A l’occasion de la sortie du troisième album de Epica, « The Divine Conspiracy », c’est le très sympathique leader du combo néerlandais Mark Jansen qui s’est prêté au jeu de l’interview. L’occasion pour lui de nous parler de ce nouvel opus, de la nouvelle orientation musicale de Epica et des projets à venir. Interview !!

Heavylaw : Salut Mark, et merci de répondre à nos questions. Votre nouvel album, The Divine Conspiracy, sort début septembre en Europe. Peux-tu brièvement nous présenter le concept de ce nouvel opus ?

Mark Jansen : Avec plaisir. Il s’agit d’un concept assez long à vrai dire, mais je vais essayer de faire court (rires) !! L’histoire derrière « The Divine Conspiracy » est que Dieu a créé plusieurs religions pour l’humanité, a priori différentes, et a décidé de voir comment les hommes réagissent quand ils se rendent comptent qu’au final, toutes les religions sont reliées les unes aux autres et qu’elles ne forment qu’une seule et même chose. Dieu veut voir si les hommes vont s’entretuer dans des guerres de religion ou si au contraire ils vont arrêter de se battre en réalisant qu’ils sont tous égaux. C’est un test en fait, le personnage principal de l’album essaie à un moment donné de prêcher que toutes les religions sont égales, mais il se fait tuer par des fondamentalistes à cause de ses idées. Voilà, c’est un peu le concept général de l’album. Vous en saurez plus en lisant les paroles.


Heavylaw : La pochette de l’album elle-même recèle beaucoup d’éléments symboliques liés au religieux : la pomme, le symbole de la femme nue, les arbres… L’album baigne en quelque sorte dans cette atmosphère particulière…

Mark Jansen : Oui tout à fait. Quand j’ai briefé le graphiste pour cette pochette, on s’est mis d’accord sur le fait qu’elle devait receler beaucoup d’éléments religieux, pour mieux imprégner l’ambiance musicale, le concept. Je lui ai cependant laissé de la liberté sur pas mal de détails de cette cover, j’avais envie que les gens qui la voient puissent, à leur tour, interpréter tous les petits détails, toutes les petites choses cachées de cette image. Qu’ils laissent parler leur imagination en somme.


Heavylaw : Musicalement parlant, il y a des évolutions notables. Plus puissant, plus sombre, cet album semble être influencé par des racines presque black ou death métal parfois ?

Mark Jansen : Absolument oui. C’est vrai que dans le passé, nous n’avons pas pu nous imprégner de ces courants, notre ancien batteur n’aimait pas trop pour durcir les rythmiques comme ils peuvent l’être sur « The Divine Conspiracy ». Il avait une touche plus jazzy, plus en feeling, qui nous a permis de faire des choses assez innovantes, exotiques je dirais. Mais c’est vrai que nous voulions du changement par rapport à ça, on sentait que Epica devait se tourner vers des parties beaucoup plus heavy, et avec notre nouveau batteur, on a désormais la possibilité d’inclure des rythmiques beaucoup plus soutenues, plus violentes. C’est une démarche volontaire, et j’en suis très content. Sur l’album précédent, il y avait des désaccords sur la manière dont il devait sonner, mais maintenant tout le monde tire dans le même sens, et  Epica sonne comme Epica doit sonner (sourire).


Heavylaw : Au-delà des rythmiques, il y a plus de place pour tes growls également.

MJ : Oui. C’est logique je dirais. Avec plus de parties sombres et heavy, il y a plus de place pour du chant death, donc j’ai saisi l’opportunité (rires) !!


Heavylaw : Qu’est-ce que veut dire le titre de la chanson « La’fetach Chatat Rovetz » ?

MJ : Oui c’est un nom assez original (rires). En fait c’est de l’hébreu, j’ai un ami israélien qui m’a sorti cette phrase un jour, qui signifie « Le pêché sonne à ta porte », et je l’ai trouvée vraiment intéressante. Même en Israël, peu de personnes en connaissent la signification, car c’est tiré d’un passage assez peu connu de la Bible. Je l’ai gardé dans un coin de ma tête parce que j’aimais beaucoup sa signification.

Heavylaw : The Divine Conspiracy est le troisième concept album en trois albums produits. Envisagez-vous de ne fonctionner qu’avec des concept albums dans le futur ?

MJ : Les deux premiers albums n’étaient que des moitiés de concept albums (rires) !! Je veux dire que « The Divine Conspiracy » est un vrai concept album, dans le sens où le concept est très développé sur tout l’album, ce qui n’était pas le cas auparavant. Mais pour répondre à ta question, on ne sait pas de quoi le futur de Epica sera fait, si on repartira pour un concept album ou si on fera quelque chose de plus classique.


Heavylaw : Cet album est distribué pour la première fois avec Nuclear Blast. Cela a-t-il changé quelque chose dans la promotion ou pendant les tournées comparé à votre ancien label, Transmission Records ?

MJ : Oui un peu. C’est vrai que Nuclear Blast est une entreprise très professionnelle, due à sa taille bien évidemment. Transmission Records avait parfois des bonnes idées, mais parfois aussi des idées tordues (rires), comme par exemple un book photos que l’on a fait, qui a au final coûté très cher et qui ne nous a rien rapporté. Avec son assise financière, Nuclear Blast est plus stable je dirais, plus puissant en termes de distribution, on attend beaucoup d’eux dans le futur.


Heavylaw : Sascha Paeth a donc produit cet album. Est-ce que ça a changé votre manière de composer, de jouer, de chanter ?

MJ : Oui, ça permet d’avoir certaines idées un peu spéciales quand on écrit l’album, on se dit « tiens là je peux essayer d’intégrer ça » en sachant que la production peut te le faire. Mais ça ne change pas vraiment la manière dont tu composes sur le fond, les idées de base restent les mêmes. Par exemple, au départ il n’aimait pas beaucoup les growls sur l’album (rires), mais maintenant il commence à s’y habituer et à apprécier, il expérimente de nouvelles choses, plus de distorsion ou plus de delay. Il commence à s’intéresser à cette manière de faire. Donc sur la composition ça n’a pas changé beaucoup de choses, par contre sur les parties vocales il y a eu un gros travail de sa part, notamment en pré-production.


Heavylaw : D’autant plus que Sascha Paeth est plus réputé pour produire des albums et des groupes de heavy, et pas spécialement des groupes avec des influences extrêmes. C’est nouveau pour lui.

MJ : Oui c’était une nouvelle expérience c’est sûr. Sur les premiers albums, cela sonnait plus doux on va dire, et sur « The Divine Conspiracy », du fait de notre volonté de faire sonner l’album plus heavy, il a du s’adapter en conséquence et expérimenter une nouvelle façon de travailler. Je pense qu’il a bien réussi ce challenge, et qu’il y a gagné, comme nous d’ailleurs, en professionnalisme et en expérience.


Heavylaw : En tout cas, c’est encore un point commun avec Kamelot. Plus les années passent, plus les destins des deux groupes semblent liés non ?

MJ : Oui, c’est évident. Sascha avait fait un super travail avec Kamelot, pour nous c’était presque une évidence de lui faire confiance et de travailler avec lui. Je pense d’ailleurs que la production est un des éléments importants du succès de Kamelot. Tu peux être un très bon groupe, mais si ton album sonne n’importe comment, il passera inaperçu.


Heavylaw : Epica est souvent comparé à des groupes comme Within Temptation ou After Forever. Explique nous ce qui est pour toi la valeur ajoutée de Epica face à ces machines de guerre, qu’est-ce qui fait que Epica est un groupe unique?


MJ : On essaie, au travers de ce nouvel album, d’avoir un son unique, plus puissant. Quand j’ai fait écouter l’album à des proches, ils m’ont immédiatement dit « Wah le son est surpuissant !! » (rires). On a des remarques assez drôles sur ça, c’est sûr (rires). Par rapport à Within Temptation qui a, de plus en plus, choisi une direction plus mainstream, plus classique, je dirais qu’on est parti un peu à l’opposé d’eux…


Heavylaw : Vous êtes passés du côté obscur en fait !!

MJ : Oui c’est peu ça (rires) !!!!


Heavylaw : En plus quand vous avez commencé, en 2003, les groupes « gothiques » à chanteuse étaient très à la mode. Maintenant que le phénomène s’est un peu estompé, comment analyses-tu cette scène ?

MJ : A mon sens, et je parle de manière générale, pas seulement pour nous, ce qu’on appelle la scène gothique avait besoin d’une certaine forme de renouvellement. Il faut apporter de la fraîcheur, des éléments nouveaux pour ne pas que le style s’étouffe lui-même. Par exemple, on aime beaucoup Dimmu Borgir, et quand tu combines certains éléments que tu retrouves chez eux et certains éléments qui nous sont propres, tu peux arriver à des choses innovantes, et intéressantes, un bon mélange des genres. Je pense que le mélange des influences est bon pour ce style, comme pour tous les styles de manière globale.


Heavylaw : On a presque l’impression, en écoutant ce que tu nous dis, qu’Epica a grandi, est devenu adulte.

MJOui c’est un peu ça. Avec notre expérience du monde de la musique, les choses positives comme les choses négatives, on est plus à même de composer avec plus de liberté, plus de visibilité, plus de maturité aussi.

Heavylaw : Vous allez ouvrir pour Sonata Arctica lors des dates en novembre. Prévoyez-vous de revenir en Europe après, cette fois en tête d’affiche ?


MJ : Oui effectivement c’est prévu. Les dates avec Sonata tombaient bien, juste après la sortie de l’album. Mais on a déjà planifié une nouvelle tournée début 2008, qui débutera probablement en février, où on sera cette fois tête d’affiche. On passera par la France bien sûr, en Suisse, en Allemagne… Ca nous laissera plus d’espace pour développer plus les chansons de The Divine Conspiracy.

Heavylaw : Et puis il est vrai que vous bénéficiez d’une très bonne cote de popularité en France, en remplissant sans difficultés des salles à Toulouse ou ailleurs en province…


MJ : Oui c’est vrai. Quand on a sorti notre premier album, la France est un des pays voire le pays ou l’on a reçu le plus grand soutien pour ce que l’on faisait. C’est normal qu’on lui rende la pareille en donnant les meilleurs concerts possibles. J’espère qu’on pourra faire au moins 5 ou 6 dates en France.


Heavylaw : Cite-nous les trois ou quatre pays où vous aimez le plus vous produire en concert. Et ne sois pas politiquement correct !!

MJ : (rires) Non non !! Je dirais que mon pays préféré, c’est le Brésil. Là bas, les gens sont complètement dingues, que ce soit pendant les concerts comme en dehors. Tu te promènes dans la rue et tu prendrais presque pour une star (rires) !! Après je dirais le Mexique, ensuite la France, et pour en donner un quatrième, ce serait Israël, l’ambiance est toujours très particulière mais très agréable là-bas.


Heavylaw : Que penses-tu de l’Allemagne ? Certains groupes disent que l’ambiance n’est pas forcément exceptionnelle malgré les affluences toujours importantes.

MJ : Non l’ambiance est bonne là-bas…


Heavylaw : Attention tu deviens politiquement correct !!

Mark Jansen : (rires) !! Nan il y a beaucoup de fans de Epica en Allemagne, c’est juste que tous les groupes veulent faire des grosses tournées là-bas, et de ce fait les fans ont toujours beaucoup le choix des concerts, peut-être qu’ils en ont trop parfois. Mais ça reste un grand pays pour jouer du métal.


Heavylaw : Est-ce qu’un nouveau DVD est planifié pour cette tournée ? (question de Erzebeth)


MJ : Ca sera difficile je pense. Pour le moment, on réfléchit à mettre le live du Paradiso (ndt : salle de concert très connue située à Amsterdam) en image, et c’est à peu près tout.


Heavylaw : Avec trois albums, vous pourriez maintenant faire un album live.

MJ : On pourrait oui, mais à cause de problèmes obscurs de droits de diffusion dont je vous passerais les détails, on ne peut pas, pour le moment, reprendre les titres de notre premier album pour en faire un live…


Heavylaw : C’est embêtant comme situation…

MJOui, il y a toujours des enfoirés dans le business de la musique, c’est comme ça…


Heavylaw : Avant de conclure cette interview, nous avons un petit exercice pour toi : un blind test. La difficulté est que ce ne sont pas tous des titres métal, on va voir si tu as une bonne culture musicale.


MJ : Je sens que ça va être dur (rires) !!


Titre 1 : Bjork – Yoga

Hum, je dirais Apocalyptica.

Non, pas du tout

(rires) !! (après une vingtaine de secondes) Ah oui c’est Bjork, je reconnais sa voix. Par contre je ne sais pas du tout quelle chanson ça peut être, il ne faut pas m’en demander trop non plus (rires) !!

Titre 2 : Iced Earth – I Died For You

(après quelques secondes)

Ah oui ça c’est Iced Earth. Hum, la chanson est sur l’album The Dark Saga, c’est sûr, mais le nom ne me revient pas… Vengeance Is Mine ?

C’est I Died For You !!

Ah oui voilà. Super titre…

Troisième titre, plus compliqué celui là

Titre 3 : Katie Melua – Nine Millions Bicycles

(après une trentaine de secondes) non là vraiment je ne vois pas du tout…

Katie Melua

Je ne connais même pas de nom (rires) !!!!

Titre 4 : Ennio Morricone – thème original du film Le Parrain

(après une dizaine de secondes) la musique du film Le Parrain, facile ça !!

Et le compositeur ?

Ah zut (rires) !! Hum, bonne question…

Si je te dis Et pour quelques dollars de plus, Le Bon la Brute et le Truand…

Ah oui c’est Ennio Morriconne !!

(on nous fait signe que l’interview touche à sa fin)

C’était le dernier titre, on n’a plus le temps d’en faire d’autres.

Encore un petit dernier, et je dirais que c’est moi qui fait traîner (rires) !!!

OK, encore une chanson. Une très facile pour finir

Titre 5 : Kamelot – Forever

(presque immédiatement) C’est Kamelot (il commence à fredonner le morceau) et le titre c’est Forever. J’adore ce morceau, je pourrais l’écouter en boucle.


Heavylaw : On finit très rapidement. Quelques mots pour les fans français ?

MJ : On va revenir en France très vite pour des concerts énormes, et croyez-moi vous en aurez pour votre argent (rires) !!!!

Smaug et Cliff