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Les germanorvégiens avaient promis du changement pour leur nouvel album Meredead. Le son du groupe était pourtant arrivé à un certain rythme de croisière : des orchestrations et des choeurs le tout sur fond de beauty and the beast, avec, sur certaines ballades, quelques instruments et atmosphères plus folk. L'album Njord n'avait pourtant pas fait l'unanimité parmi les fans, dont certains préféraient Vinland Saga, qui misait plutôt sur les ambiances que sur l'efficacité et les orchestrations.  Ce nouvel opus devrait être rapporté à l’un et à l’autre (j’oublie volontairement le très dispensable Lovelorn). On y retrouve effectivement la force des orchestrations de Njord, et une cohérence très forte en termes d’ambiance, comme dans Vinland Saga. Mais les similitudes s’arrêtent là. Leaves’ Eyes est allé très loin dans le changement :  - Alexander Krull n’y occupe plus qu’une place de figurant. Non pas qu’il ait un premier rôle dans les précédents albums, mais son rôle se limite ici à deux pistes seulement (Empty Horizon et Sigrlinn) - D’autres vocalistes font leur apparition : la soprane Maite Itoiz et son comparse John Kelly du groupe basque-celtique Elfenthal, et Carmen Elise Espanaes, la sœur de Liv Kristine, officiant dans le groupe Midnattsol. - Le genre de l’album se rapproche radicalement du folk metal. - La linéarité souvent reprochée à Njord n’est plus de mise.  Tous ces changements sont-ils une bonne chose ? La réponse sera un grand OUI.  Certains morceaux sont très efficaces, et accrochent l’oreille dès la première écoute ; c’est le cas de Velvet Heart par exemple, à la construction couplet-refrain-couplet-refrain-solo-refrain, ou d’Étaín. Malgré leur simplicité relative, ces deux chansons portent une certaine force, due pour une part aux instruments folk, et aux chœurs. Étaín est par ailleurs le premier duo de l’album, avec Maïte Itoiz dont la voix se couple bien à celle de Liv Kristine, en lui apportant de la profondeur. C’est finalement le cas du titre choisi pour le tournage d’un clip : la reprise de Mike Oldfield, To France. La mélodie reste effectivement bien en tête, et les instruments folk, cornemuse, binious et autres violons lui donnent une dimension intéressante. Le morceau est malgré tout un cran au dessous du reste de l’album (sauf de l’ennuyeuse ballade Mine Tåror er ei Grimme et de l’intermède nanananesque Veritas).  La plupart des pistes sont bien plus complexes. Le groupe a en effet multiplié les prises de risques. L’exemple le plus flagrant est celui de Nystev, qui commence sur des riffs lourds, continue sur la voix de Liv (qui explore des lignes de chant très folk, suivie par sa sœur Carmen, à la voix plus chaude), assume un intermède calme avant de repartir sur un passage très rapide et celtique, pour finir sur des chœurs masculins et féminins. Le morceau, très rythmé, est soutenu tout du long par des riffs efficaces. Au contraire, si on retrouve le duo et l’atmosphère sur Kråkevisa, où la batterie est plus en retrait, pour donner le rythme des passages au violon ou a capella ; l’ambiance est plus à la gigue qu’au headbang.  Meredead rejoint l'ensemble des morceaux aux structures surprenantes : deux voix (celles de Liv Kristine et de Maite Itoiz) des chœurs y compris masculins, des guitares acoustiques, un solo solide reprenant la mélodie du refrain ... La cohérence y est pourtant plus forte que sur Nystev et Kråkevisa, et on entend vraiment le chant captivant des sirènes. Les pistes Empty Horizon et Tell-Tale Eyes elles, voient l’apparition de voix masculines claires, qui apportent un contraste intéressant, quoi que peut-être sous exploité. Alexander Krull accompagne sa femme sur Empty Horizon, pour une piste en mid-tempo qui surprend moins, et John Kelly pose son chant sur la très jolie Tell-Tale Eyes pour un duo acoustique romantique avec Liv Kristine, dans la veine de the Islander, de Nightwish : flute, guitare sèche et voix doucement entremêlées. Un bon morceau pour conclure en douceur le voyage entamé avec les pistes précédentes.  J’ai gardé le meilleur pour la fin. Plus c’est long, plus c’est bon. Je range mon dictionnaire de proverbes cheap pour parler de Spirit’s Masquerade, et de Sigrlinn, les deux pistes pivôt de Meredead. La piste d’ouverture donne le ton de l’album, pleine d’instruments traditionnels, et de ruptures de rythme, de chœurs, et de passages plus atmosphériques. Si elle est moins percutante que Njord, elle est très réussie dans son genre, avec une structure complètement imprévisible qui peut déstabiliser en tant que premier morceau.  Enfin Sigrlinn, vrai morceau de bravoure de près de neuf minutes, compile toutes les qualités de Leaves’ Eyes. C’est la seule piste où Krull pousse des hurlements, et il le fait plutôt bien, apportant un vrai contraste avec le reste de l’album. Les guitares alternent entre passages rythmiques et passages plus lourds, les chœurs sont tantôt atmosphériques, tantôt épiques, et les voix de Carmen et Liv Kristine portent à bout de bras la mélodie, jusqu’à donner des frissons lors d’un passage chuchoté.  Cet album fait montre d’une grande maturité de la part du groupe, et si ses points faibles sont existants (un fin trop abrupte sur Velvet Heart ou Nystev, quelques longueurs sur Spirit’s Masquerade, un interlude dispensable, un tout peut-être trop contemplatif et complexe), ils ne gâchent pas ses grandes qualités. L’ensemble reste cohérent, malgré une grande diversité de structures, d’instruments, et de voix. Leaves’ Eyes nous emmène dans un voyage vers les contrées du grand nord, leurs paysages et les sentiments qu’elles inspirent (plutôt que sur les Vikings).

0 Comments 24 avril 2011
Whysy

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