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Il serait tellement facile d'attribuer l'impression de déjà-vu et de machine trop bien huilée que l'on éprouve à l'écoute de cet album au énième départ de Matt Barlow, tant l'ombre du rouquin magnifique plane sur l'inégal Dystopia, nouvel opus d'Iced Earth.

Difficile en revanche de dire si cet album est à réserver aux fans du combo américain, car l'acquisition de cette galette risque de leur donner la sensation qu'ils se sont fait légèrement rouler: tant d'intros réchauffées, tant de refrains qui se ressemblent et nous font malheureusement penser que Jon Schaffer commence doucement à pédaler dans la semoule.

Pourtant il ne s'agit pas d'un mauvais album, loin de là, et l'auditeur moins regardant ou le néophyte y trouveront largement leur compte: ce n'est pas mon cas, étant fan, et donc exigeant.

Mais reprenons du début. Après un The Crucible Of Man que, personnellement, j'avais adoré et une longue tournée, le 2 mars dernier Matthew Barlow annonce son départ définitif d'Iced Earth, pour des raisons familiales cohabitant difficilement avec l'emploi surchargé d'un des groupes-phares du heavy-metal. Sans doute échaudé par le mauvais accueil qu'avait reçu Tim Owens, dernier intérimaire en date, Schaffer décide de ne pas renouveler l'expérience en engageant un clone, Stu Block. Sans faire injure à ses talents de vocaliste, Stu fait pâle figure et ressemble à un Barlow mal échauffé, en petite forme. Ce cruel manque va empoisonner tout l'album pour les fans que nous sommes, d'où la question que je me pose: Dystopia, à réserver à ceux qui ne connaissent pas Iced Earth?

N'allons pas jusque là, ce serait omettre le fait que malgré ses défauts rédhibitoires, il y a d'excellents morceaux sur cet album. Ca commence fort avec le morceau-titre qui ouvre le bal, même s'il ne fait aucun doute que c'est bien Jon qui l'a composé: on se laisse bercer par le rythme puissant et entrainant du groupe, assez agressif, et le refrain génial nous fait espérer le meilleur pour les autres morceaux. Espoir qui ne sera pas déçu avec Anthem, sorte de mid-tempo encore puissant et aux belles mélodies. Même Boiling Point tient assez bien la route, mais au bout du troisième morceau de ce type on est pris d'un doute affreux: Jon sait-il qu'il a déjà écrit ces chansons des dizaines de fois durant les vingt-cinq dernières années? Sait -il qu'il est terriblement marqué par le syndrome Steve Harris, à tel point qu'il serait peut-être temps de penser à le renommer syndrome Jon Schaffer? Ecrire et réécrire la même chanson, album après album, en est-il vraiment réduit à cela, ce compositeur pourtant si prolifique, et si agréable à écouter? Même le très bon Anguish Of Youth n'échappe pas à cette règle, et il faut attendre Days Of Rage pour que la douce léthargie dans laquelle nous étions plongés s'interrompe brusquement: un changement, du neuf, un truc original ?

En fait oui, mais non : Days Of Rage est très agressif, scande un gimmick guerrier, mais se trouve bien vite assez chiant. Et je ne parle pas d'End Of Innocence, où on a malheureusement l'impression que Jon tente de reproduire ce qui a bien marché dans le passé, comme Harbinger Of Fate, mais sans y parvenir. Le reste de l'album est à l'avenant, mais à ce point de Dystopia ceux qui attendent d'un grand comme Schaffer un peu plus d'efforts de composition ont déjà arrêté d'écouter.

Et la lecture des récents propos du maestro concernant le complot global dont les innocents péquenots américains sont victimes n'arrange rien : on flirte allègrement avec la paranoïa la plus crasse, et même le négationnisme le plus abject quant il aborde le sujet du 11 septembre. Rocker de droite Jon l'est, et ça on le savait, et à la limite ce n'était pas trop grave, tant que ça se cantonnait à des morceaux lacrymaux du style When The Eagle Cries ou soporifiques (Gettysburg). Mais Sons Of Liberty déjà c'était limite, et je ne serai pas surpris de lire l'américain déclarer son amour pour le Tea Party : tout ça ne serait que de peu d'importance, si cela ne nuisait à la cohérence de l'ensemble, et à la crédibilité du groupe.

En définitive, Dystopia est un classic album d'Iced Earth, avec des thèmes inintéressants et des riffs bateau, où surnagent de vrais bons morceaux qui valent le coup. J'en viens, de mon côté, à regretter les délires prog-épiques des deux opus précédents avec leurs multitudes de pistes vocales, c'était pompier et parfois maladroit mais au moins ça avait plus de gueule. Et puis on s'en sortait toujours avec un The Clouding fantastique, magnifié par la voix exceptionnelle de Matt Barlow (sur l'EP I Walk Among You, je précise). Malheureusement sur cet album, ni Barlow, ni Clouding.

0 Comments 16 octobre 2011
Whysy

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