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Il y a des fois où les albums sont d'un ennui et d'une homogénéité compacte voire limite étouffante, mais il y a aussi des bonnes idées qui germent une fois dans l'esprit d'un compositeur et qui se révèlent être de parfaits petits filons musicaux. Suidakra, formé à Düsseldorf en 1994, a trouvé son créneau sur un style particulièrement original à la croisée du Death/black metal et des influences folk/médiéval. Il est très facile de reconnaître la patte du combo, mais le tout est de ne pas tomber dans la médiocrité ou dans la convenance. Or ce n'est pas le cas ici car les Allemands ont su prendre leur temps pour nous concocter ce tout nouvel album intitulé Crógacht. Trois ans après Caledonia la bande à Arkadius ressert le couvert pour le plaisir de tous.

En effet, étant peu habitué aux sonorités folk en général, j'ai toujours pensé que les personnes (attention cliché) s'habillant en kilt portant la barbe tombante et buvant dans des cornes étaient complètement timbrées ou qu'elles ne vivaient pas à l'ère technologique et où le cancer et le sida font des ravages sur l'humanité (fin de cliché)! Mais je dois avouer que même si mon avis personnel sur la question n'a pas changé, Suidakra m'a vraiment rapproché de cet univers qui dépasse mon entendement. Les environnements folk mixés aux univers médiévaux donnent au death pratiqué (plus dans mon registre) une certaine puissance et une saveur tout à fait appréciable. Les cornemuses, même si elles restent en arrière plan, ne manquent pas de saluer les mélodies extrêmes mises en avant sur Crógacht. Alors n'allons pas non plus dire que cet opus est un pur concentré de Death/black métal. Évidemment non, les teutons ne vont tout de même pas abandonner le fruit de leur succès mais disons simplement que les arpèges folkloriques viennent soutenir la structure musicale tout au long de l'album. Il arrive que des titres soient entièrement baignés dans cette ambiance (« Slán ») pour justement souligner et appuyer cet aspect peu commun.

La musique de Suidakra transpire la puissance et les morceaux pêchus sont emportés par le chant entrainant et lorgnant sur le monde viking de Arkadius (« Conlaoch »). Son timbre possédé à la frontière du growl colle parfaitement à la vélocité musicale et confère toute la violence suffisante à Crógacht. Cette célérité est incarnée d'autre part, par le jeu à la double caisse de Lars et est tempéré par de gros breaks ou des ponts instrumentaux quasi omniprésents (« Isle Of Skye »). Ainsi les titres sont empoignés dans des flots mélodiques immergés dans un melting pot musical où l'on retrouve deux dominantes : le folk festif et le death destructeur. Néanmoins entre riffs acérés et tambourinages impressionnants, les parties instrumentales se frayent une place, et on retrouve des titres plus classiques comme « Feats Of War » embelli par un chant féminin et la graduation du morceau dans son intensité. En effet, la structure musicale sans se perdre dans des miasmes extrêmes montre une certaine sensibilité grâce à un panel instrumental enrichi. Certaines chansons comme « Ár Nasc Fola » nous dévoilent les flutes, la guitare sèche et les tambours tandis que d'autres comme « Slàn » mettront sous les projecteurs la harpe et les célébrissimes cornemuses mélangées aux nappes de clavier. Quoiqu'on en dise, ces éléments viennent incontestablement rafraîchir la production et apportent un second souffle à celle-ci.

Les soli de guitares de bonne envergure montrent aussi un aspect volontariste et déchainé tout au long de l'album. Couplés à la batterie ou apprivoisés par les parties plus intimistes de l'album, nous aurons la surprise de les savoir bien présents et surtout extraordinairement mis en évidence par une production d'excellente facture. Malgré toutes ces déferlantes de notes, on ressent un côté festif titillant et ubiquiste. Les facettes de l'album sont assez ressemblantes dans l'ensemble et mis à part la poignée de morceaux inscrits de manière ostentatoire dans les ambiances médiévales, on appréhende Crógacht comme une œuvre bicéphale à part entière. On pourra peut-être blâmer la prévisibilité de l'album des Allemands ou encore ses attraits excessivement clichés notamment sur les parties festives. En effet, on dénotera une utilisation à outrance des divers éléments épiques. « Baile's Strand » démarre par exemple sur des croisements de fer et des chants guerriers mettant plus ou moins le morceau sur le chemin du ridicule, mais comme on dit, le ridicule ne tue pas et Suidakra redouble d'effort et se montre encore plus convaincant et efficace sur celle-ci. Sous l'étendard du folklore, les envolées sont de toute beauté, la puissance bien palpable et les riffs ravageurs, le mélange très épicé fait sensation.

Au final, Crógacht se dévoile être une superbe production massive mêlant à la fois musique extrême et folk teinté par des ambiances médiévales sans pour autant dépeindre la qualité intrinsèque apportée par nos voisins germanophones. Je suis persuadé que cet album saura être convaincant pour la majorité des mélomanes du métal avec toutefois une mise en garde sur la dureté et l'imperméabilité de prime abord.

- ĦĐ -

0 Comments 24 janvier 2009
Whysy

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