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En 2006, après avoir mis un terme à ses précédents groupes Emperor et Peccatum, le très actif Vegard Sverre Tveitan, alias Ihsahn, se lance enfin en solo, officiellement, avec ce superbe album, The Adversary.

Celui-ci marque une rupture assez nette avec le dernier opus d'Emperor, Prometheus : The Discipline Of Fire and Demise. Pas vraiment dans le son, ni dans les techniques utilisées, mais bien dans la variété des ambiances. On retrouve, bien sûr, la furia habituelle au maestro norvégien sur certains de morceaux, mais beaucoup sont plus lents, plus calmes, d'une manière assez inhabituelle. On pourrait dire, si j'avais envie de blaguer un peu, que sur des pièces majestueuses comme The Pain Is Still Mine, Ihsahn crée une sorte de black/prog/mélo, et même que sur d'autres ils propose des refrains bien plus accrocheurs et presque pop, un peu à la manière d'un Mercyful Fate, dont on se rappelle qu'Emperor avait emprunté le mirifique Gypsy pour un bonus track de In The Nightside Eclipse.

Ce qui me frappe en réécoutant l'album pour les besoin de cette chronique, c'est effectivement la variété des ambiances, mais surtout la facilité avec laquelle il semble dérouler les plans et les riffs, qui sonnent mieux que jamais et aussi percutants que du Keith Richards. Panem et Circenses ou encore Citizen semblent bien loin des performances maïeuticiennes présentes sur After et Eremita. Le concept de The Adversary se résume à une idée simple : j'envoie la sauce, je configure quelques structures efficaces et pas trop alambiquées, et puis je chante, je crie, des fois je chante en criant, je fais des solos lumineux, je lâche des riffs dévastateurs.

Simple. Trop simple ? Oui, bien sûr. Vous constaterez que ce mot ne fais pas partie du vocabulaire Ihsahnesque. Prenons Called By The Fire, de toute la carrière de compositeur d'Ihsahn le morceau qui se rapproche le plus d'un single commercial. Riff qui pète, refrain mélodique, simple et facile, quelques cris pour parfaire l'ambiance, sauf lorsque l'on y regarde de plus près, c'est beaucoup plus compliqué que ça en a l'air. Déjà il faut signaler, pour les plus malheureux d'entre vous qui ne le savaient pas encore, que le batteur, Asgeir Mickelson, est un dieu vivant. Une sorte d'hybride entre Stewart Copeland et Simon Phillips version black metal. Fin, ultra-rapide, précis et zélé, le mec vous prend à la gorge dès le premier break ahurissant, du grand art. Mais surtout, à l'écoute de ce superbe morceau, on se rend compte que les structures s'enchaînent avec douceur sous la dextérité du maître, et sans que cela soit trop, sans qu'on ait l'impression d'assister à une master-class, elles sont variées, techniques, alternant les tempos, les humeurs, les formes de chant/cri, jusqu'au refrain agrémenté de cordes légèrement cheap.

Tout est bon dans ce morceau, tout est bon dans cet album, mais il est tellement l'anti-Prometheus qu'on se surprend à regretter la noirceur glauque des efforts précédents. Du moins, en ce qui me concerne, étant un fan hardcore du norvégien. Pour les moins initiés, The Adversary constitue un avant-propos idéal à la carrière d'Ihsahn. Un album cross-over, alternant, parfois au sein d'un même morceau, les moments de grande violence et de pureté apaisée (Citizen, le chef d'oeuvre dont la construction me fait agréablement penser au mythique I Am The Black Wizards).

Les die-hards se verront récompensés par les trois albums suivants, dont la complexité et l'esprit aventureux iront grandissants, jusqu'à l'ultime apex du black avant-garde progressif et torturé à ce jour, Eremita. En attendant l'album suivant.

0 Comments 28 mai 2012
Whysy

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