Les colts attachés de chaque côté du ceinturon, les éperons solidement fixés sur les bottes, du tabac à chiquer, les chemises trempées de sueur à cause d’un soleil ardent. La cavalerie est passée dans la ville et plus rien ne résonne, rien ne bouge, tout est calme… Il y a même le rouleau de paille qui dévale les rues poussiéreuses battues par les chevaux de nos fiers pionniers. Deux cow-boys se regardent fixement les yeux dans les yeux et se défient en attendant de savoir lequel va dégainer le premier. C’est sur ce thème que les Allemands de Dezperadoz se sont inspirés pour créer un genre musical typiquement western et fortement influencé par le heavy métal.

Ouhouh Yee pee hey ! Petit cow-boy viens donc te frotter à la musique du Far West à la sauce métal. C’est toujours la même recette que l’on retrouve sur cet opus. The Legend And the Truth avait laissé un souvenir mémorable à tous ceux qui s’étaient aventurés dans le monde impitoyable de Tombstone  et de Wyatt Earp. Il est donc normal qu’après ce deuxième album réussi, la fièvre regagne nos compositeurs pour recréer cet environnement hostile sans foi ni loi où règne la dictature les pistolets. An Eye For An Eye, troisième album du combo, arrive en France et est signé AFM Records. Pas de panique, il respecte le décor planté par l’opus précédent, à savoir ambiances très old school avec les instruments westerns (harmonica retentissant sur « Wild Bunch » par exemple) et les ambiances de type saloons (plutôt surprenant pour des Allemands, non ?).  

Pour faire une intrusion dans ce monde, les guitaristes se sont placés un nouvelle fois dans la peau des seuls justiciers restant en vie faisant parler la poudre et le sang. Tels des feux follets de la gâchette, Dennis Ward, Alex Kraft et Alex Weigand débitent des riffs qui feront tomber les plus intrépides des hors loi. Les mélodies créées confèrent le caractère viril à toute la structure musicale qu’il se doit pour l’ambiance d’un bon far west (« Wild Times », « Days Of Thunder »). Les musiciens sont solides et l’enchaînement des  soli sont exécutés dans l’art et la manière. En tout cas ce n’est pas la frustration qui se ressent et les parties laissées aux envolées sont légion.
Le batteur rythme la cadence avec la technique qu’on lui connaît (« hate », « Don’t Give Up », « Wild Times »). Il est l’axe directeur sur de nombreux titres et précipite la cavalcade des effets sur les lignes mélodiques. L’impressionnant Sascha Tilger fait ressortir tout ce qu’il y a de sauvage et ses compères rendent les morceaux héroïques.  

Du côté du chant, on retrouve Alex Kraft qui sort son épingle du jeu. Son timbre suave et appuyé correspond à merveille au contexte musical. Les refrains sont repris d’une manière enjouée et font des morceaux de véritables hymnes fédérateurs. La reprise de « Riders On The Storm » des Doors conserve toute son essence originale et est même canonisée par la puissance du heavy. Par contre d’autres titres comme « When The Circus Comes To Town » paraissent trop lourds et viennent même gâcher l’entreprise qui a été faite. En fait, le reproche que l’on peut faire à An Eye For An Eye c’est l’inégalité des titres proposés. Ce défaut est apparu avec l’absence de mise en scène des morceaux. Le piège avait donc été détourné par The Legend And the Truth mais comme ici on assiste à une succession de musique (ce qui n’est pas un problème en soi), le groupe se retrouve piégé et l’hétérogénéité des morceaux fait défaut à l’album dans son ensemble. On arrivera facilement à headbanger sur des titres phares et hyper entraînants alors que d’autres chansons seront plus rébarbatives et pousseront l’auditeur à l’ennui ou pire à passer le morceau en cours.

Au niveau de la production ça pêche un peu, l'utilisation des hennissements des chevaux est net (:D) mais sur les instruments ça grésille. On a vraiment l'impression d'entendre de la bouillie sur les passages les plus chargés c'est vraiment dommage. Alors est-ce peut-être une volonté délibérée pour rendre l'album encore plus proche de l'atmosphère dégagé ? Ce point est à éclaircir, mais je ne pense pas que cela soit une idée à exploiter car le sentiment de gâchis s'intensifie sur ce créneau.

Dezperadoz est un groupe complètement singulier et le mélange western et métal est complètement assumé. Cependant, An Eye For An Eye ne fera pas le même effet que son prédécesseur et pourra même décevoir certains qui auraient pu  attendre énormément sur la suite artistique. Les Allemands n’essuient pas là un échec mais le constat sera mitigé et les avis nombreux alors que The Legend And the Truth avait mis tout le monde d’accord.


HD