Je ne peux pas nier que parfois le métier de chroniqueur amène à se poser quelques vaines questions existentielles : Pourquoi tant de haine ? Pourquoi l'univers ? Pourquoi les groupes de Power Metal jouent-ils toujours les mêmes choses de la même façon ? Tant de questions que même le grand Einstein en son temps n'a pas su résoudre. Autant vous dire que cette chronique ne vous apportera pas de réponse tant la question dépasse de beaucoup ma personne, elle se contentera de fournir quelques éclairages au sujet, en attendant qu'un universitaire marginal se décide enfin à rédiger sa thèse sur ce curieux phénomène.

Pour commencer attachons-nous à décrire l'accusé. Burning Point est un groupe finlandais apparemment anodin, casier judiciaire vierge, pas vraiment connu des services de polices. Bref rien qui ne permettrait de penser que ses membres appartiennent à cette secte diabolique visant à détruire toute trace de créativité artistique dans le genre. Les quatre bonshommes sont de type barbu et effacé, grands et blonds comme tous les hommes du nord, ils payent leurs impôts et trient leurs ordures comme tout le monde, bref encore une fois rien de bien exceptionnel.

Les antécédents judiciaires de Burning Point son connus et comptent un certain nombre de circonstances atténuantes. Un label intelligent et dynamique (Metal Heaven), un album sorti en 2003 Feeding The Flame ayant trouvé bonne presse en Europe, des musiciens plutôt respectés dans le milieu. Pour le reste la situation est moins reluisante, ainsi Burning Point s'est durablement compromis dans l'utilisation abusive et répétée de pochettes ultra kitsch qui ont très vite attiré l'attention des services de polices. Ce n'est qu'après l'interpellation que la vérité fut révélée au grand jour par des voisins, les membres apparemment honnêtes de Burning Point se compromettaient sans vergogne dans le Power Metal sans originalité depuis bientôt six ans, et cela dans le plus grand secret.

La parole revient donc à l'accusation : «Votre honneur j'ai tout lieu de penser que Burning Point fait partie de cette sinistre vague métallique qui s'attache à détruire impitoyablement toute forme d'intérêt dans le Power Metal européen. Par des procédés de composition douteux consistant essentiellement à répéter dans les riffs les mélodies déjà utilisées pour les lignes de chant. Burning Point parvient avec une efficacité toute professionnelle à nous produire des compos sans saveurs ni surprises, ce genre de titres dont on sait tout avant d'avoir commencé à les écouter, même le titre éponyme de neuf minutes est ultra prévisible. Pour le reste, le chant est ultra classique, les parties musicales également. Bref il n'y a pas grand chose à tirer de ce combo lamentable, je requiers la peine maximale, à savoir 2/10 et un bon coup de pied aux fesses.»

Après ce réquisitoire dur comme la barbe de la justice, la parole revient comme le veut la procédure à l'avocat de la défense : «Votre honneur j'en appelle à votre grandeur d'âme, tout cela me paraît fortement exagéré et réveillé d'une psychose qui dépasse largement l'entendement de ce modeste combo finlandais que l'on accuse de tous les mots. Ainsi Burning Point n'est rien de plus qu'un groupe de seconde zone de Power Metal, certes dénué d'originalité, mais qui assure toutefois son métier avec un professionnalisme irréprochable. Certes les compos ne révolutionnent rien mais elles restent toutefois efficaces et agréables à l'oreille : «Hell Awaits» est une belle cavalcade dans la grande tradition d'Accept, «To Hell And Back», «Ice Bound» ou «Heart Of Gold» sont de la même veine. Aucun titre n'est vraiment marquant, mais aucun n'est non plus mauvais, Burned Down The Enemy est en définitive un album banal, sans réelle prétention mais qui ne justifie pas qu'on lui fasse payer pour les autres.
J'en appelle donc à la clémence de la cour, et requiers une peine de 6/10 avec sursis...»

Après réflexion et audition des derniers témoins : quelques fans irréductibles du combo et autant de détracteurs avides, il fut décidé d'une note médiane, à même de satisfaire les deux partis. Certes la chasse aux sorcières voulue par le procureur général n'allait pas commencer aujourd'hui, mais sans déconner... les gars de Burning Point ont quand même plus des têtes d'honnêtes fermiers que de grands conspirateurs.

SMAUG...