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Vous êtes vous déjà demandé à quoi ressemblerait un vieil album de hard rock psychédélique s’il se voyait interprété par des cowboys venus d’une terre froide, aride, isolée et hostile ? Vous êtes vous déjà imaginé un recueil de chansons à la fois moderne et poussiéreux, expérimental et puissant, accrocheur et torturé, ravageur et suintant la mélancolie ? Avez-vous déjà réussi à comprendre ce qui pouvait bien se cacher derrière l’étrange dénomination « Post-Metal » ?

Personnellement, à toutes ces questions, ma réponse est non. Et c’est sans doute parce que justement je ne m’étais jamais pris à rêver de quelque chose d’aussi improbable que la beauté de Sólstafir m’a heurté aussi fort.


Combo islandais d’avant-garde évoluant profondément à chaque nouvelle sortie (des débuts black Metal en passant par l’expérimental et des sonorités plus ambient et post-rock), Sólstafir, fort maintenant de plus de 15 ans d’existence, nous livre cette année son troisième album, sans aucun doute son plus abouti. Guitares tranchantes, rythmiques recherchées, lignes de chant à couper le souffle, le groupe impressionne par sa maîtrise et sa très forte personnalité. Il est temps à présent de tenter de pénétrer plus loin dans les secrets de ce nouvel opus…

Malgré toutes ses influences étonnantes, et malgré leur profonde différences de styles, c’est avant tout à Primordial que le quatuor islandais m’a fait songer en premier lieu. Car la voix extraordinaire d’Aðalbjörn Tryggvason, d’une conviction à couper le souffle, à l’instar de celle d’Alan Nemtheanga, est capable de vous soulever, de vous transcender, de vous briser le cœur et de vous faire pleurer comme un neurasthénique, ou tout simplement de vous faire rêver dans un ailleurs improbable et lointain. Loin du chant black de ses débuts, le prodige, à mi-chemin entre Jim Morrison des Doors et Nemtheanga que j’évoquais plus tôt, accomplit une performance magnifique : passant de la tristesse à la colère, de la douceur à la rancœur, du calme à l’énergie… Tout en chant clair, avec une personnalité énorme. Cela m’amène donc directement à vous parler du second morceau, point culminant de cet étonnant album : « Köld », son titre éponyme.

Alors que l’instrumentale d’ouverture nous plonge déjà dans ce désert froid, cette atmosphère brumeuse à souhait propre à l’introspection, avec une mélodie relativement accrocheuse, mais aussi assez hypnotique, qui sent le cuir, la sueur et la morne et gluante poussière, « Köld », elle, chantée en islandais, démontre tout le savoir-faire du groupe dans un morceau montant sans cesse en puissance, avec une maîtrise qui coupe le souffle à chaque instant. Franchement, il est difficile de retenir ses larmes sur le break à l’orgue et à la guitare claire, où la voix d’Aðalbjörn, sans surjouer, fait des miracles… Et quel divin lead de guitare !! Croyez-moi, cette mélodie n’a pas fini de vous hanter… Bref, je termine là mon panégyrique : « Köld », (le morceau), est un pur chef d’œuvre, totalement unique. Si tout l’album avait été de ce niveau, j’en faisais aussitôt mon album de l’année.

Mais même s’il atteint sans nul doute son sommet dans cette piste salvatrice, nul doute que « Köld », (l’album), est loin d’en avoir fini avec nous. Se cachant derrière cette production imparfaite et un peu brouillon, mais extrêmement personnelle (on aurait aimé que les leads de guitares soient plus clairs, et le fait d’avoir mis la batterie aussi en avant dans le mix est assez déstabilisant), les mélodies de chaque morceau sont très belles et profondément originales. Riffs très inspirés venus d’une autre planète (« Pale Rider »), jeu de batterie subtil et travaillé à l’extrême (les amateurs de progressif ou ceux qui se régalent quand la batterie fait autre chose que marquer le rythme de façon binaire vont prendre leur pied à coup sûr), lignes de chant impressionnantes, (refrain de « She destroys again »,…), Sólstafir sait parfaitement comment embarquer avec lui son auditeur.

Dommage cependant qu’il se complaise en deuxième moitié d’opus dans des morceaux sortant totalement des carcans du Metal, moins aptes à maintenir l’attention : j’ai moi-même souvent tendance à arrêter l’album après la plus calme et lente « Necrologue » ! Bien sûr, l’ambient « World Void of Souls » possède sa dimension hypnotique et nihiliste, mais est selon moi beaucoup trop étirée ; l’on aurait également volontiers amputé la conclusion « Goddess of the ages » de quelques minutes, même si le spleen lourd et pénétrant de celle-ci convainc déjà davantage.


Au final, à qui conseiller cet improbable et si magnifique album ? A tous ceux qui recherchent l’originalité dans le Metal, le qualificatif « Post Metal » s’avérant finalement parfaitement adapté pour décrire cette galette ; à tous ceux qui aiment les morceaux à la fois accrocheurs et complexes ; à ceux qui n’ont pas peur des longues promenades ambient ; à ceux qui recherchent les fortes émotions musicales et qui n’ont pas peur de voir leur cœur se faire malmener par une noire étendue de nuages tristes et menaçants… Bref, un album majeur de cette année 2009, et l’une de mes plus belles découvertes depuis bien longtemps.



Gounouman

0 Comments 07 juillet 2009
Whysy

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