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Bigelf. Voici un groupe particulièrement intéressant et étrange, qui pratique une musique ne ressemblant à aucune autre. Ou plutôt à beaucoup d'autres en même temps. Du rock/metal prog bien barré, avec Black Sab et Blue Oyster Cult pour les influences metal, et King Crimson et Pink Floyd pour les influences prog. Jusque là ça a l'air plutôt alléchant effectivement, mais il manque un ingrédient majeur qui les identifie spécifiquement : leurs influences Beatles.

Si on a souvent tendance à considérer que chaque groupe pop est plus ou moins influencé par les Beatles (et sans doute à raison), c'est autre chose de tomber sur un groupe dont les sonorités et les techniques de compositions sont directement hérités des Fab Four. Et surtout pour un groupe de sludge-prog, une sacrée rareté ! Cette filiation géniale vous sautera aux oreilles dès le premier morceau, Incredible Time Machine, sorte de Sgt Pepper cosmique. Mais revenons au début.

Bigelf, c'est Damon Fox, le chanteur, claviériste, et principal compositeur. Dernier membre originel, il est entouré en 2014, pour le quatrième album du groupe, de Duffy Snowhill (basse), Luis Maldonado (guitares), et Mike Portnoy (batteur de session). Oui, le Mike lui-même, qui joue dans un album de metal sur trois depuis son départ officiel de DT. Et cet album, Into The Maelstrom, a failli ne jamais voir le jour, puisqu'en 2010 Fox avait annoncé le hiatus de Bigelf après le décès d'un ancien membre du groupe. Finalement décidé à remettre le couvert, le leader fait donc paraître cet opus six longues années après le précédent, et le moins que l'on puisse dire c'est que cette attente bénéfique permet au groupe de nous offrir une musique rafraîchie et énergique, sans redite ou sans tourner en rond. Une leçon à méditer.

L'album démarre tambour battant donc, avec le superbe Incredible Time Machine, et les mélodies sixties passionnantes tranchent habilement avec la prod plus moderne, parfois soutenues par des sonorités seventies. Oui je sais, c'est assez hallucinant, mais c'est un peu ça : Lennon écrivant des morceaux avec des synthés prog seventies enregistrés dans des conditions modernes. Et on sent le melting-pot d'influences diverses et variées puisque Fox se permet de nombreuses variations au sein des morceaux, même si ceux-ci sont assez courts, à l'image du dernier Flower Kings. Je rajoute que le chanteur fait évoluer sa voix entre l'ironnie de Lennon et le grinçant d'Ozzy, et j'arrête là avec le catalogue.

Car Into The Maelstrom n'est pas qu'un blind test prog, c'est aussi un excellent album blindé de mélodies superbement travaillées : Already Gone, Mr Harry McQuhae, ou encore le superbe Theater Of Dreams. Ces morceaux, ainsi que la majorité des petites pièces de l'album, présentent une couleur pop très marquée, et leur courte durée fait qu'on en vient plus à penser à du pop-metal, pour autant que ce truc existe. D'autres morceaux, plus longs cette fois-ci, sont plus prog ou metal-prog, et le Mellotron est de sortie : High, Edge Of Oblivion, ITM, sont construits comme de petits opéras, reprenant les ambiances circus metal des albums précédents.

C'est donc un excellent album que cet Into The Maelstrom, difficile à définir et parfois difficile à cerner même si Fox et ses comparses ont l'intelligence de toujours privilégier les mélodies, rendant l'écoute des plus faciles et agréable. Néanmoins, son aspect transgenre ravira surtout les fans des deux styles (pop et metal), et risque de décevoir ou dérouter ceux qui sont allergiques à l'un ou à l'autre. Un sacré grand écart, plutôt bien maîtrisé pour le coup, mais qui peut parfois sonner un peu creux ou superficiel, comme si la volonté d'étonner avait été supérieure à toutes les autres. C'est un délicat objectif que celui de l'album parfaitement équilibré, entre surprise et plaisir, puissance et mélodie, virtuosité et simplicité, et en voici une des plus belles tentatives de l'année.

0 Comments 29 juin 2014
Whysy

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