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Beaucoup se sont interrogés, à juste titre d’ailleurs, sur la pertinence de la fréquente affiliation du groupe américain Agalloch au Metal folklorique. Tout au long de sa carrière, sous la houlette de son chanteur et leader John Haughm, le combo a su démontrer l’étendue de son talent dans un registre que l’on pourrait qualifier de Metal atmosphérique, de « Dark Metal », ou encore de Metal progressif… Sans oublier les rythmiques inspirées du doom ou du black… Bref, Agalloch a toujours évolué dans des sphères gracieuses et très personnelles, où bien peu pourraient réussir à l’atteindre. Mais si l’on excepte la présence de quelques instruments traditionnels dans le mythique « The Mantle » et une atmosphère typiquement boisée et forestière, que peut bien avoir le groupe de si « folklorique » ?


Et bien justement, après trois albums et de nombreux EP ayant jalonné la discographie de la troupe, Agalloch nous propose de nous immerger dans une atmosphère purement Pagan/folk, et d’oublier pour un temps la rugosité des guitares pour nous lover dans des atours certes, toujours mélancoliques et on ne peut plus soignés, mais surtout purement atmosphériques et délicats. Une parenthèse au Metal, donc…

« The White EP » s’inscrit dans la continuité de l’EP gris, sorti juste après The Mantle, qui proposait deux remix de titres de cet album. Même si la démarche m’avait interpellé, j’avais trouvé le résultat un peu trop expérimental et décousu pour moi… J’espérais donc qu’il n’en serait pas de même cette fois-ci !

Fort heureusement, mes craintes furent très vite dissipées : « The White » propose en fait un assemblage de morceaux folkloriques composés par le groupe entre 1999 et 2007, et notamment pendant les sessions de « The Mantle ». Tout l’EP tourne autour d’un concept, celui du film « The Wicker Man », sorti en 1973, et dont on peut entendre à plusieurs reprises des samples sur l’EP, ce qui contribue à lui donner une dimension très visuelle, et une atmosphère tangible. Une île recluse et peu accessible, un refus des religions monothéistes, des sorcières, de la magie, une adoration de la terre… Un concept parfait pour une musique telle que celle-ci, et des croyances qui cadrent parfaitement avec les opinions personnelles des membres du groupe.

La construction de l’EP est d’ailleurs particulièrement intéressante. 7 titres déjà, chiffre de la perfection. Un morceau central pilier, « Pantheist », cœur de l’ouvrage, autour duquel les titres s’articulent et se correspondent. L’ouverture et la fermeture se font d’ailleurs sur un même thème, d’abord interprété à la guitare acoustique (surplombée de leads électriques très bien intégrés, avec les lignes mélodiques qui résonnent, se répondent, s’enchevêtrent avec magie), puis au piano, pour une très belle ballade, sur un registre émotionnel… Qui correspondent à l’arrivée et au départ de l’île. Deux bouleaux, arbres chargés de symbolisme : un noir, où se mélangent acoustique et électrique pour un thème étrange et assez fascinant, soutenu par des percussions lourdes et mystiques ; et un blanc, où John nous déclame un ancien poème d’A.J. Tessimond, sur une musique qui se présente d’abord élégiaque, gaie et purement folk, puis plus mélancolique sur une deuxième partie de morceau.

Enfin, place à la mystique et à un registre plus ambiant pour « Hollow stone », titre relativement « vide », mais chargé d’un brouillard opaque qui ajoute vraiment quelque chose au mystère de l’œuvre…Et la charmante « Sowilo Rune », typique d’Agalloch, assez répétitive, mais très touchante, avec les murmures fantomatiques du chanteur et la pureté de la guitare acoustique accompagnée des arrangements du clavier…

Mais l’EP atteint évidemment son sommet sur « Pantheist », cette fameuse piste centrale, où les chœurs graves de John, sublimes, se voient soutenus par une musique où électrique, acoustique et percussion se conjuguent pour apporter l’intensité qui fait parfois défaut au reste de l’EP. Un morceau fascinant, aussi bien dans ses mélodies que dans l’à propos de sa progression, fantastique. Quelques petits bruitages apportent à l’ambiance et aident à l’immersion, et le voyage s’avère parfait...


En bref, Agalloch ne déçoit pas et démontre encore une fois, s’il en était besoin, toute la maîtrise de son art. Cet EP est vraiment très intéressant pour tout amateur de dark folk, aussi bien que de Metal, car les influences restent toujours prégnantes. On ne peut d’ailleurs que se réjouir que l’électrique n’ait pas complètement désertée, car cela contribue grandement à l’intensité de l’opus. Cependant, même après maintes écoutes, une légère impression de creux subsiste : non pas quant à la profondeur de la musique, mais plutôt liée au fait que, ainsi séparé du Metal, Agalloch, malgré lui, ne perd-il pas un peu de son intérêt et de sa mélancolie ?

Quoiqu’il en soit, cet EP, déjà rare (car seulement tiré à 2000 exemplaires), reste un excellent investissement, en attendant la sortie d’un quatrième opus, prévu pour 2009.


Gounouman

0 Comments 04 mai 2008
Whysy

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