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Plus on est de fou, plus on rit. C’est avec cette courte maxime que j’ai envie de démarrer cette fabuleuse péripétie qu’a été l’écriture de cette chronique. Quand on aborde un album, il est difficile de pouvoir rester pertinent tout en essayant de ne pas se répéter et en évitant les portages d’un autre. Et croyez-moi lorsqu’on approche un double album, la tache prend l’ampleur d’un des travaux d’Hercule.... Comment empoigner ce chef d’oeuvre de death mélodique sans sombrer dans la plus commune des banalités ? Quel angle sera le plus judicieux pour rendre hommage au travail effectué ? C’est vrai que finalement tout un tas de questions se pose, le but étant de mettre en lumière le talent, le génie et la virtuosité des musiciens.  Si Soilwork devait sa renommée à une période précise, on serait bien embêté de pouvoir répondre à cette question, parce que sur toute sa carrière, le groupe a évolué en dent de scie et pour une durée assez succincte. On ne peut pas parler d’une ère particulière dans laquelle on prendrait un opus des Suédois sans se tromper. Avec Soilwork, c’est toujours la loterie, si je tire au hasard cet album sera-t-il bon ? Heureusement, que nous sommes là pour aiguiller ! Si Natural Born Chaos fragmentait les cervelles à coups de mélodies efficaces, Stabbing The Drama s’écrasait lamentablement sur le bitume avec un flux musical d’une insignifiance affligeante. The Panic Broadcast parvenait par contre à sauver le navire presque échoué dans un naufrage artistique. Et changement de line up au niveau des guitaristes, David Andersson remplace Peter Wichers et s’en suit une période de composition de huit mois.  Et le résultat me direz-vous ? Absolument gigantesque ! Il faut avouer qu’on commençait à mouiller dans nos pantalons étant donné que le bilan pouvait s’avérer aussi daubesque qu’illuminé. En effet, on a eu une bonne pioche avec The Living Infinite. C’est plutôt agréable et une joie qu’il est important de savoir apprécier dès l’instant où la tendance de nos Suédois est calibrée sur l’effet de surprise. Quand Soilwork déçoit, c’est avec les grands moyens, mais lorsqu’ils ont décidé de se retirer les doigts du cul, le tableau est fabuleux. La magie dégouline par tous les pores de cet opus. Le groupe se pare d’un certain nombre de mélodies parfaitement mesurées pour déployer une musique de grande envergure teintée de feeling et d’un côté catchy assuré. La succession des morceaux s’écoule ainsi dans une limpidité sans commune mesure, « Let The First Wave Rise » sublime la structure musicale avec une constellation de riffs à haute teneur en fantaisie, « Tongue » assomme avec son refrain voluptueux et ultra efficace... Et il en va de même pour les autres titres. C’est vrai que si on apprécie les guitares avec The Living Infinite on est servi, alors l’exemple de « Realm Of the Wasted », mettra d’accord pour dire que la chanson fait la synthèse en boursouflant les lignes de cordes à grand renfort de leads et d’envolées (Sylvain Coudret et David Andersson).  Le style employé est particulièrement tenace, et s’accroche à l’esprit avec une fluidité et une simplicité effarante. Outre l’aspect musical et les perspectives techniques, on ne pourra pas passer à côté du côté plaisant de la musique des musiciens. Le chant de Björn revêt une apparence très séduisante, avec ses oscillations entre chants clairs et chants saturés, on bénéficie d’un double bonus. « Whispers And Lights » abreuve les lignes vocales de cette dualité nécessaire tordant de ce fait le cou à l’instauration d’une routine musicale soporifique. Le chanteur fait gronder ses cordes vocales pour pimenter et pour faire monter la tension sur un passage précis, néanmoins il prend son timbre suave et sensuel (que tout le monde pourrait lui envier), et à ces moments-là c’est la chanson qui se métamorphose et s’accapare un côté plus dansant. Par ailleurs, notre frontman attaque les tirades avec vitesse et empressement pour accompagner les doubles caisses maniées par Dirk Verbeuren afin d’immerger une composante plus véloce à un ensemble déjà légèrement irrité (« Long Live The Misanthrope »).  Les musiciens se mettent en ordre de marche pour délivrer un album fort en caractère, toujours très animé et respectant les codes du death mélodique avec notamment les ambiances activées par une vivacité et une célérité infrangibles, une myriade de mélodies poussées à la guitare, des percussions fortement appuyées et scandant le temps avec puissance et sans oublier un jeu de polyrythmie décuplant l’intensité et démontrant une qualité évidente du songwritting. Si on veut reprocher quelque chose à Soilwork, ça ne sera certainement pas d’être redondant, répétitif ou peu inspiré puisque chaque morceau composant cette oeuvre apporte son univers, son refrain... Bref sa pierre à l’édifice. J’en veux pour preuve « The Living Infinite II » qui fait l’exercice périlleux de mêler un tissu agréable et chamarré de métal sur lequel se brodent des incisions de death venant rendre la structure complètement schizophrène, mais dans cette douce folie le succès est au rendez-vous puisque le titre ne tourne jamais en rond. Les instrumentales telles qu’« Entering Aeons » ou « Loyal Shadow » parfont l’univers soilworkien en préparant l’auditeur à en prendre plein les oreilles.  Une question que l’on peut se poser c’est de savoir quelle est l’utilité d’avoir scindé l’album en deux, si finalement de prime abord aucun élément distinctif ne permet de différencier les morceaux entre eux. Outre la contrainte du support CD, je pense que nous pouvons déterrer une raison valable. La première partie de l’album parait peut-être plus mélodieuse et se livre plus volontiers à des petites expérimentations en faisant bourgeonner un parterre de breaks instrumentaux et en laissant plus libre court aux profusions mélodiques (« Vesta », « The Windswept Mercy »). Tout en restant dans un domaine ultra orchestré, le deuxième CD semble accaparer une caractéristique plus cadrée et sonne aisément le retour à un death grandiloquent sans concessions avec des titres qui font l’étalage d’un riche panel technique et le chant tire plus souvent la couverture sur le côté sombre de la force (« Owls Predict, Oracles Stand Guard », « Leech »).  En définitive, The Living Infinite est ce qu’on peut appeler un brûlot de death mélodique. Tout simplement, il n’y a pas à réfléchir plus loin. L’écriture de ce double album sait exactement emmener son auditeur dans divers horizons et le plonge à corps perdu dans une succession d’environnements tantôt édulcorés, tantôt aseptisés. Dans ce travail titanesque, les musiciens n’oublient pas d’insuffler des petites particularités comme une place prépondérante aux claviers (Sven Karlsson), l’utilisation unique d’un violoncelle, ou tout bonnement un effort considéré de rendre les chansons diffuse. Cependant, ils mettent toujours en évidence une capacité à prendre l’auditoire de force et à le lui faire déposer les armes sans rébellion. En plus clair, ce double album est une réussite du début jusqu’à la fin et donne l’impression que les minutes se sont évaporées puisque l’accompagnement mystifie avec cette sensation d’avoir été trop courte !

0 Comments 10 mars 2013
Whysy

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