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Le XVIIIème, siècle de la raison, a sans doute offert à l’Europe et la future Amérique son substrat intellectuel ouvrant ainsi une ère de rationalisme qui semble ne plus s’arrêter même si des formes de contre-cultures (nouvelles formes de spiritualités ou de philosophies), tendant à un réenchantement du monde, s’installent et fleurissent dans cette Europe « raisonnée » du XXIème siècle.
C’est donc une réalité austère et aseptisée des langages symboliques et fantastiques qui semble s’être érigée en norme sociale pour ces sociétés dites « industrielles ». Les formes de spiritualité qui s’opposent avec vigueur à ce mouvement semblent lutter contre une idolâtrie du billet, et d’un matérialisme maladif généré par la société de consommation.

C’est un peu ce paradigme (représentation du monde) que Scarsick problématise et choisit comme colonne vertébrale. Le nouvel album de Pain Of Salvation est engagé et dénonce les paradoxes de ce monde « raisonné » et pourtant plein d’injustices, ainsi que les travers des hommes. Voilà ce que Daniel a bien voulu confier à Heavylaw dans l’interview réalisée par Cliff :
Scarsick est la suite de The Perfect Element Part 1, on suivait un personnage dans la première partie, on traitait de sujets sociaux au niveau de l’individu, au travers de la vision de ce personnage justement. Là, on parle globalement des mêmes thèmes, mais disons qu’on a changé de niveau, ce personnage s’interroge non plus seulement sur lui-même, sur toutes les choses qu’il a subies, sur les désillusions qu’il a vécues, mais sur les grandes questions que tout le monde peut se poser, il voit et étudie la société, notamment au travers de la télévision, et c’est un peu ce que tout le monde fait à l’heure actuelle. On vit souvent à travers la télévision. Donc là on suit cet homme pendant tout l'album, pendant toute son exploration de la société dans laquelle il vit.

Les paroles de Pain Of Salvation sont comme toujours très à propos et ne versent guère dans la fantaisie. Clef de voûte d’un édifice aux multiples secrets, les paroles confèrent une dimension supplémentaire et complémentaire à la musique. Elles sont interprétées de manière très variée, allant d’un chant rap comme sur Scarsick ou Spitfall exacerbant les frustrations, un chant classique modulable quasiment à volonté, les graves, les aigus, tous y passent. Il y a quelques cris dignes d’un album de black comme sur Flame To The Moth où Daniel semble vomir sa rage par ces hurlements criant de sincérité.
Musicalement le groupe prend des risques, avec des chansons assez atypiques dans l’ensemble et en particulier America, véritable pied de nez, déguisé de cynisme, au pays de l’oncle Sam avec une sorte de mix guitar punk, banjo, Disco Queen imparable en live, déroutante et irrémédiablement trippante avec son refrain entêtant.
Si l’on devait inventer une nouvelle étiquette pour Pain Of Salvation ça donnerait peut-être quelque chose comme Intellectual Metal en vertu de la complexité de la musique et de la richesse des concepts, l’inverse ne serait pas non plus usurpé; ou bien du Emotive Metal. Et oui, cette dimension reste très prégnante dans les œuvres du groupe et Scarsick ne déroge pas à la règle (cf. Cribcaged, Kingdom Of Loss, Idiocracy).
L’album bénéficie de ces phrases chocs, non dénuées de poésie, qui restent dans vos têtes, que ce soit le martelant « You’re just people », le “If you're tearing down my world, Please just try to do it gently, There is love inside, For a dream that has to die ” ou encore “ So close your eyes, Just take another deep breath now, And fantasize, Pretend the world we're forming, Is a paradise”.

Œuvre moralisante, dotée d’un regard noirci d’un profond réalisme et d’une pertinence peu commune dans son expression, Scarsick est un nouveau monument signé Pain of Salvation, difficile à apprivoiser, à cheval entre renouveau et continuité, et à la durée de vie incroyablement longue.

Dreamer

0 Comments 08 avril 2007
Whysy

Whysy

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