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Au début des années 90, le label LMP a les dents longues et signe une brochette de jeunes groupes, dont font partie Angra, Vanden Plas ou Eldritch. Progénitures hybrides heavy / prog, ils sont promis dans les rêves secrets de Limb Schnoor, boss de LMP, à devenir les nouveaux fleurons du heavy européen alors moribond. Chacun possède une vraie personnalité et insuffle effectivement du renouveau, montrant des chemins musicaux qu’emprunteront pas mal de groupes. Le trentenaire que je suis ne regrette pas d’être de cette génération qui a vécu ce tournant dans l’histoire du heavy métal. Autre risque pris par Limb Schnoor, Eldritch nous vient d’Italie, pays resté hermétique au hard rock dans les années 80.

Eldritch, qui tire son nom d’un morceau du groupe Watchtower, a vu le jour de l’association entre Terence Holler le chanteur italo-américain et Eugene Simone le guitariste et principal compositeur. Terence Holler n’est pas un chanteur aux capacités techniques vocales monstrueuses, il possède néanmoins un timbre particulier et surtout, il déchire sur le plan émotionnel. Il sait être rugueux et rageur, mais aussi plaintif et résigné. Sa voix spéciale peut être répulsive, mais pour peu qu’on la déchiffre, elle devient notre guide tout au long de cet album, même si l’on ne pipe rien à l’anglais. La portée des textes est toutefois à souligner, pas très optimistes, tout simplement le reflet du vécu et des pensées de leurs compositeurs.

Presque tous les morceaux sont structurés comme du prog, il serait plus juste de dire que certains sont déstructurés comme du prog, car vraiment alambiqués. Alors qu’habituellement je n’avais jamais pu déceler les soi-disant reliefs cachés dans les compositions progressives de Dream Theater (à croire que je n’écoutais pas la même musique que les chroniqueurs des magazines de l’époque), j’ai vraiment accroché à cet album. Ce disque allie technique et émotion, il s’en sort par une recherche mélodique constante. La finesse des compositions représente un travail d’orfèvre dont le but est de combler les attentes mélodieuses de l’auditeur. Chaque instrument apporte sa pierre à l’édifice, les intrusions de guitare sont des piqûres d’élixir de jouissance, le clavier passe de nappes flottantes à des gammes de piano de folie, la basse ose se faire entendre plus que de raison. Terence Holler n’a plus qu’à parachever l’œuvre, achevant l’auditeur par la même occasion. Impossible pour moi d’écouter le dernier titre blind promise sans l’accompagner, retenant mes larmes pour tenir les cinq minutes de ce joyau.

Eldritch c’est aussi un son, une marque de fabrique que l’on doit aux sonorités cosmiques du clavier, souvent à la limite de générer une distorsion spatio-temporelle prête à vous aspirer. Cet album m’a vraiment mis une claque, j’en ai encore la joue rouge 11 ans après. Ce Seeds Of Rage fait partie de ces albums qui ont déclenché ma passion pour le heavy métal et j’ai peut-être du mal à prendre du recul pour le juger. Je vous conseille quand même d’écouter the deaf and the blind, plutôt speed mélodique, et colors, plutôt prog, ces deux titres sont assez représentatifs pour vous en faire une idée. Seeds Of Rage, à l’image de son chanteur, on aime ou on déteste, mais on n’y reste pas insensible. Un jour un gars pas trop con a dit « la musique c’est du bruit qui pense », c’est en écoutant des disques comme celui-ci que j’en ai compris toute la signification.

Ce disque est ressorti l’année dernière en version remasterisée avec pléthore de bonus. Je ne possède pas cette nouvelle édition mais il paraît qu’elle rend les compositions réorchestrées encore plus incisives.

Chris

0 Comments 24 février 2007
Whysy

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