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Home m’a complètement mystifié. Rien de très étonnant finalement. Mais comment montrer des signes de lassitude à constater que les bataves se remettent sans cesse en question, refusant catégoriquement de reprendre les recettes établies du passé. Rares, trop rares sont les formations à fournir cet effort constant de renouvellement, d’innovation qui tire inévitablement la musique vers le haut. Et The Gathering, fort de cette dynamique, semble touché par quelque magie tant leurs choix se révèlent pertinents et judicieux. Home ne fait pas exception à la règle, il la sublime avant tout.  Avant la sortie de Home, René Rutten, le guitariste du groupe, avait annoncé que l’album serait tourné vers les guitares. On pouvait donc s’attendre à une nouvelle évolution musicale après un Souvenirs très tourné trip hop, donc foisonnant d’électronique. Et force est de constater que cela se vérifie après quelques écoutes seulement, l’électronique prend un peu de recul, et laisse la place aux guitares, nettement plus électrisées.  C’est l’évolution majeure de Home. En redonnant une place d’honneur aux six cordes, la musique des hollandais redevient plus humaine, plus sensible, mais moins sombre aussi. Impression confirmée par les parties vocales : sans juger la performance vocale de Anneke Van Giesbergen, qui reviendrait à lui faire insulte tant sa voix frise sans cesse la perfection, on constate que la voix se fait plus douce, plus fluette, moins insistante, presque enfantine parfois. On note avec plaisir le retour aux ballades piano / voix, illustré par Forgotten, petite perle en la matière tant les émotions submergent la musique.  Ce qui se rapprocherait du style de Home serait du rock mélancolique, mais avec une approche très personnelle propre au groupe. Approche moins sombre donc, par rapport à Souvenirs, très mécanique, presque déshumanisé. On retrouve les petites touches plus enjouées, plus lumineuses, sans omettre les touches plus fiévreuses, les refrains qui nouent les tripes rien que par leur aura, leur intensité : pour s’en convaincre, rien de mieux que la trilogie qui ouvre l’album : Shortest Day, In Between et Alone vous propulsent sur une autre planète, notamment le refrain transcendant de In Between. Les ambiances sont peaufinées à l’extrême, la voix est comme doublée par l’électronique ce qui renforce l’effet grisant de la chanson. On ne peut s’empêcher de penser à Radiohead sur certains titres, par exemple sur l’expérimental Box.  Et puis il y a les inclassables, tel Solace, titre vraiment déroutant, avec des voix narratives en anglais, espagnol et même français, et une rythmique quasi militaire et une ambiance presque psychédélique. Tous ces effets pour renforcer les paroles, qui dénoncent une vie réglée comme une horloge, sans intérêt réel, une vie sans vie si j’ose dire. Et les paroles constituent un des points forts de l’album. Le ton est dénonciateur, sans pour autant devenir violent, il met en avant une désincarnation des rapports humains, un individualisme trop poussé qui nous conduit à un inexorable isolement social. Et c’est en forme de conclusion que The Gathering sort Forgotten Reprise, une chanson finale d’une tristesse profonde, d’une beauté incroyable : en quasi instrumentale, les 6 dernières minutes font l’effet d’un dernier souffle de vie.  Une chose est sûre : rentrer dans l’univers si particulier et si esthétique de The Gathering est un impératif pour saisir toute la beauté de leur musique. Sans cela, difficile de percevoir l’essence même du groupe. Avec un son envoûtant (le retour de Attie Bauw aux commandes et le fait d’avoir enregistré l’album dans une petite église dans le sud de la Hollande n’y est pas pour rien), qui se rapproche assez de How To Measure A Planet ?, Home possède ce quelque chose en plus. Plus on se demandera dans quelle direction musicale va se tourner The Gathering sur sa prochaine offrande, plus on sera loin de la vérité. Cette capacité à se renouveler sans jamais se répeter est la plus grande force du groupe, et Home perpétue la tradition de la plus belle des manières. Plus humain que son prédécesseur, moins complexe sans doute mais toujours aussi électrisant, il s’impose dès maintenant comme l’un des meilleurs albums du groupe. Tout simplement.

0 Comments 12 avril 2006
Whysy

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