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Trois jours, c'est le temps qu'il aura suffit aux fans du combo australien Voyager pour financer le nouvel album, V, par le biais du site de crowd-funding Kickstarter. La preuve d'une fanbase particulièrement généreuse, à défaut d'une véritable renommée ou d'un contrat suffisamment solide. Il faut dire que Voyager est loin d'être le groupe de metal prog le plus aventureux du moment : des morceaux puissants et efficaces, très calibrés et produits, dans une veine metal oscillant entre Devin Townsend et Dream Theater, rien de bien transcendant a priori.

Et effectivement, V se situe dans ce filon sympathique, susceptible de plaire à un assez grand nombre somme toute. Les excellents Hyperventilating et Breaking Down qui ouvrent l'album le résument plutôt bien : riffs puissants, rythmique enjouée et technique, quelques ambiances, le tout sonne très metal prog tradi avec quelques touches djent-indus, un alliage très tendance (voir par exemple Skyharbor dont le chanteur avait participé au précédent Voyager, ainsi que les magnifiques et plus agressifs The Omega Experiment). Constitué autour de Daniel Estrin (chant et claviers), le groupe est composé d'excellents musiciens, assez techniques mais sans en faire trop : Simone Dow et Scott Kay sont aux guitares, Ashley Doodkorte à la batterie et Alex Canion à la basse. Les morceaux sont courts, la voix est mixée en avant et la structure narrative est plutôt explicite : le groupe cherche à être compris et entendu par le plus grand nombre.

Démarche commerciale peut-être, surtout qu'après le court interlude Fortune Favours the Blind, le groupe se lance dans un véritable hommage à Duran Duran, impression bien évidemment amplifiée par le fait qu'Estrin soit un clone vocal de Simon Le Bon (chanteur des britanniques). Mais même passée cette amusante comparaison, dans la structure, dans les mélodies et les sonorités on assiste à un réjouissant retour aux eighties, à cette glorieuse année 1982 où l'excellent Rio avait fracassé le hit-parade avec sa new wave romantique teintée de proto-neoprog. C'était le bon temps de la seconde British Invasion, et pour ceux qui s'en rappellent, le superbe Embrace the Limitless vous y ramènera directement. Je précise néanmoins qu'il est possible que ce ne soit pas de bons souvenirs. Hum.

Moi j'aime cette musique, joyeuse sucrerie commerciale, et voir les australiens y rendre hommage (peut-être involontairement) est un régal. Parenthèse de courte durée, puisque dès le saccadé Orpheus on est de retour dans des sphères metal, toujours avec Simon Le Bon au chant. J'en rajoute mais le mec l'a cherché : il a un timbre un peu similaire sans doute, mais comme il double ses parties de chant, ajoute un max de réverb et tisse des mélodies qui rappellent furieusement les rosbifs millionnaires, la comparaison devient inévitable. Bon j'arrête. Surtout que Voyager ajoute un chouilla de mathcore dans son metal, avec quelques growls des familles, tentant sans doute de durcir le ton, et pour le coup ça marche beaucoup moins.

Paradoxalement, ce que j'aime le moins sur cet album ce sont justement leurs tentatives de s'écarter du sillon metal catchy presque pop et de flirter avec d'autres ambiances plus progressives ou extrêmes, alors qu'intellectuellement je suis obligé de les saluer. Mais voilà, il semble que Voyager soit plus doué pour composer des mélodies fluides et aériennes (le superbe refrain de It's a Wonder) que des évolutions complexes et agressives (le pénible The Domination Game). S'ils ne manquent pas de talent ou d'ambition, les cinq australiens manquent peut-être d'un peu de réalisme, et devraient se consacrer à une musique moins tarabustée et plus directe, qui leur réussit bien mieux. Je rassure les fans, il est peu probable que leur prochain album soit une relecture metal des grandes heures de Spandau Ballet ou A Flock of Seagulls. Je trouve cela fort regrettable, mais ce n'est que mon avis.

0 Comments 01 juin 2014
Whysy

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