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Marcher dans les pas d’un géant. Ce n’est facile pour personne et quand c’est un groupe qui s’y colle, il risque d’y laisser plus que des plumes. C’est sa crédibilité même qui est en jeu. C’est à cette lourde tache que s’est attelé le groupe allemand Thulcandra dont le deuxième album, Under A Frozen Sun, dont il va être question dans cette chronique, est sorti en septembre dernier chez Napalm Records. Et le géant auquel son sort semble lié n’est autre que feu Dissection.

La musique de Thulcandra n’est pas douce et docile et ça s’entend. Under A Frozen Sun possède un aura de violence assez grossière. L’album est très brut et agressif pourtant le groupe ne laisse jamais tomber les mélodies comme en témoigne l’élégant passage atmosphérique de “Under A Frozen Sun”. “Gates of Eden” est aussi un bon exemple de ce mélange des genres. On ressent toute l'âpreté des lignes instrumentales, aidées en cela par le chant  torturé de Steffen Kummeren, qui sont quelques fois adoucies par des moments beaucoup plus mélodiques et calmes.  Ainsi l’album débute avec la presque mélancolique “In Blood And Fire”, et ses 8 minutes et 36 secondes au compteur, qui arrive avec des riffs percutants à imposer tout de suite le style des allemands. Malgré la lourdeur apparente, Thulcandra sait laisser planer ses morceaux et évite l’écueil du bourrinage pour le bourrinage.

Ainsi, les musiciens fournissent un beau travail de fond comme en témoigne la très réussie “Ritual of Sight”. Les lignes musicales sont la plupart du temps bien pensées et elles parviennent à convaincre notamment quand elles deviennent un peu plus tristes, un peu plus maussades. On sent chez Thulcandra que n’est joyeux et les allemands ne perdent pas une minute pour nous le faire comprendre. Rien ne viendra égayer la terre sombre où Under A Frozen Sun a poussé. D’ailleurs quand le groupe se laisse aller à son côté désenchanté et sombre il arrive à créer ses meilleures parties (“Echoing Voices”). De son côté, “Gates of Eden” possède une force liée à son atmosphère créée grâce à un solo qui fait mouche et à des rythmes un peu langoureux qui forment un voile ténébreux autour de la chanson (bien que l’effet en soit un peu amoindri à cause de la batterie qui est trop répétitive sur la fin du morceau).

Au crédit de Thulcandra, il faut porter la bonne facture des morceaux qui possèdent ce qu’il faut d’aura pour transporter. Brutal sans l’être, le groupe sait façonner son monde, à la croisée des chemins, avec doigté. Cependant, les allemands ne possèdent pas encore la capacité d'envoûtement de Dissection avec lesquels ils sont souvent comparés. Il y a des éléments, des bouts d’idées qui rappellent les suédois. On retrouve les mêmes schémas, les mêmes ambiances. C’est difficile de ne ps s'en rendre compte. Seulement, “Under A Frozen Sun” n’atteint pas le charme hypnotique de “Unhallowed” par exemple. Il faut dire que ce n’est pas évident d’arriver à au niveau de beauté musicale de Dissection. Et tout le disque en lui-même n’arrive pas à égaler les riffs et les lignes instrumentales des suédois. Que cela soit voulu ou non, cela permet tout de même à Thulcandra de tracer sa propre voie. En quelque sorte. Car, si oui c’est moins envoûtant et novateur que ce que proposait le groupe de Jon Nödtveidt, il faut pas oublier une chose importante: Dissection n’existe plus. C’est peut-être dur  admettre mais pourquoi ne pas se contenter de cet écho, ma foi, pas si mauvais ? C’est toujours mieux que rien, non?

De la même manière, on retrouve aussi des similitudes avec d’autres suédois, ceux d’Unanimated, cette fois. On comprend pourquoi Thulcandra choisit de reprendre “Life Demise” en guise de conclusion de son second opus. L’intention est bonne et assez bien exploitée. Toutefois, le résultat reste encore en deçà de ce qu’on pourrait attendre. Mais il ne faut pas trop en demander à une reprise non plus. Enfin, il n’y a pas vraiment de morceau faible sur Under A Frozen Sun, justes quelques passages moins inspirés et évocateurs (pendant lesquels la batterie à tendance à briser l’ambiance), qui sont, hélas, présents sur beaucoup de morceaux (la fin de “Black Flags of Hate”, celle de “Gates of Eden” et quelques moments saupoudrés par-ci par-là). Pas de grands moments à faire dresser les poils sur les bras non plus mais ça viendra sans doute un jour.

Pour le reste, Thulcandra délivre un album homogène (parfois un peu trop, on aimerait un peu plus de variations dans les thèmes musicaux) qui défile très vite. Les morceaux forment un tout bien ficelé qui aide à l’écoute. Rien n’a l’air déplacé ou bizarre. Simplement peut-être parce que Under A Frozen Sun est très linéaire et ne cherche pas a composer plus loin que le bout de son influence première. Du début à la fin, Thulcandra nous abreuve de sa rage à l’image du chant très éraillé, dans la tradition du black metal, de Steven Kummeren. Ce dernier ne module pas trop son timbre tout au long de l’album mais ici ce n’est pas vraiment ça qu’on lui demande. Ce que veut entendre c’est son chant douloureux et coupant parce qu’il complète bien la musique.

Under A Frozen Sun est un disque de bonne facture qui prouve le mérite et les capacités de Thulcandra. Les titres sont, en général, plutôt réussis et ils savent produire une certain effet, à mi-chemin entre brutalité et mélancolie. Le deuxième album de Thulcandra se veut assez subtil et mâtiné de moments aérés qui soulagent de la dureté du chant. Le tout fonctionne plutôt bien et on espère voir le groupe mûrir et grandir. Pour les grincheux du fond qui brandissent et s’accrochent a leur étendard Dissection comme à une bouée de sauvetage, je n’ai plus qu’une chose à leur dire, aussi dure qu’elle soit: faute de givres il faut quelques fois manger des merles.

Nola

0 Comments 26 octobre 2011
Whysy

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