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Les mots ne savent pas se défendre. C’est par ce constat qu’il convient de commencer la chronique d’un album étiqueté « Power Metal Symphonique » et qui n’en est pas un. Cependant, ce n’est pas dans un débat de style qu’ « Ethera » va nous mener. En effet, Visions Of Atlantis réussissait dans ses précédents disques à écrire des orchestrations correctes qui permettaient de ne pas rendre le terme « symphonique » totalement inapproprié ainsi que des morceaux beaucoup moins « pop ». Malheureusement, il se trouve qu’ils ont cédé à la facilité. Ils ont tenté de faire un disque « vendeur ».  En effet, tous les symptômes sont là. L’album s’ouvre sur des sons électroniques de synthétiseurs d’un goût réellement douteux. Ce penchant va se confirmer tout au long d’ « Ethera » de façon suffisamment discrète pour ne pas « changer l’étiquette » du groupe, mais il va aussi se révéler trop peu présent pour être réellement pertinent. Cette volonté électronique est assez irrégulière mais elle va autoriser des aberrations telles que le vocoder ridicule de « Machinage » ou encore les arpeggiators hors propos et ultra-kitchs (dans le mauvais sens du terme) de « Avatara ». Le mélange avec les sons d’orchestres qui sont de bien moins bonne qualité que dans d’autres productions du groupe (dans « Delta » ils étaient de bien meilleure facture) ne va faire que renforcer cette étrange impression d’un enrobage sonore écœurant.  Les sons d’orchestre, étant pourtant des éléments charnières du Métal Symphonique, sont ignobles (oui, ça marque mal). Les cuivres sont très mal traités et certaines fréquences sont vraiment agressives. Les cordes sont insipides et ne maintiennent même pas l’illusion. L’écriture du clavier (et l’écriture générale aussi d’ailleurs) ultra verticale se cantonne à des nappes à peine polyphoniques (quelle pauvreté harmonique ! que c’est lisse !) et quelques rythmiques en croches de la part des violons. Du RÉELLEMENT déjà vu en somme. On sait quel accord va arriver à l’avance. Tout est trop prévisible. C’est du sous-Nightwish période Annette (qui est assez pop mais où les arrangements sont beaucoup plus creusés). Seulement, vous pourriez me dire que le clavier n’est pas l’élément central du disque (bien qu’en soi, le style symphonique impose des claviers de qualité, mais soit !) et ça n’est pas totalement faux. Malheureusement on ne peut pas dire que le reste relève le niveau.  La base sonore guitare/basse/batterie n’a pas de réel problème d’exécution et sa production est correcte mais totalement impersonnelle. Le son de batterie est d’une banalité sans nom mais reste propre. Le jeu du batteur est très droit et il fait ce qui est nécessaire pour mettre en valeur les compositions. C’est une volonté que l’on peut saluer face à la tendance des batteurs métal à trop remplir leurs parties. On reprochera tout de même une légère faiblesse au niveau de la qualité de la « tourne ».  La basse est audible, c’est un bon point même si on ne peut pas dire que son timbre soit fabuleux (en effet il est assez creux malgré sa bosse dans les hauts médiums). Malheureusement elle se cantonne trop souvent à appuyer la fondamentale des accords comme dans la plupart des œuvres du genre. La guitare, elle, m’a rendu malheureux. Elle dégage un son très froid qui va avec un jeu très froid sans pour autant que cela soit une décision volontaire. On le voit bien car le micro utilisé sur les parties mélodiques est souvent le micro grave qui est censé donner un rendu plus chaleureux. On détecte une bonne vélocité dans les soli mais aucune âme dans le phrasé, comme si tout un pan de la technique avait été oublié (le solo de « Vicious Circle » est un bon exemple). De plus le mixage de ceux-ci est totalement raté, on a vraiment du mal à les distinguer clairement. On reprochera l’oubli des médiums dans le master générale… la volonté d’avoir un gros son peut parfois gâcher le timbre d’un disque.  Au fond, tout ce petit monde avait de quoi faire quelque chose de qualité. Mais c’était sans compter les harmonies des compositions beaucoup trop lisses. Le trio va donc se contenter de suivre bêtement les lignes des claviers (ou inversement) avec des power chords à la manière d’un groupe de pop de bas étage, le palm muting en plus. Quelques tentatives d’arrangements guitare pour enrichir le tout ne suffiront pas à relever le manque de saveurs car elles se feront malheureusement trop rares (« Hypnotized » en est l’exemple parfait). Il n’y a donc rien que l’on retienne, même pas un riff.  Donc logiquement, quand on n’a pas de riffs auxquels se raccrocher, aucune ligne d’orchestre, aucun motif rythmique ou harmonique marquant, on se raccroche à quoi ? Ben aux voix pardi ! Et quand on écoute des « chansons », on peut tout pardonner à partir du moment où les sonorités émanant des appareils phonatoires des protagonistes sont magnifiques et qu’elles nous transmettent de réelles émotions. Vais-je vous surprendre en vous disant que ça n’est pas le cas ?  La première chose qui marque et qui est récurrente, c’est la fausseté des voix (ça n'est pas nouveau chez eux). Et ça, c’est impardonnable ! On va donc souvent se retrouver heurté par des tenues de notes trop basses ou trop hautes d’au moins 2 commas (pythagoriciens, il en existe 9 entre deux notes, ce sont des micro-intervalles, donc pas vraiment des notes), notamment chez les voix féminines (même si monsieur pourra aussi recevoir ces accusations). Les vocalises de mademoiselle sont souvent les interventions les plus fausses du disque d’ailleurs. Les harmonisations entre les deux voix vont beaucoup en souffrir à certains moments (mention spéciale à « AEON 19th »). C’est réellement dommage car les timbres ne sont pas mauvais en soi (même si la tentative de « rockiser » la voix masculine ne parvient pas à convaincre, la technique nécessaire étant mal exécutée). Seulement, la façon de chanter beaucoup trop « variétoche » finit d’enlever toute crédibilité au disque. Les lignes mélodiques se veulent écrites pour être catchys mais n’arrivent pas à marquer. On se retrouve donc avec une tripotée de pseudo « tubes » radio qui ne resteront pas dans les esprits de par leur manque de personnalité et d’originalité. Par exemple, la ballade du disque, « Cave Behind the Waterfall », est d’une banalité affligeante et réutilise très maladroitement les codes du genre (la guitare folk qui fait ses accords au coin du feu, les violons lancinants et les mélodies niaiseuses chantée par une voix digne des comédies musicales les plus douteuses).  Le tout POURRAIT être bon, ou du moins, meilleur. Il s’agit juste d’une question de recherche et d’arrangements. Et sur certains morceaux, le groupe montre qu’il peut faire mieux que ce qu’il fait sur les trois quarts de la galette. En effet les titres « Tlaluc’s Grace », « Burden Of Divinity » et « Clerics Emotion » se révèlent plus intéressants au niveau de la structure, des arrangements et des mélodies. On trouvera plus d’imagination et d’inventivité à tous les niveaux sans que, certes, cela soit extraordinaire. Mais on peut dire, dans tous les cas, que ces morceaux ont été faits de façon plus sincère ! Alors pourquoi ? Pourquoi tout le reste du disque oscille entre le très moyen et le mauvais alors que la formation est toujours capable de faire des titres de facture correcte ? Serait-ce une volonté de se rendre plus accessible en épurant au maximum leur musique et en ajoutant des sonorités connues de la masse ? Si c’est le cas, c’est une grave erreur de parcours car leur « œuvre » en prend un grand coup.  Malgré un nombre de défauts conséquents, il existe peut-être un potentiel commercial à ce disque et il est possible que certains entrent dans le monde du métal par le biais de celui-ci (c’est triste mais c’est comme ça). C’est donc un album qui ne peut appartenir qu’à cette catégorie bien vite oubliée lorsqu’on a dépassé les portes d’un monde aussi passionnant que celui de la métallurgie sonore. Le 3/10 est justifié par les trois morceaux corrects que j’ai pu entendre dans ce disque, rien d’autre. Il s’agit au final d’un disque éthéré, ou disons plutôt -transparent-.

0 Comments 02 avril 2013
Whysy

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