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En quelques années et seulement deux albums, Epica est parvenu à se forger un nom sur la scène encombrée du Metal gothico-symphonique à chant féminin. Le talent, le charisme et la beauté de sa chanteuse, la séduisante Simone Simons, les qualités de compositeur de Mark Jansen, leader de la formation, les nombreuses tournées du groupe, et des compositions à la fois accessibles, accrocheuses et relativement fouillées, ont assuré au groupe une très bonne cote de popularité. Ce n’est donc pas pour rien si « The Divine Conspiracy », le nouvel album de la formation hollandaise, s’avère l’une des galettes les plus attendues de cette cuvée 2007, jusqu’ici particulièrement bien fournie.


Petit changement au niveau du line-up : le batteur Jeroen Simons, lassé de tourner, quitte le groupe juste avant la rentrée en studio. N’ayant pas le temps de trouver un batteur permanent pour l’enregistrement de l’album, Epica surprendra tout le monde en optant pour Arien Van Weesenbeek, le cogneur de God Dethroned… Un combo de Metal extrême, qui en dehors de sa nationalité, ne partage vraiment pas grand-chose avec la bande à Simone !

Ce changement aurait très bien pu être passé sous silence, si l’intégration de ce musicien de session (à ce jour, Epica n’a pas encore trouvé de remplaçant permanent) n’avait pas profondément influencé les rythmiques de ce « Divine Conspiracy », où Epica part une nouvelle fois en guerre contre les religions, avec un concept cependant moins inquisiteur et plus recherché que ne l’était celui du premier album. Quoiqu’il en soit, cette grande quête métaphysique semble la toile de fond parfaite pour cet opus, plus ambitieux et puissant que jamais.

Pour faire court, voici comment on pourrait résumer la carrière d’Epica : un premier album au charme typiquement gothique, un second plus heavy, et un troisième… plus extrême. Beaucoup de groupes dits « commerciaux » aiment rassurer leurs fans en promettant à chaque nouvelle sortie un retour des guitares et à plus de puissance ; et bien, autant le dire tout net, Epica ne bluffait pas.

Pourtant, le single « Never Enough » (morceau sympathique mais sans relief, où la présence de Sander d’After Forever en invité au chant extrême était fort discrète) n’avait pas rassuré les fans. Composé par le bassiste du groupe, il avait été mal accueilli sur scène, et ses mélodies évidentes et clichées avaient beaucoup indisposé le public Metal, qui craignait qu’Epica, déjà assez populaire, ne renonce à son intégrité pour adopter une dimension plus commerciale. La pochette aguicheuse n’avait pas non plus contribué à nous rassurer… Fort heureusement, il n’en est rien, le single n’étant pas du tout représentatif de la complexité de ce nouvel album, bien plus agressif qu’auparavant.

Toujours desservi par une production très claire et puissante, « The Divine Conspiracy » met l’accent sur les guitares, qui jusqu’ici servaient surtout d’appui, de base pour mieux permettre aux éléments symphoniques et à la voix de Simone de développer toute leur puissance. La formule était efficace, seulement, les lignes rythmiques manquaient de mordant et de créativité. Incontestablement, un grand pas a été franchi avec ce nouvel album, où le riffing est plus intéressant et inspiré que jamais auparavant. Nous avons même droit à une introduction acoustique sur la magnifique « Chasing the dragon », et à un solo typiquement heavy sur la très After Forever-like « Beyond belief ».

Ouvrant sur une introduction plus belle et épique que jamais (« Indigo », dont la montée orchestrale finale m’émeut aux larmes), la troupe hollandaise attaque ensuite très fort avec un « Obsessive Devotion » bien à l’image de l’album. Breaks incessants, rythmiques véloces et très hachées (le manque de fluidité est d’ailleurs le principal défaut de l’album ; si les enchaînements sont bien vigoureux, ils perturbent souvent l’auditeur), chant de Simone plus rock et agressif, chœurs grandioses, mélodies accrocheuses…Epica est bel et bien de retour ! Inutile de préciser que la performance de la belle rouquine est comme d’habitude irréprochable. On a même le sentiment qu’elle s’essaie à de nouveaux registres, ce qui lui va toujours très bien.

Epica a vraiment pris le contre pied de ce que les fans pouvaient légitimement attendre d’un troisième album. Même si le style du groupe se reconnaît de très loin (« Living a lie » et ses chœurs sublimes pourrait parfaitement être extraite de l’album précédent), je pense que cet album, tantôt plus black, tantôt plus progressif (les breaks sont proprement incroyables, variés, techniques et très surprenants) est très délicat à appréhender. Chaque composition est vraiment excellente (il n’y a que « Fools of damnation » que je juge en deçà des autres, car elle fait retomber la tension et l’attention), seulement l’ensemble s’avère assez indigeste. Jamais le groupe n’avait atteint de tels records de longueurs, et il est vraiment difficile d’absorber plus de 70 minutes de Metal symphonique aussi dense et chargé. La présence d’un petit intermède instrumental en milieu d’album est très bienvenue, tout simplement pour faire respirer l’auditeur.

La plus grosse surprise provient du partage des voix. Alors que Mark s’était montré relativement timide sur l’album précédent (où son timbre revanchard n’était audible que sur trois morceaux), il intervient ici sur 8 morceaux sur 13, ce qui rend le partage des chants presque parfaitement équitable ! Il assure même l’essentiel sur la lourde et puissante « Menace of vanity », au riff plus complexe qu’à l’accoutumée, qui devrait faire un malheur en live. Passant toujours d’un registre à l’autre avec brio (du black criard au death profond et guttural), sa performance est aussi excellente qu’à l’accoutumée. Les seuls moments où il cesse de gronder sont très apaisants, comme sur la très jolie ballade « Safeguard to Paradise », délicate à souhait, avec une montée en puissance finale des plus émouvantes, et sur l’excellente « Sancta Terra », qui voit Epica aborder une fibre épique qui lui convient à merveille. Ces deux morceaux, qui s’enchaînent ensuite avec le monstre éponyme de 15 minutes, comptent d’ailleurs parmi les meilleurs moments de l’album.

Le titre éponyme, justement, parlons-en. Epica avait toujours l’habitude de conclure ses albums sur un morceau plus long et très orchestral qui constituait le point d’orgue, le moment le plus fort de l’album. Hors ici, je serais légèrement moins enthousiaste que d’habitude. Même si les mélodies sont accrocheuses à souhait et les éléments orchestraux plus forts que jamais (la résonance des cuivres, la virtuosité des cordes, la pureté des chœurs, tout y est), cela ne méritait pas un traitement si long, et on ne peut éviter l’écueil de la lassitude, ce qui est fort regrettable étant donné le niveau de l’ensemble. Quoiqu’il en soit, je ne doute pas que les fans sauront apprécier cette grandiose pièce symphonique à sa juste valeur. Le refrain est proprement inoubliable !


En bref, voici un album bourré jusqu’à la gueule d’excellents titres, inspirés et majestueux. Le groupe n’a pas choisi la voix de la facilité et a réussi le pari osé de rester fidèle à lui-même tout en évoluant dans le bon sens. Malheureusement, je ne me fais pas d’illusions, je pense que cet album sera moins bien accueilli que les précédents, car Epica reste Epica, avec son apanage orchestral un peu pompeux, et qu’il est moins séduisant qu’auparavant, se montrant sous des aspects plus complexes et agressifs. En tout cas, même si les premières écoutes vous déboussolent, laissez votre chance à cet opus, qui est bardé de compositions superbes et prenantes, épiques à souhait (« Obsessive Devotion », « Chasing the dragon », « Living a lie »…) qui se classe à l’évidence pour moi dans les toutes meilleures sorties de l’année.



Gounouman

0 Comments 09 septembre 2007
Whysy

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