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Super Collider, nouvel album de Megadeth, le célèbre combo thrash fondé par Dave Mustaine après sa douloureuse éviction de Metallica, sonnerait comme du Cryptic Writings, ce qui serait plus ou moins un point négatif selon certains. Qu'est-ce que ça veut dire, et qu'en est-il vraiment ?  Entre 1997 et 1999, Mustaine donne à son groupe une inflexion bien éloignée des manifestes thrash des années 80 et 90. Pour beaucoup, c'est un foirage, et il est vrai que les deux albums en question (Cryptic Writings et Risk) semblent discutables au premier abord. Il me paraissait important de remettre un peu les pendules à l'heure : malgré ce que j'ai pu lire ici et là, oui, Mustaine est aussi bon quand il s'agit d'écrire des chansons heavy-rock que des riffs brutaux. Et si vous voulez mon avis, il est même meilleur. Parfois. De nos jours en tous cas, sachant qu'on aura plus rien d'aussi puissant que Hangar 18 ou Symphony Of Destruction, pourquoi pas espérer un Risk 2 ? Oui, j'aime les lynchages.  Voyez que déjà dans le superbe Youthanasia, bien qu'un peu lourd, Dave nous montre qu'il est capable d'adoucir son propos sans l'édulcorer. Il va persévérer, voire même, pourrait-on dire, pousser le bouchon encore plus loin avec Cryptic Writings, paru en juin 1997. Album varié et complet, on y trouve la bande originale, ainsi que du sitar, des cordes, de l'harmonica, des mélodies presque pop et des morceaux plus speed et bourrins, qui forment au final un album malheureusement hétérogène voire hétéroclite. Dave a le cul entre deux chaises, ça se sent sur tout l'album et c'est bien dommage. Lorsqu'il se lâche complètement et bascule dans le rock alternatif (les fantastiques Trust, Almost Honest et Use The Man), le résultat est assez ébouriffant de classe et de maîtrise. On apprend que Dave sait chanter, que Friedman sait se montrer parcimonieux lorsque le morceau l'exige, et on découvre avec joie que Megadeth sait manier autre chose que le kikimeter.  Parce que c'était ça le problème de Megadeth jusque là, ou du moins ça ne l'était pas plus vraiment mais c'était sa caractéristique majeure qui allait plus tard redevenir un gros problème. Je m'explique. Le gang avait alors une forte tendance à jouer à « Qui a la plus grosse ? » avec Metallica, et bien mal leur en prenait d'ailleurs, tant il paraît difficile à un Peace Sells de se mesurer au Master Of Puppets paru la même année (1986). Une fois que le groupe avait trouvé sa voie, sur Rust In Peace et Countdown To Exctinction, ce complexe d'infériorité semblait nettement moins problématique, surtout que l'apogée de Megadeth intervenait au moment où Metallica entamait la pente descendante. Ainsi, Cryptic s'annonce presque volontairement comme ce que Load aurait dû être, si les Californiens ne s'étaient pas mis à bander plus haut que leur nez. Du moins c'est ce genre d'argument qui a dû permettre à Dave d'auto-justifier sa démarche limite auto-destructrice.  Et malheureusement c'est là que le bât blesse, car malgré son talent évident Mustaine n'a jamais eu l'écriture aussi foudroyante que le combo Ulrich-Hetfield, et Megadeth n'a jamais eu la force de frappe de Metallica. Volontairement ou involontairement, je n'en sais rien, Dave décide donc d'aller encore plus loin et d'afficher ouvertement la couleur avec le bien-nommé Risk, paru en août 1999. A mon avis, hormis quelques rares mauvais choix (Crush'em), Risk est l'album de heavy-rock alternatif parfait, typiquement années 90, et il est blindé de pépites : Prince of Darkness, Breadline, le dyptique Time, The Doctor is Calling, I'll Be There, et le sublime Ecstasy, pour ne citer qu'eux, excusez du peu. La maîtrise mélodique de Mustaine et Friedman est proprement ahurissante, même si évidemment, l'album est loin d'avoir la puissance d'antan. C'est l'album de voyage parfait, et l'opus idéal pour introduire des oreilles chastes à des ambiances métalliques : moins bourrin et plus mélodique que le Black Album ou Somewhere In Time (je prends deux classiques au hasard), il est superbement interprété et produit.  Malheureusement, comme le dit Dave lui-même, il porte le nom de Megadeth, et de par ce fait va subir le même sort que St Anger quatre ans plus tard : l'aura du groupe et son histoire précédente desservent l'album, et les fans déçus le boudent en masse. C'est donc logiquement que Mustaine va se replonger dans le heavy-thrash qui a fait son succès avec les quatre opus qui vont suivre, mais sans la réussite de Rust et Countdown, ce qui nous amène à 2013 et Super Collider. On a donc déjà pas mal comparé cet album à Cryptic Writings, et il est vrai qu'il en possède la caractéristique majeure : il est mal équilibré, mal ambiancé, malgré la grande qualité des morceaux et l'excellente production tripartite signée Dave, Cameron Webb (Motörhead) et Johnny K (Machine Head). A la différence de United Abominations, Endgame et Th1rt3en, il ne contient aucune purge, hormis peut-être Don't turn your back on friends, plutôt dispensable à mon avis. Mais d'une manière générale, on oscille entre le bon et le très bon, entre le morceau pêchu, accrocheur et direct et la tentative plus ou moins réussie de refaire des bonnes mélodies borderline FM.  Sans aller jusqu'à nous refaire le coup du Risk, Mustaine a tout de même sérieusement mis de l'eau dans son vin, et Super Collider est moins brutal que ses prédécesseurs. On y entend du heavy-thrash agressif (Kingmaker, Burn!, Built For War), en somme la première partie de l'album hormis le single éponyme, pour le coup sorti tout droit de Cryptic et un tantinet mollasson. Dès Off The Edge, la présence d'un break mélodique taillé pour le live nous indique qu'il ne s'agit pas d'un Endgame bis, ce qui est plutôt une bonne nouvelle. Dont acte, puisque les morceaux suivants, jusqu'à la fantastique reprise de Thin Lizzy (Cold Sweat) qui clôt l'album sur une note plus speed (avec notamment un solo de guedin de Chris Broderick, parfait sur tout l'album), sont franchement mélodiques, plus épiques et construits. Je pense notamment aux superbes et presque progressifs Dance In The Rain et Beginning Of Sorrow (dont l'enchaînement de structures peut évoquer par moments The World Needs A Hero, pour mon plus grand plaisir), à Forget To Remember que j'adore (très AOR et dont le break m'évoque délicieusement World Needs A Hero, tiens, encore), ainsi qu'au sympathique banjo de The Blackest Crow.  Mais voilà, le mot est lâché, le problème nous apparaît clair à présent, Megadeth est devenu un groupe sympathique, grâce à cet album sympathique et à ses chansons sympathiques. J'ai attendu dès ma première écoute un brûlot de la trempe de Public Enemy n°1 ou Guns, Drugs & Money, ou alors une splendeur du calibre de Breadline ou Ecstasy, et bien mal m'en a pris puisque j'ai été déçu.  C'est peut-être ça le souci, c'est que j'espérais ne pas l'être malgré mes attentes, ce qui était assez naïf : Dave aura 52 ans en septembre et ses meilleures années semblent derrière lui, il n'a plus Friedman à ses côtés, bref, faut que j'arrête d'attendre la lune à chaque nouvel album de Megadeth ou Iced Earth. Je me suis fait une raison pour Iron Maiden je peux le refaire, il est temps que la bande à Dave entre à son tour dans la catégorie des artistes dont on n'attend plus rien de génial et bouleversant, mais plutôt dont on sait que ce sera du bon qu'on aime et qu'on connaît bien. C'est presque mieux, moins risqué. Sincèrement, vous attendez le prochain Maiden avec une impatience folle ? Bien sûr que non. Par contre, vous allez le kiffer quoi qu'il en soit, parce que c'est eux, parce que c'est nous, parce qu'on les aime et qu'ils nous le rendent bien. Eh ben moi c'est pareil.  En conclusion, mon cher Dave, si jamais tu devais apprendre le français (et pas juste le baragouiner comme chacun le sait) et lire cet article, je ne sais pas laquelle de ces deux suppositions est la plus improbable, bref, Dave, continue comme ça, on t'aime, ne t'arrête pas d'écrire de bons morceaux, et puis bordel pourquoi pas une tournée anniversaire Risk en 2019 ?? J'suis super chaud moi, on peut toujours rêver, we live in a world of fantasy, allez Dave fais pas l'con !

0 Comments 23 juin 2013
Whysy

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