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Parce que KILLERS sort son formidable nouvel album, 10:10, parce que Bruno Dolheguy est une personne absolument charmante et passionnante, et parce que ce groupe n'aura de toute façon jamais une couverture médiatique digne de son talent... Voici l'interview de KILLERS !


wazbones : Bonjour Bruno.
Nous célébrons aujourd’hui la sortie de votre nouvel album, 10:10. HABEMUS METAL avait eu une vraie couverture médiatique en 2002, suivi rapidement du live de 2003. Il a fallu attendre ensuite 4 ans pour A L’OMBRE DES VAUTOURS, puis 5 ans jusqu’à ce nouvel album. Etait ce une volonté de freiner la cadence des sorties ?

Bruno Dolheguy : A L'OMBRE DES VAUTOURS a été aussi suivi rapidement d'un live en 2008, on reste donc sur cette même attente de 4 ans. C'est effectivement un délai relativement important mais on a tout d'abord continué nos organisations de concerts liées à Bidache Metal puis on a fait pas mal de concerts dans l'hexagone dont celui du Paris Metal France Festival en 2008 qui nous a donné l'occasion de sortir ce nouveau live. Il y a aussi eu quelques festivals, notamment en Espagne et en Allemagne. Puis nous avons remonté le répertoire avec Carlo qui nous a rejoint à la batterie et on a repris à nouveau les concerts avec également d'autres festivals. Il n'y avait donc pas de volonté particulière de freiner la cadence des sorties mais il est vrai qu'il n'y avait pas non plus de volonté particulière de l'accélérer. C'est une chose qui va maintenant changer et je compte bien arriver à augmenter très significativement cette cadence. Ce dernier délai de 4 ans a d'ailleurs été aussi mis à profit pour pouvoir se mettre dans des conditions qui pourront permettre d'y arriver.    

KILLERS sort aujourd’hui 10:10, qui représente, à mon sens, un des tous meilleurs albums de votre carrière. Aviez vous commencé l’écriture des morceaux depuis la sortie de l’album précédent, ou tout est plutôt récent ?

Carlo nous ayant rejoint en 2010, on n'a pas décidé à un moment bien précis de composer un nouvel album. Ayant notre propre matériel d'enregistrement, on a mis à profit des périodes intermédiaires en 2011 plus calmes au niveau des concerts pour se consacrer à cela. Quand j'ai pensé que le nombre de morceaux abordé était suffisant pour constituer l'ossature d'un nouvel album, on s'est recentré sur ces titres et tout est allé finalement assez vite.

Même si les fans du groupe sont déjà tous au courant, je pense qu’il est bon d’éclaircir, pour ceux qui ne le savent pas encore, la signification du titre de l’album...

En fait c'est l'heure à laquelle on s'est dit qu'il fallait trouver un nom pour cet album. Nan ... je déconne ...
Il y a beaucoup de 10 dans l'histoire (nombre de morceaux, date de sortie, prix, etc...) mais il y a (entre autres) aussi une envie de positiver le présent et l'avenir en plaçant les aiguilles sur cette heure précise.
Je ne sais pas si vous en avez déjà entendu parler mais les dispositifs de temps (horloges, montres, etc ...) sont très souvent présentées avec des aiguilles disposées sur 10h10. C'est une question d'esthétisme qui est plus positive au regard (effet smiley)
Il fut un temps où j'aurais plutôt voulu évoquer l'opposé (8h20) ou le voisinage (10h09 ou 10h11) mais j'ai plutôt eu envie avec cet album d'avancer un 10h10 net et sans bavures.

10h10 : se mettre à l'heure, une bonne heure, une heure positive, qui laisse du temps (+ que 22h10 … même si physiologiquement parlant cette affirmation se discute), qui prévoie des heures à venir même si cette heure se visualise sur notre pochette par la position des fémurs brisés situés habituellement sous une tête de mort.

Le format d'heure numérique a été retenu pour internationaliser cette notion car il ne faut pas oublier qu'on a aussi proposé le tarif de 10 euros port compris pour le monde entier.

Il y a une affirmation qui consiste à vouloir nous présenter comme ayant décidé de prendre une route qui sera peut-être plus confidentielle mais dont nous maîtriserons au moins tous les tenants et aboutissants. Sur cette route, nous comptons développer les notions de soutien direct au groupe et nous ne nous perdrons pas (ou plus) en des lieux de promotion certes parfois respectables mais qui nous font devoir consacrer moins de temps à ceux qui sont pourtant toujours là, à répondre présent dès qu'on leur passe le moindre signal.

Pour concrétiser ce sentiment, il s'agit aussi d'un engagement que nous prenons pour donner rendez vous à tous ceux qui nous font l'honneur d'apprécier notre groupe en leur disant que dorénavant nous avons réussi à nous mettre dans une configuration et un état d'esprit qui nous amèneront à nous rencontrer beaucoup plus régulièrement par le biais de nouveaux albums.

Sur ce principe, il faudra vous attendre à devoir entendre des choses qui vous emballeront comme d'autres qui ne le feront peut être que dans une moindre mesure selon vos propres goûts et vos préférences (même si l'on est certain à 109% que la très grosse majorité d'entre vous accrochera à ce qui, en fin de compte, a toujours caractérisé KILLERS).
Le principe de base reste que nous proposerons toujours des titres qui sont validés et assumés par tous les membres du groupe.

Tant que nous nous sentirons accompagnés par quelques personnes qui éprouveront du plaisir à écouter ce qui nous rend heureux, ça nous conviendra.
La notion intentionnellement affirmée positive doit prédominer même si notre regard n'oubliera jamais de demeurer particulièrement vigilant à l'évolution de notre « si belle » société.
En disant que les pendules sont désormais à l'heure, il ne s'agit pas de dire que ce qui s'est passé auparavant était totalement hors contrôle, c'est juste un des avantages de l'expérience dont KILLERS peut se targuer après quasiment trente années d'existence.

L’album est à la fois très metal mais surtout très mélodique, et on sent que les lignes de chant ont été fortement travaillées. Etait ce une volonté de ta part de mettre en avant ce coté des accrocheur des refrains et des mélodies d’une manière générale ?

Les lignes de chant de 10:10 devaient forcément être plus diversifiées puisqu'elles se trouvaient dans un contexte de morceaux plus variés. HABEMUS METAL présentait une prédominance Thrash plus importante qui laissait globalement moins de possibilités en terme de mélodies. Cela a un peu évolué avec A L'OMBRE DES VAUTOURS puisque la palette des morceaux a aussi un peu commencée à bouger en terme de prédominances de styles. Comme 10:10 a poursuivi sur cette voie en présentant une plus grande variété de tempos, cette tendance s'est amplifiée mais cela n'a pas demandé particulièrement beaucoup plus de travail, c'est le contexte qui l'a finalement rendu nécessaire et possible.  

Le morceau «Tricheurs» contient un extrait d’un fameux match de football du 18 novembre 2009. Peux tu nous éclaircir sur ta perception de l’événement, et ce qui t’a poussé à en faire une chanson ?

L'extrait choisi concerne la fameuse histoire de la main de Thierry Henry qui a permis la qualification de l'équipe de France de football pour la coupe du monde qui s'est finalement soldée par la pantalonnade que l'on sait. Il s'agit juste d'une illustration, ce n'est pas le sujet principal de l'histoire. Le foot n'est d'ailleurs pas le seul visé par ces dérives. Je suis depuis toujours un grand passionné de rugby pour y avoir joué mais aussi en tant que spectateur. Tout ne me plaît pas, loin de là, depuis le passage au professionnalisme. Il y a des bonnes choses mais il y en a beaucoup de moins plaisantes. Quasiment tous les sports sont concernés plus ou moins par ces aspects peu reluisants. Regarde le cyclisme, regarde le hand ball qu'on croyait naïvement encore à l'abri (merci les paris sportifs au passage !!!), regarde les sports mécaniques qui souvent constituent de fait leurs classements selon les moyens financiers engagés, je pourrais continuer avec des dizaines et des dizaines de sports. Je suis à l'origine passionné de quasiment tous les sports qui existent pour les valeurs véhiculées et l'engagement qu'ils demandent mais force est de constater que la plus grande part de tout ça ne se trouve plus que dans les pratiques en milieu amateur. Et encore, il y a là aussi beaucoup à dire et je pourrais en raconter des tonnes durant des heures. J'ai connu ça aussi gamin, donc pas forcément hier, en étant sélectionné pour jouer dans des équipes régionales de rugby mais tu vois qu'on te fait jouer cinq minutes, pas à ton poste de prédilection, sans que tu touches un ballon alors que le fils de tel ou tel entraîneur d'un club plus huppé va jouer comme une brèle pendant une heure et sera finalement sélectionné pour jouer à un niveau supérieur, tu as un peu de mal à le digérer. On s'en foutait assez vite car on jouait d'abord pour le plaisir mais c'est le style de chose qui te donne envie  d'aller voir ailleurs. Mais bon, finalement c'est le sport qui est aussi plus ou moins à l'image de ce qui se passe dans la vie. Il ne faut pas s'en dégoûter mais il faut rester lucide, c'est ça qui te permet de garder une bonne sérénité.

«Manipulés» est un des brûlots de ce disque. D’une durée de quasiment 8 minutes et composée de deux parties distinctes (ballade, puis morceau très rapide), elle rentre à mes yeux directement dans la catégorie des classiques du groupe. Etait ce intentionnel dès le départ de réaliser une chanson aussi longue ou as tu fusionné deux idées de morceaux suivant un même thème ?

Bien vu !!! En fait, j'ai du gentiment « ruser » un tout petit peu car les autres membres du groupe n'étaient pas particulièrement portés sur une inextinguible envie de présenter une ballade. J'ai proposé ce préambule à un morceau déjà existant car je pensais que ça pouvait former un ensemble intéressant. Sur le coup, ils n'ont pas été d'emblée totalement convaincus mais ils n'ont pas non plus mis de veto particulier en respectant cette envie. Ce qui m'a fait super plaisir quand ils ont entendu le morceau terminé, c'est qu'ils ont immédiatement adoré notre travail et que depuis, ils le jouent très souvent en début de répétition.  

Les textes, en Français, sont, comme d’habitude chez KILLERS, très travaillés et lourds de sens. Peux tu nous en dire plus sur votre processus de composition ? As tu déjà des thèmes en tête lors de l’écriture des morceaux ou l’inspiration littéraire te vient elle en tête une fois les riffs de guitare et le schéma musical trouvés ?

Lors de la composition d'un morceau, je laisse évoluer les choses en pensant plus ou moins précisément aux structures de chant. Cela ne se traduit jamais par des mots précis, juste des lignes que je marmonne intérieurement. A chaque écoute, elles sont là et je continue à les faire suivre, en les affinant si besoin, jusqu'à ce que je me décide à les concrétiser par l'écriture d'un texte. Idem pour l'écriture, je cogite assez longtemps sans rien coucher de précis et quand je sens que le temps est venu d'attraper un papier pour écrire un texte, je m'y met sans généralement m'y attarder trop longtemps. Pour ce qui concerne les thèmes, il n'y a pas vraiment de règle. Il peut arriver parfois que la musique donne envie d'évoquer certains thèmes mais le plus souvent ça reste totalement lié de près ou de loin à la sensibilité du moment ou aux éternels sentiments reliés à sa propre personnalité.  

Les moyens techniques d’aujourd’hui permettent de réaliser des clips vidéos avec peu de moyens. Et Youtube est devenu un vrai moyen de communication et de promotion. Etant donné le potentiel accrocheur de certains titres (que j’évoque dans ma chronique, tels que «Nom de dieu», ou surtout l’imparable «Insupportable»), est ce dans vos plans ?

Non, le temps n'étant pas extensible, nous allons nous consacrer exclusivement à l'enregistrement de nouveaux morceaux inédits. Nous avons mis de côté beaucoup de plans depuis de nombreuses années, il nous faut essayer de réduire ce perpétuel décalage qui ne fait que s'amplifier au fil des années.

Tu as décidé de sortir de manière totalement autonome ce nouvel album, en marge des maisons de disque et réseaux de distribution habituels. Peux tu nous expliquer ce choix, et peut être nous donner déjà quelques retours sur l’accueil de 10:10 ?

Lorsque nous avons voulu placer notre dernier live dans le circuit de distribution classique, le label nous a remonté l'info que certains râlaient car nous ne vendions pas assez cher nos albums, ils prenaient ça comme une concurrence déloyale.
Du coup, ça m'a pris la tête et j'ai demandé à ce que nous ne soyons plus distribués. On a fait depuis pas mal d'années de très nombreux efforts pour essayer de pouvoir concrétiser ces prix en bout de chaîne et quasiment jamais rien de vraiment très concret n'est venu. Qu'ils commencent à nous faire ce type de reproche a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Donc dorénavant, nos albums ne sont plus disponibles en magasins ni en vpc classique. Ils ne sont plus disponibles qu'en vente directe auprès de nous par le biais de notre site ( http://killers.neuf.fr ) et sur Amazon, Priceminister et Ebay.
C'est évidemment beaucoup de boulot mais ça ne me gêne pas car j'aime bien ça. J'adore être en contact direct avec les gens qui nous font l'honneur d'apprécier notre musique, c'est vraiment cool et motivant car ils sont tous vraiment adorables . Je ressens encore davantage cette notion de soutien direct affirmé, c'est très important pour garder l'envie de continuer encore plus fort.

Parlons concert si tu le veux bien. KILLERS n’a jamais été un groupe de «tournées», mais plutôt de concerts plutôt éparpillés. Il peut donc être compliqué de pouvoir vous voir en dehors de votre région. As tu des plans sur 2013 pour donner la chance à vos fans français de vous voir facilement ?

Pour le moment, c'est plutôt calme et ça bougera sûrement un peu plus avec la sortie du nouvel album mais les paramètres n'ont pas changé pour nous donc on continuera à jouer ponctuellement sur les concerts qui nous seront proposés. Ce n'est pas pour autant que l'on va rester inactifs puisqu'on vient même de recommencer à enregistrer de nouveaux morceaux.

Killers fait partie de la légende du hard rock Français, est aujourd’hui un des rares groupes encore en activité depuis les 80’s, et sans doute le seul a avoir toujours continué à sortir régulièrement des albums. Quel regard portes tu aujourd’hui sur ta riche carrière musicale ?

Je n'ai de regard particulier sur le passé, j'ai assez à faire avec le présent. Il peut néanmoins y avoir des choses qui se recoupent. Actuellement ce serait plutôt lié au fait que je voudrais qu'on se disperse moins pour pouvoir diminuer très significativement le délai entre deux sorties d'albums de morceaux inédits. C'est juste du concret, ça n'a rien à voir ni à faire avec un regard sur ce que tu qualifies gentiment de « riche carrière musicale ».  

En parlant des groupes français des 80’s, vous êtes donc quasiment les derniers survivants avec ADX (qui a sorti un album l’an dernier) et Satan Jokers (qui en sort un en janvier), Still Square se faisant rare depuis son retour et Blaspheme étant sur le point de se séparer définitivement. Les connaissez vous particulièrement et vous sentez vous proches de tous ces groupes ?

Nous nous sommes croisés plus ou moins souvent selon les groupes que tu viens de citer et ça s'est toujours généralement bien passé. Après, il faut se rendre compte que, du fait de notre situation géographique, cela ne se passe qu'à l'occasion de concerts. Ce n'est pas le moment le plus approprié pour lier des liens très étroits car le temps passe très vite et chacun a aussi beaucoup de chose à faire en s'occupant de sa propre organisation. On est donc tous relativement assez proches dans nos chapitres respectifs mais l'éloignement géographique qui est le notre nous restreint un peu au niveau d'une proximité relationnelle plus forte.  

Merci à Bruno pour cette interview. Maintenant, foncez écouter 10:10 !

0 Comments 01 décembre 2012
Whysy

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