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L’arbre à porc-épic n’était plus à sa place dans cette forêt. Le couple de saules pleureurs, voisins envahissants, asphyxiait l’éther d’un doom sinistrement étouffant. A peine plus loin, un contingent de bouleaux- des excités, scandant « au boulot ! au boulot ! » dès qu’il leur pétait un bourgeon- saturait son coin d’atmosphère d’un néo-métal aux normes éditoriales. Ailleurs et partout, une armada de chênes stéréo –les pires- s’était agglutinée aux pieds des hideux pylônes à trois lettres – NRJ, MCM, MTV et j’en passe- qui avaient poussé comme du chiendent, et cette assemblée surexcitée se gavait d’abondantes mixtures populairement correctes qu’elle recrachait avec force décibels. C’était dit. L’arbre à porc-épic allait partir. Et ses habitants décidèrent de l’aider. En lui composant une sorte de BO pour son périple. L’arbre à porc-épic aimait bien la musique de ses invités permanents : intimiste, mélancolique, sombre parfois. Cette proposition lui fit donc plaisir et il s’empressa de l’accepter. Le morceau s’appellera ANESTHETIZE . Poli, l’arbre ne demanda pas pourquoi. La batterie déroule alors une longue pulsation comme rythmée par un ressac invisible. Cela met en train l’arbre à porc-épic, qui lance de grandes enjambées au travers de la sylve honnie. Quelques accords de guitare plaqués, un clavier en filigrane, et la voix de Steven élégamment posée sur une mélodie qui va gagner en intensité et qui n’a de cesse de vous trifouiller l’âme. Cela plaît à l’arbre qui s’éloigne en souriant, apaisé.  Le tempo prend alors une tournure plus décidée, en harmonie avec la sérénité ambiante. Las, c’est tout un équipage de bouleaux et de chênes stéréo indisciplinés qui déboulent au sortir d’un virage. L’arbre à porc-épic fronce les sourcils et ce sont les guitares qui se font agressives tandis qu’un clavier plus oppressant accentue la menace. Mais Steven veut éviter la confrontation et place une composition toute en retenue mais au refrain fédérateur, et où sa voix, retravaillée par la Machine, ne perd rien de sa carnation. Puis guitare, batterie et clavier temporisent lors d’une prestation qui se veut ferme autant que mélodieuse, avant l’ultime déchaînement des guitares précédant le refrain. C’est le feu et l’eau. Et cela fait son effet. Décontenancés autant que gênés, bouleaux et chênes stéréo filent sans demander leur reste. Steven connaît la passion de l’arbre pour Le Flamant Rose. C’est donc le moment de placer un intermède « à la manière de ». Une chanson tendre sur un accord de guitare électrique entêtant, tandis que les notes d’un piano se déversent comme autant de gouttes de pluie. Puis c’est aux claviers de jouer sur la gamme des émotions. Cela a rasséréné l’arbre qui achève maintenant sa quête à la lisière d’une belle clairière où seul un aréopage de charmes a posé ses pénates. L’arbre à porc-épic apprécie les charmes, car ils sont charmants, les charmes. Steven et ses potes sont eux aussi dans de bonnes dispositions, et décident de ne pas en rester là. Et continuent à composer.  Il y aura entre autres SENTIMENTAL , une mélodie charmante, quelques notes de piano, une batterie qui se fait tendre, elle aussi. Et le chant de Steven, qui émeut jusqu’aux larmes l’arbre à porc-épic quand guitare acoustique et claviers éthérés tendent en arrière-plan un voile diaphane. Il y aura aussi WAY OUT OF HERE , où l’on ne sait plus si c’est la lumière qui jaillit de son refrain, ou si l’on doit s’enfoncer un peu plus dans une torpeur désespérée…Elle dévoilera son cœur métal avant un final apaisé où la basse ronflera doucement sur des nappes de synthés. Le plus direct, le plus rock nouvelle vague, FEAR OF A BLANK PLANET justement, au refrain efficace et son incontournable voix mixée, et où guitares et claviers bâtissent un mur ininterrompu, sans que pourtant aucun réel solo ne pointe le bout de son nez. Le final, plus calme, sacrifie donc au rite du break. ASHES, où des accords de piano et de guitare acoustique accompagnent une mélodie belle à mourir. Belle à mourir, c’est aussi la voix de STEVEN, quand elle se pose sur un vol en formation serrée de synthés qui vous font grimper au ciel direct. L’obsédant SLEEP TOGETHER aux sonorités trip hop autant que rock où cohabitent lancinantes circonvolutions arabisantes et refrains à la voix durcie et déshumanisée par la Machine , et dont l’ outro de claviers vous laissera pantelant  Moins complexe qu’un IN ABSENTIA, ce FEAR OF A BLANK PLANET se veut plus facile d’écoute, plus homogène, à l’image des nappes de synthés qui habillent chaque morceau. Les influences chères à Steven WILSON sont toujours là, qu’elles soient contemporaines ou ancrées dans les années 70. Mélodique et intimiste, ce FOABP ne dédaigne pourtant pas des coups de colère métalliques et offre encore des structures flirtant avec le prog permettant à celui qui écoute d’en passer par différents sentiments. L’utilisation « dépouillée » des instruments interdit donc toute démonstration flamboyante qui serait de toute façon inconvenante, tant il apparaît que chacun, ici, est employé avec justesse, avec une précision que l’on peut qualifier de chirurgicale. Encore que, « chirurgicale » pourrait faire figure de gros mot dans un album où l’émotion ne joue pas seulement la guest star. DEADWING avait divisé les fans, ce FOABP les rassemblera-t-il ? A vous de dire. PapaDuck

0 Comments 01 mai 2007
Whysy

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