Quoi de neuf dans le métal à chanteuse en 2006 ? Déjà cette expression exprime presqu’un regard de dédain vis-à-vis d’un style qui tend à s’appauvrir par la multiplicité des groupes à chanteuses lyriques produisant plus ou moins le même genre d’album.
On ne peut pas tout à fait qualifier Angtoria en tant que tel puisque l’optique de création était, à la base, de faire du métal orchestral. Ce désir était né de l’envie de Sarah Jezebel Deva et Chris Rehn (Abyssos et ex-Evergrey entre autres). Je vous vois d’avance vous agiter mais non la seule présence de Sarah ne suffit pas à orienter la musique vers un chant lyrique. Par ailleurs elle déclara à cet égard qu’elle n’aime pas tellement les groupes de métal à chanteuses lyriques et préfère les groupes plus heavy et ce en dépit de ses multiples rôles de chanteuse lyrique dans divers groupes. Elle affirme vouloir au contraire retourner vers un chant plus accessible pour permettre aux fans de chanter sans difficulté. Dès lors le groupe se définit comme groupe de métal « épique ». Mais qu’en est-il réellement ?

La musique a été entièrement composée par Chris Rehn, on aurait pu penser trouver des éléments black transparaissant de son expérience avec Abyssos mais il n’en est rien. Sarah s’occupe, elle, essentiellement des paroles et lignes de chants. Le son est de qualité, on retrouve d’ailleurs Daniel Bergstrand (In Flames, Soilwork, Behemoth, Strapping Young Lad) au mixage. Les seuls membres permanents du groupe sont Sarah, Chris et Tommy le frère de Chris, pour le reste le groupe s’est entouré du bassiste Dave Pybus (Cradle Of Filth et ex-Anathema) et de Andreas Brobjer (Platitude) la derrière sa batterie.

God Has A Plan For Us All présente une imagerie sombre, en témoigne la cover montrant Toni Davey recouverte de sang et à demi nue. Celle-ci renvoie au titre éponyme, dont un clip a été tourné, qui raconte la vie d’une fille qui fut violée par un prêtre à l’âge de cinq ans et qui tente de vivre avec cet horrible souvenir qui finalement la conduira au suicide. La musique du groupe sonne définitivement symphonique comme en témoigne l’introduction The Awakening qui nous suggèrera par certains côtés le nom de Carmina Burana. Malheureusement le groupe n’a pas pu bénéficier de véritables sons et a dû s’accommoder de banques de sons qui finalement sonnent plutôt bien.
Ce qui ressort le mieux est évidemment la voix et les orchestrations, les autres instruments s’efforcent de rythmer le tout et de décupler la puissance du chant ainsi que celle des orchestrations. Les refrains et mélodies sont convaincants et accrochent, si bien que lorsque l’on ira faire autre chose on se surprendra à fredonner les mélodies. Le fait que Sarah ait abandonné le son soprano que l’on exigeait d’elle dans les autres groupes, confère une certaine fluidité à la musique, la voix semble découler des orchestrations et fait parfaitement naturelle. Sa voix parvient à s’adapter aux ambiances et comporte diverses nuances qui nous éloignent d’un chant monocorde.
Les refrains sont généralement puissants, rythmés de telle sorte que l’on s’imagine aisément dans la fosse entrain de suivre la cadence. I’m Calling et son refrain enchanteur met d’emblée l’auditeur au fait du type de musique jouée, beaucoup d’orchestrations et hélas très peu de solos de guitare, curieux quand l’on sait que c’est le guitariste qui a composé la musique, ceci dit, à l’exception de la ballade That’s What The Wise Lady Said où le solo se révèle très inspiré. On pourra également mentionner Deity Of Disgust avec ses influences orientales où Richard Andersson vient faire un solo typé Andersson. Sur cette piste on retrouve un des chanteurs guests invité pour l’album.

Au rang des critiques se placent les ambiances, leur spectre est plutôt restreint même si un titre comme Original Sin sonne plus sombre que le reste avec un chant death très discret. De plus on pourrait ajouter que le groupe n’apporte rien de très nouveau au style même si leurs compositions restent agréables et bien ficelées. Soyez en sûrs, des titres comme God Has a Plan For Us All ou encore Six Feet Under’s Not Deep Enough ne vous laisseront pas indifférent. La question posée reste dès lors la durée de vie de cet album, quand viendra-t-on à céder à la lassitude?

En somme cet album pourra conquérir le cœur de nombreux métalleux friands de voix féminines et des éléments symphoniques. Cet album sera pour beaucoup de monde une tuerie. Néanmoins, pour les plus regardants sur l’aspect musical, cet album ne fera office que de bon album qui gagnerait à être creusé musicalement car un peu limité au niveau des ambiances et du jeu de guitare. Comme l’avait dit la chanteuse dans une interview « j’aurais aimé qu’il y ait plus de guitare ». Et bien moi aussi…

Dreamer