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Premier album de ce très jeune groupe, composé de très jeunes membres, Phases est un intéressant recueil de lieux communs prog déclinés parfois habilement, parfois d'une manière plutôt maladroite.

Il est aussi le symbole de ce qu'est devenu l'industrie musicale aujourd'hui, et surtout, j'ose les pieds dans le plat, des bienfaits de son écroulement. Car mettons-nous d'accord, jusqu'à la fin des années 90 cet album n'aurait sûrement jamais vu le jour. Ou alors il serait totalement passé inaperçu. Soutenu par White Knight Records, petite boîte qui a également signé Glass Hammer, l'album n'est pas vraiment bien enregistré, ni toujours parfaitement interprété. Et les morceaux, j'avais commencé avec cela, sont autant de poncifs du genre, de Dream Theater à Camel en passant par Pink Floyd et Porcupine Tree.

Et pourtant il se dégage de ce premier album d'Eden Shadow une vraie fraîcheur, une candeur réjouissante, une évidente envie de bien faire. Déjà les mecs sont tous nés en 92. Ce qui n'est pas un exploit en soi, on s'entend, mais quand même, ils ont du mérite. Et puis, on s'habitue même au timbre difficile de Ryan Elliott, chanteur-guitariste du groupe, qui chante un peu trop souvent faux pour dire vrai. Oui je sais, ça commence à faire beaucoup, mais écoutez, faites un petit effort et vous verrez que passés les First Phase et Restlessness mous et mal produits, on tombe sur un petit bijou nineties avec cet excellent Hallucinogen. Là, soudain, enfin des ambiances, enfin un peu de neurones. Et ça fait la différence de suite, le bond qualitatif est impressionnant. Et on se rend compte que Ryan est super bon, à la guitare j'entends hein, mais cette maîtrise est assez impressionnante même si du coup on perd un tout petit peu le côté fraîcheur, pour se rapprocher dangereusement du côté kéké. Mais tant qu'on reste dans l'équilibre c'est parfait. cet instrumental de dix minutes s'écoute facilement, et nous laisse enfin découvrir les talents des deux autres loulous, Alex Broben (basse) et Tom Burgess (batterie).

Malheureusement, difficile pour moi d'occulter la voix très mal placée de Ryan sur Hope You're Happy, pourtant une très belle ballade. Et c'est bien dommage qu'il la massacre ainsi, j'ai même parfois l'impression d'écouter une vidéo d'Antoine Daniel, c'est dire. Mes chers amis d'Eden Shadow, j'ai bien kiffé votre album, je l'ai même acheté, mais bordel trouvez-vous un chanteur ! C'est pas du punk que vous jouez, des harmonies vocales ça nécessite plus qu'un minimum de justesse technique, ça ne tolère aucun à peu près ! Bref, l'album poursuit ainsi son petit bonhomme de chemin, alternant le moins bon (Imagination), la surprise (The Stars Unfold, où Ryan chante... juste, et c'est même beau), et l'épique (avec le superbe Elgon). On finira ce premier opus par un pillage éhonté de l’œuvre de Joe Satriani avec le soporifique True Grace.

Revenons à nos moutons. Un producteur écoutant cet album en 95 l'aurait sûrement jeté à la poubelle, et ça aurait été franchement dommage ! Car les trois gamins d'Eden Shadow sont pétris de talent et c'est un vrai plaisir de les écouter malgré leurs défauts. Il ne leur manque plus qu'un Pygmalion, un mécène, quelqu'un qui saura leur donner confiance et les autorisera à se lancer sur des sentiers moins battus. Et qui pourra aussi leur offrir des conditions d'enregistrement de qualité, et qui saura leur donner de précieuses indications sur ce qui fonctionne ou pas. Et qui pourra enfin leur dire qu'un chanteur professionnel, c'est quand même pas du luxe. J'espère donc que grâce à la mise en lumière de sites et internautes comme notre bon vieux Heavylaw (oui oui, parfois c'est heavy, et y a quelques bonnes mélodies), les jeunes d'Eden Shadow pourront donner la pleine mesure de leur talent dans un prochain album mieux produit. Une affaire à suivre de très près.

0 Comments 04 mai 2014
Whysy

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