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Heavy Metal Breakdown m'apparaissait un peu comme ces nouveaux-nés, beaucoup plus costauds que les autres, qui s'amusent à torturer leurs malheureux congénères dès seize mois à la crèche : certes costaud et brutal, mais comme tous les jeunes bébés, incroyablement attendrissant et surtout vulnérable à la première déconvenue (telle une chute du haut de la table à langer pour ne citer que les pires cataclysmes envisageables).

Pourquoi introduire cette chronique par cette douteuse métaphore digne du plus incompétent des pédiatres ? Tout simplement car je trouve que Grave Digger, dans ses premiers pas, correspond tout à fait à la définition décrite plus haut, à savoir un gros dur qui terrorise ses congénères et suscite l'admiration, mais qui n'attend qu'un coup de vent pour s'effondrer à la première adversité. Comme tous les monuments en construction, l'édifice Grave Digger ne dispose pas de fondations très solides et malgré un premier disque séduisant et porteur de promesse, l'illusion ne durera qu'une année. Et l'arrivée de Witch Hunter en 1985 va rapidement couvrir de sombres nuages l'avenir pourtant doré des fossoyeurs teutons.

Telle une tour de Babel ayant vu son permis de construire refusé par la mairie du paradis céleste, les promesses de grandeurs et de succès de Grave Digger vont progressivement s'écrouler au fil des trente-huit minutes d'écoutes difficiles que représente ce Witch Hunter. Une pochette hideuse, neuf titres de trois minutes d'une platitude assez infinie et une production asthmatique suffisent à transformer les qualités rafraîchissantes entrevues sur Heavy Metal Breakdown en lourdeurs étouffantes et sans issues.

Non pas que les compositions de ce deuxième album soient particulièrement affreuses, le groupe se contente de réutiliser à l'identique les quelques structures qui avaient fait la réussite du premier opus sans y ajouter la moindre idée nouvelle. L'impression de resucée est flagrante, et comme le disait si bien Marx dans son petit Robert des classes sociales : «l'histoire se reproduit toujours en deux fois, la première en drame, la seconde en farce». Et bien c'est un belle farce que nous font Eric Adams et Chris Boltendahl tant certains titres de Witch Hunter atteignent des sommets de ridicule : «Love Is A Game» où le groupe semble perdu dans un mauvais sitcom, ou encore «School's Out» qui me rappelle avec nostalgie les grands moments de mes cours d'anglais de 5eme... je sais pas trop si je dois en rire ou m'effondrer en larme sur mon ordinateur devant le massacre en règle de mon idole par une chanson aussi affreuse !

Pour le reste rien d'assez terrible pour inciter un True métalleux a composer le numéro vert de SOS dépression, des titres puissants et péchus qui pourraient éventuellement séduire s'ils n'étaient pas aussi brouillons et si la production n'avait pas aussi affreusement vieilli : je pourrais citer «Witch Hunter», «Get Away» ou «Night Drifter» mais dans cet amas de bruit et de fureur tous les titres se valent à peu près. L'énergie qui avait fait la réussite du premier opus est ici toujours présente, elle est simplement moins bien utilisée et semble se perdre dans la nature.

Que dire de plus sur Witch Hunter si ce n'est qu'il provoquera une grosse crise existentielle chez les allemands quant à la route musicale à suivre. A l'époque Grave Digger ne semble guère avoir de talent pour le Heavy Metal (la bonne blague je sais... mais replacez-vous dans le contexte) et stagne sans parvenir à s'inventer un style qui lui soit propre. La crise couve entre Chris partisan de la ligne dure et le reste du groupe préférant revenir à des valeurs plus rock'n'roll, elle ne tardera pas à exploser. S'il fallait conclure, je dirais tout simplement aux lecteurs avides de découvrir Grave Digger de ne pas commencer par cet album, et aux fans absolus de ne pas se faire de mal inutilement...

SMAUG...

0 Comments 27 février 2007
Whysy

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