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Réunion top secrète au QG d'André Matos :

"Bon alors les mecs, il faut décider. On fait quoi ?

_ Un nouveau groupe !

_ Non ! 3 albums avec Angra, 2 avec Sha(a)man, 1 avec Symfonia, si je démarre un nouveau groupe, on va splitter avant même de sortir un album ! Il faut que je sorte un nouvel album solo !

_ Ouais mais tout le monde s'en fout...

_ Non, on fait un nouvel album solo et pis c'est tout. Des idées pour la couverture ?

_ Euh, là comme ça, j'ai pas mieux que la photo d'un champ que m'a envoyé ma sœur pendant ses vacances.

_ Et bien on prend ça mais on rajoute une boule de feu !"

Il vogue, il vogue le Matos. Il vogue mais il ne sait plus trop où il va. Après avoir fait ses armes dans "Viper" et éclaté à la face du monde avec "Angra", l'aventure aura été assez courte et le bonhomme s'en est allé fonder "Sha(a)man". Manque de pot, encore des clash et voilà le père André sans groupe. C'est tout naturellement qu'il a entamé une carrière solo qui a plutôt bien démarré mais s'est aussitôt essoufflée avec un deuxième album accueilli dans une relative indifférence. Et puis, magie, le projet du siècle apparaît : Timo Tolkki, Uli Kusch et lui s'allient pour enfin montrer qui c'est les patrons. Mais bon voilà, succès de l'album mitigé, une tournée en forme de fiasco, il n'en fallait pas plus pour que Tolkki décide d'abandonner le projet et voici "Symfonia" aussitôt relégué aux oubliettes. Et comme André Matos n'est pas bête et sait que ce n'est pas en chantant sur un morceau d'"Avantasia" tous les trois ans qu'il va pouvoir payer ses factures d'électricité, la solution s'est imposée un peu d'elle même : relancer sa carrière solo. Et voilà le background de ce troisième et nouvel album à l'artwork ridicule et au nom de "The Turn of the Lights".

Mais voilà, Matos a beau posséder un fort capital sympathie, ses grandes années sont derrière lui et il n'est pas hérétique de dire qu’aujourd’hui, pas grand monde n'en a quelque chose à cirer. Ce qui est malheureux au vu de ce qu'il a pu apporter à la musique et du fait qu'"Angra" a été pour beaucoup une révélation et le groupe qui les a introduit au speed melo voire au metal tout court. Toujours est-il que ce nouvel album est là même si visiblement tout le monde s'en fout. Mais alors, si il n'a plus rien à prouver ni à perdre, on pourrait penser que cet album sera plein de panache et fait par quelqu'un qui a envie de se faire plaisir, non ? Et bien en effet, non, pas vraiment. Disons que sans être une purge, cet album est indigne de son auteur et s'avère même être une œuvre de power metal très moyenne. Revue des effectifs.

Pas vraiment de surprise, on retrouve ici Matos dans un registre familier, le speed melo ou power metal, plutôt gentillet, jamais trop agressif mais enlevé juste ce qu'il faut pour faire hocher la tête et ne pas pouvoir être diffusé sur Nostalgie. A ce titre là, on ne peut pas dire qu'il y ait tromperie sur la marchandise. D'ailleurs, quand l'album démarre, cela ne se passe pas trop mal. Bon, on ne crie pas au génie mais Liberty fonctionne plutôt bien, construit de façon correcte, sans surprise mais possédant un refrain assez posé venant contraster avec la batterie qui semble branchée sur la double du début à la fin. Et même Course of Life est assez sympa, morceau speed bien typique même si encore une fois l'originalité n'est pas de mise.

Mais l'illusion ne dure pas bien longtemps car très rapidement on se rend compte que Matos n'a plus rien à dire et se démène pour mettre sur pied des morceaux tous justes passables. Des riffs déjà entendus mille fois, des refrains assez pauvres, un chant faiblard, le bilan n'est pas très glorieux. Stop!, On Your Own, Light Years, autant de morceaux bateaux, qui auraient peut-être été acclamés (et encore...) il y a quinze ans mais qui sonnent aujourd'hui datés et surtout ne possèdent pas l'étincelle de leurs prédécesseurs. Tout est en place, les musiciens sont plutôt bons, Matos sait s'entourer, cela ne fait aucun doute. Oui mais on se demande où est la motivation et l'implication quand le groupe nous livre trois ballades niaises et sans intérêt. Gaza nous fera bailler, Sometimes viendra signaler pour notre plus grand bonheur que l'album est presque fini et Wings of Reality atteindra des sommets de nullité, nous offrant Matos chantant accompagné d'une simple guitare acoustique puis rejoint par d'autres instruments ensuite mais ne véhiculant aucune émotion et puant l'écriture automatique à plein nez.

Ceci dit, la globalité de l'album n'est pas mauvaise et un morceau comme White Summit est plus qu'honnête, signe que quand on veut on peut. Mais à côté, nous avons cette chose immonde qu'est Oversoul. Alors là il va falloir m'expliquer : comment ont-ils pu se démerder pour sortir un riff aussi bon, un couplet plutôt intéressant et...le pire refrain du monde de la vie de l'existence et de l'au delà. Une batterie encore coincée sur la double pédale, des guitares timides que l'on entend à peine et Matos qui vient lentement susurrer, en décalage complet avec la rythmique qui elle semble vouloir faire péter le radar. Et on ne parle même pas du break foireux qui se vautre dans sa tentative d'instaurer une ambiance un peu jazzy. Enfin bref, nous tenons là un morceau irritant, plein de promesses mais daubé par un refrain crispant. Comme quoi, il ne suffit pas d'être "une voix" pour transformer tout ce que l'on touche en or.

Et puisque l'on en parle, même la voix fait défaut dans cet album. Flamboyant auparavant, André Matos a toutes les peines du monde à s'imposer, se contenant de chuchoter ses lignes de chant et singeant de plus en plus la tessiture de Tobias Sammet. A vrai dire, durant l'écoute de "The Turn of the Lights" on a l'impression de se tenir devant un album de chutes studios qu'"Edguy" n'aurait jamais voulu sortir tellement ils en avaient honte.

Tout ça pour dire que si cet album pourra plaire aux fanatiques du sieur Matos et à ceux qui prennent du jus de citrouille en intraveineuse depuis vingt ans, il n'en constitue pas moins une œuvre moyenne, faiblarde et totalement dénuée de magie. De là à dire que Matos n'a plus aucune motivation, il n'y a qu'un pas.


Et en conclusion, je ne résiste pas à vous citer quelques extraits du discours promotionnel accompagnant cet album (authentique) :

"Après 25 ans de succès international, [...] Andre Matos revient nous époustoufler avec la sortie de l'excellent "The Turn of the Lights" qui a déjà été considéré comme le meilleur album de sa carrière".

Vous voyez, "de sa carrière", c'est pas rien ! Ce n'est pas "son meilleur album solo", c'est "le meilleur de tout ce qu'il a pu faire à présent et donc bien meilleur que les albums d'Angra". C'est donc pourquoi il a récemment annoncé qu'il interpréterait "Angels Cry" (premier album d'Angra) en entier lors de sa prochaine tournée. Tout s'explique.


"Cet album attendu depuis longtemps nous montre le groupe au sommet de son art, continuant d'explorer différents styles. Le public accueillera avec joie [...] onze tueries absolues qui contiennent des riffs excitants, [...] des refrains mémorables et des paroles intelligentes, le tout porté à la perfection. [...] André Matos montre qu'il est bel et bien le meilleur chanteur brésilien de tous les temps et un des tous meilleurs mondiaux.[...] "The Turn of The Lights" est un nouveau chapitre majeur dans l'Histoire du metal et [...] il ne fait nul doute que plusieurs de ses morceaux vont devenir des classiques intemporels".

Bon alors bien sûr, tout ce foin est bien exagéré par le label, on a l'habitude, mais une telle décharge de mauvaise foi et de prétention nous fait dire que Matos a peut-être du mal à se rendre compte qu'il n'intéresse plus grand monde. "Le meilleur album de sa carrière", "le tout porté à la perfection", "un groupe au sommet de son art", "Matos reste le meilleur chanteur brésilien voire du monde de tous les temps", "un chapitre majeur dans l'histoire du Metal",... Atterris un peu et allume-les ces lumières, t'en as bien besoin.


0 Comments 23 janvier 2013
Whysy

Whysy

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