’oeil aux anciens albums. De l’intro influencée par Ki, au passage flirtant bon avec Ocean Machine, à la ligne de chat repris d’Awake d’Addcited sur "Planet Of Apes", on retrouve même ce bon vieux Ziltoid sur "The Mighty Masturbator".

Deconstruction à travers la mise en scène d’un personnage faisant face à ses peurs dicte un véritable chant du cygne de Devin à la musique complexe qu’il aimait faire à ses débuts. Le personnage reviens sur son passé pour affronter ses démons intérieurs et s’imposer une réflexion sur le pourquoi de tout cela. On peut très facilement identifier Devin à travers le personnage et dans les paroles, il revient lui même sur le but de ces anciens albums et leur concept. Pour vaincre ses démons, le personnage décide d’aller en enfer rencontrer "le diable", pour finalement se rendre compte que c’est lui même et que ses démons intérieurs ne sont imputables qu’à lui même. Cet album est finalement "une blague karmique", Devin se rendant compte qu’il n’avait pas besoin de créer de la musique complexe et de chercher des explications à tout pour faire de la bonne musique. La dernière chanson de l’album "Poltergeist" met un terme à tout ça en “tuant” tout ces souvenirs.

Disque très complexe et touffu à l’image du concept, plusieurs écoutes sont nécessaires pour cerner la bête et un certain nombre d’autres pour en comprendre tous les méandres et subtilités. Commençant par une surprenante introduction aux tons électro/ambient ,"Praise the Lowered" est un rappel sans équivoque à Ki et notamment la piste "Coast", cela monte doucement en puissance jusqu'à la fin de l’introduction de "Stand", ou Devin murmure "Ready ?". Si "Praisered The Lowered" et le début de “Stand” plantait le décor et restait relativement simple dans leur structure, à partir de ce moment les choses sérieuses commencent.

La signature sonore du Canadien est bien là, à savoir un mur de son massif composé d’un mille feuilles de pistes de guitares, mêlées à une puissante section rythmique et pour cet album à l’orchestre philharmonique de Prague. La production est une fois de plus sans défaut, le son est lourd et massif tout en restant très propre. L’orchestre n’est pas noyé sous les parties metal et inversement les parties metal ne couvrent pas les parties vocales. Le mixage assuré par Jens Bogren et Devin Townsend permet à chaque instrument d’avoir sa place et d'être parfaitement audible. L’orchestre est utilisé de manière intelligente contrairement à d’autres groupes actuels cherchant à tout prix à imiter les compositeurs de bande originale et tombe rapidement dans le pompeux et la facilité. Appuyant la partie rythmique notamment la batterie, l’orchestre permet aux morceaux d’avoir une puissance assez jouissive et le côté épique que l’ont pouvait déjà trouver dans "Ziltoid The Omniscient" se retrouve ici réellement exploité. Les chœurs sont utilisés avec parcimonie permettant des breaks et ponts surprenants ("Planet Of Apes") ou de créer des refrains bien épiques ("Sumeria").

Annoncé comme son album le plus extrême, il l’est bien, mais pas dans le sens ou on l’attendait. Certains pouvaient y voir une résurrection de SYL, il n’en est rien. Le côté extrême de l’album se trouve dans la totale absence de limite que c’est fixé le canadien. Aussi bien au niveau musical, on tape dans tout les styles, qu’au chant Deconstruction est à l’heure actuelle, l’album possédant la plus grande variété de voix aussi bien des invités que de Devin qui prouve encore une fois son grand talent de chanteur. On passe du growl typique de Strapping ("Poltergeist" en est le plus bel exemple”) à un chant éthéré qui n’est pas sans rappeler "The Greys" issu de l’album Ziltoid. Devin monte même sa voix à un niveau auquel il ne nous avait pas habitués dans "The Mighty Masturbator".

Les compositions et structures sont à l’image du titre complètement déstructuré. Si à la première écoute l’ensemble peut paraître totalement incohérent, il l’est beaucoup moins par la suite. La musique suivant les pérégrinations du personnage en proie aux doutes et à l’incertitude. Les compositions suivent donc ce chemin et on assiste à des pistes “tiroir” possédant de multiples styles, mais gardant une cohérence et une ambiance propre. On navigue du progressif à l'expérimental en passant par l’electro et l’extreme. Le plus bel exemple est "The Mighty Masturbator", piste voulue comme un étant une parodie des groupes recherchant toujours plus loin la complexité en rallongeant les pistes et misant sur le niveau technique des musiciens (piste autoparodique au passage).

Un album qui ne plaira pas à tout le monde,les fans de Strapping Young Lad s’attendant à un grand retour pourront être déçu ainsi que ceux cherchant un album qui s’écoutent sans réelle attention ou en ayant une compréhension avec rapide. Pour ceux qui ne connaissent pas trop la discographie du groupe, l’album restera assez hermétique et incohérent et nécessitera de l’investissement. Il en reste pas moins un petit bijou de progressif extrême symphonique, véritable condensé du savoir-faire du groupe et opposé total du très zen et pure Ghost dernier album de la quadrilogie mais ça c’est une autre histoire.

0 Comments 19 juin 2011
Whysy

Whysy

Read more posts by this author.

 
Comments powered by Disqus