Vous recherchez quelque chose ?

Le monde du métal compte des albums dont on pourrait parler durant de longues pages, les disséquer en différentes études, avec chacun des aspects instrumentaux, les paroles, la production, les musiciens, l’histoire du groupe… Mais, pour parler d’Ayreon, il faut aussi parler du concept, de l’histoire, que le ménestrel du vingtième siècle qu’est Arjen Lucassen a conçu. Cet hollandais, multi-instrumentiste commence, en 1995, une longue série d’opéras rock, tant et si bien qu’on lui attribuera le doux surnom de « monsieur métal opéra ». The Final Experiment est le premier de cette série, à la base cet album s’appelait Ayreon : The Final Experiment puisqu’il ne s’agissait que d’un projet parallèle au travail de Lucassen dans le groupe Vengeance mais au fil du temps ce projet prit de l’importance et prit le nom de Ayreon.  Par le biais du concept de The Final Experiment Lucassen laisse exprimer son goût pour la science fiction dans une pièce d’une durée de 1H11. En effet, le concept mêle curieusement Moyen Age et société futuriste. Entrée en matière, une voix grave, nous disant que nous sommes en 2084 après Jésus Christ et que la race humaine est vouée à disparaitre à cause de sa négligence. Pour sauver le monde, les hommes ont élaboré un projet du nom de The Final Experiment. Il s’agit d’une machine qui envoie des visions du monde actuel dans le passé sous forme de message télépathique. Ces messages traversent le temps et viennent envahir l’esprit d’un ménestrel anglais aveugle vivant au VIème siècle et portant le nom de Ayreon. La musique de The Final Experiment a donc pour but de retranscrire les émotions et les aventures de ce ménestrel. N’ayant jamais rien vu du monde, il se met un beau jour à voir et se questionne donc sur la véracité de ces visions. Sont-elles pure imagination ou réelles ? Dès lors, il fait part de ses visions, tel un prophète, à son entourage. Les villageois, à l’écoute des sombres prédictions de Ayreon, le bannissent du village. Il se réfugiera à la cour du roi Arthur où il deviendra un ménestrel reconnu. Toutefois ses qualités divinatoires vont attirer sur lui les foudres du grand Merlin qui voit en lui un charlatan qu’il faut réduire au silence. Pour remédier à cela Merlin lui jettera un sort, avant de recevoir une vision lui signifiant son erreur. Une voix retentit et nous annonce que ces visions seront transmises à nouveau à un ménestrel du 20ème siècle, ménestrel qui n’est autre qu’Arjen Lucassen qui nous révèle ici sa préoccupation sur le devenir de notre planète.  Il est important de préciser que ce qu’a fait Arjen est précurseur. Il débarque avec toute une troupe de chanteurs et nous constitue un véritable opéra avec ses drames, ses musiques triomphales… Cependant, comme tout travail précurseur celui-ci aura du mal à se faire reconnaitre auprès des labels. Aujourd’hui Arjen leur fait un pied de nez en rééditant cet album avec quelques réponses que les labels avaient pu lui rendre à l’époque. La musique mêle tout comme son concept des sonorités médiévales, produites par des instruments comme le clavecin, la guitare classique, ou encore des cuivres, et moderne voire futuriste à l’aide de sonorités électroniques émanant du clavier. Il est difficile de mentionner tous les instruments car beaucoup restent en fond et contribuent à instaurer des ambiances, planter le décor en quelque sorte. Arjen réussit le pari fou de composer une musique corroborant parfaitement les émotions de ses personnages et les péripéties de leur histoire. L’album se révèle varié, en effet, on passe sans encombre de ballade émouvante comme Ye Courtyard Minstrel Boy avec son clavecin et ses multiples voix aux cuivres de la triomphale Sail Away To Avalon contant la quête du Saint Graal par les preux chevaliers de la table ronde. La musique traduit aussi les réflexions du personnage soit dans des atmosphères posées comme Nature’s Dance, avec ses chants d’oiseaux discrets, principalement emmenés par la guitare et le chant de Arjen Lucassen (dur de repérer toutes les voix), mais encore Eyes Of Time où Ayreon reçoit ses premières visions. L’opéra métal ici délivré nous fait profiter de qualités qu’un simple groupe ne pourrait pas fournir, soit une parfaite conjugaison entre ambiances orchestrales et dialogues théâtraux entre les personnages, le meilleur exemple restant le dialogue final, Ayreon’s Fate, où s’expriment Merlin et Ayreon.  Même si les mélodies délivrées sont la plupart du temps très lumineuses, elles versent de temps en temps dans des tons plus obscurs pour traiter du tragique devenir humain. Listen To The Waves en est un bon exemple avec son ambiance froide, pesante et électronique. Cette chanson incarne à merveille la vision effrayante et apocalyptique que Ayreon reçoit. Il est impératif de faire remarquer le talent de Lucassen dans la conception de mélodies toujours poignantes et en phase avec le concept, mais ce n’est pas tout, en effet, le bougre peut également se targuer d’avoir su composer une musique originale. Plus généralement, la musique de The Final Experiment reste très portée sur les ambiances et délaisse les aspects heavy du métal, avec les grosses distorsions et les batteries omniprésentes, au profit d’une musique épurée laissant s’envoler les notes et retentir dans nos oreilles. De ce choix résulte une absence de tempo speed. Vous me direz mais ce n’est pas du heavy ni du speed, c’est normal Ayreon est classé métal progressif. Certes, la musique de Ayreon inclut une dimension progressive au premier sens du terme, soit une progression des ambiances, mais cela se fait naturellement, comment ne pas créer un opéra non progressif, pas évident du moment qu’il y a un concept et une histoire on ne peut pas se résoudre à s’enfermer dans un registre non progressif. Si la musique d’Ayreon est en ce sens progressive, elle ne l’est pas au même titre que les groupes du genre qui recueillent, notamment cet aspect, mais, aussi d’autres comme les rythmiques complexes et saccadés.  Point de départ d’une longue série de métal opéras, The Final Experiment fait acte des talents de compositeur d’Arjen Lucassen, de son bon goût puisque chacun des chanteurs sélectionnés sont irréprochables. Cette première œuvre d’Ayreon témoigne d’une finesse musicale, par ses mélodies et ambiances, et littéraire par ses paroles loin d’être pauvres. Cet album ne manquera pas d’en émerveiller plus d’un, bien sûr il n’arrivera pas à convaincre tout le monde car le son de The Final Experiment est particulier et original et ne met pas tout le monde d’accord. On perd, ici, un peu le côté puissant et percutant du métal pour accroitre sa portée mélodique et en évitant de recouvrir les décors par un flot de distorsion ou même d’orchestrations car si celles-ci restent présentes c’est toujours avec mesure et sagesse. Avec ce genre d’œuvre les livrets contenant les paroles prennent davantage d’importance et l’on prend plaisir à suivre à la fois des yeux et des oreilles.  PS : La réédition de The Final Experiment, qui a eu lieu en 2005, contient un deuxième cd où figurent des versions semi acoustiques de certains titres. Je vous conseille également de vous rendre sur le site de Arjen Lucassen qui est très bien fait et recelle de nombreuses informations.  Dreamer

0 Comments 22 juin 2006
Whysy

Whysy

Read more posts by this author.

 
Comments powered by Disqus