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Hacride fait partie de cette caste très fermée d’excellents groupes extrêmes à la fois inventifs et intelligents qui participent à la valorisation du métal français à l’étranger. Ces poitevins sont devenus à force d’excellents albums la coqueluche de toute une communauté et porte l’espoir, au moment où Gojira explose au niveau mondial, d’une pareille ascension. Pourvoyeur d’un métal violent et esthétique, ces jeunes prodiges sont adeptes de la prise de risque. Si leur album précédent « Amoeba » avait reçu nombre d’élogieuses critiques en son temps, la nouvelle offrande « Lazarus » semble marquer un nouveau départ dans la carrière du groupe. Ces quelques années mises à profit leur auront permis de mûrir et de se construire un univers propre en gommant progressivement influences et imperfections. En cela, et par ses qualités intrinsèques, ce « Lazarus » s’impose comme l’une des sorties marquantes et large favori au meilleur album de l’année, pour ma part.

Si cet album s’avère aussi impressionnant, c’est que l’on ne s’attendait pas à un tel revirement de situation. Si nous connaissions Hacride auparavant c’était en tant qu’ambassadeur d’une musique violente privilégiant la technique et l’efficacité à l’émotion. Nos français ont semble – t – il décidé de duper leur monde pour mieux assener une claque monumentale avec un « Lazarus » explorant une toute nouvelle facette de cette musique. En cela l’album développe à la fois ses attributs atmosphériques et s’épanouit au sein de chansons très progressives. A la fois longues et riches ces sept fresques s’avèrent être aussi épiques que jouissives. Hacride se montre à la fois moins technique, plus posé mais également beaucoup plus mélodique tout en restant fourbe et enclin à surprendre.

Hacride considère la musique comme un défi dont l’un des buts majeurs est de se mettre en danger et de prendre des risques. C’est d’ailleurs l’un des fils conducteurs de ce 3e album et se ressent dès l’ouverture. « To Walk Among Them » est une prouesse de tous les instants et étend sur 15 minutes son aura majestueuse. La chanson redéfinit les codes musicaux des poitevins et impose le respect par sa finition parfaite et sa maîtrise à nous embarquer dans un véritable voyage. Cet album est conçu comme une musique de film avec ce que cela sous entend d’évolution d’un point de vue musical et structural. Ainsi « To Walk Among Them » repose sur une construction labyrinthique où l’expérimentation n’a pas de limite : riffs percutants, mélodies imposantes, passages atmosphériques nombreux et travaillés à outrance, émotion, performance vocale magistrale… Un véritable chef d’œuvre en puissance.

« Act Of God » enfonce le clou et assume à merveille son rôle de titre agressif par un riff d’ouverture absolument saisissant. Hacride ne sombre jamais dans la facilité et les chansons possèdent cet aspect imprévisible parfois déconcertant : on ne sait jamais ce qu’il va se passer. Si « Act Of God » se démarque par une première partie groovy et violente à souhait, la dernière minute se veut atmosphérique par un clavier discret mais touchant. Le groupe joue comme cela avec nos nerfs et tempère sa violence par une maîtrise des ambiances bluffante ! Le morceau titre « Lazarus » en est un excellent exemple : si la chanson s’articule autour d’un refrain réussi, elle brille surtout par son intermède atmosphérique voire psychotique aux effluves post-core savoureuses. Hacride n’a pas lésiné sur les moyens car il use et abuse de son talent pour jouer avec ses atmosphères comme en témoignent à la fois « Awakening » – dont les deux premières minutes sont d’un calme olympien – et « A World Of Lies » très progressive au passage central une nouvelle fois superbe. Mention spéciale à l’instrumental « Phenomenon » absolument magnifique et lorgnant sans vergogne sur les terres d’un Cult Of Luna voire même Neurosis. La chanson finale, « My Enemy » clôt excellemment l’album par un véritable moment de grâce où le chant, les mélodies, les claviers parfois très « cyber » dans leur utilisation peignent une ambiance juste incroyable.

Certes le groupe joue moins la carte de la technique qu’auparavant mais il gagne grâce à cela en feeling, en émotion et se permet, paradoxalement, plus de liberté rythmique. Le jeu n’est plus exclusivement extrême et s’autorise à visiter d’autres styles du death, au post –hardcore pour même chatouiller un feeling très rock. Il semble que « honnêteté » soit l’un des mots d’ordre de cet album. Outre le jeu très humain des différents musiciens, c’est la production qui impressionne. C’est avec un son à la fois ample et organique, qui évite toute surproduction, et privilégie cette sensation authentique de vraiment écouter de la musique, que « Lazarus » étale sa richesse. Richesse tout d’abord musicale, c’est évident, trivial, voire tautomérique parlant d’Hacride… mélodies, atmosphères, composition, émotion, soli, riffing… Il n’y a aucune zone d’ombre, tout est réussi et tutoie la perfection. « Lazarus » doit également beaucoup à son vocaliste Samuel Bourreau en tout point impérial. Avec son chant crié absolument génial, il illumine chacune des compositions. Mais plus que ça, Hacride a fait le pari risqué d’introduire beaucoup de chant clair dans chacune des compositions, chose qu’il n’avait jamais faite auparavant. Le résultat est incroyable et ce chant à la fois doux, mélodieux, parfois fragile contribue énormément à la crédibilité et à la qualité des ambiances.

« Lazarus » est un énorme coup de cœur et confirme tout le potentiel des poitevins. Hacride tient là un album quasiment parfait qui saura faire fondre les amateurs d’ambiances, de musiques très progressives et extrêmes. Un album très intelligent, incroyablement bien écrit, maîtrisé, immersif, une œuvre au sens large. En bref, l’un des albums de l’année et une note qui pourrait être arrondie à la note maximale d’ici quelques mois.

…TeRyX…

0 Comments 31 mai 2009
Whysy

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