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Слово нетленно, Слово живое
Снова реку тайну храня
Гласом отчаянья призываю
Родные боги слышат меня




Depuis près de dix ans maintenant, les russes d’Arkona menés d’une main de maître par Maria ‘Masha Scream’ Arhipova, nous offrent un pagan metal toujours renouvelé. Je passe sur l’historique du groupe très bien résumé par ce cher Gounou ici, mais je souligne malgré tout les différentes directions empruntées par le groupe au fil du temps : tantôt plus folk, tantôt plus extrême, et même presque prog dans Goi, Rode, Goi !
C’est devenu parfois difficile de voir où ils veulent en venir, mais heureusement, tout était toujours de qualité, avec une montée en puissance dans la production, et dans les instrumentations.

Cette montée en puissance ce poursuit avec ce nouvel album Slovo. Ici, Arkona s’aventure sur des terres plus symphoniques. Oublié l’aspect presque prog, même si les structures des morceaux restent peu communes, aujourd’hui, Arkona s’accompagne d’un orchestre, et d’une chorale ! Ok, on est dans l’hyperbole là. Dans les faits, on ressent peu ce qui aurait pu être une révolution dans la musique des russes.

Alors bien sur, Az’ commence fort, avec contrebasse rythmique, cuivres, et violoncelle, basson et violons, rapidement relayés par du biniou. Ca en fait des instruments ! Et jusqu’à maintenant, la batterie s’entend à peine, la guitare est inexistante, et des chœurs viennent cloturer ce morceau d’introduction. Mais heureusement cette musicalité presque trop orchestrale se fait moins présente sur le reste de l’album. On l’entend dès les premières notes de Arkaim, où la guitare se fait sévère, tranchant avec la douceur de Az’. Comme d’habitude, Masha alterne pour notre plus grand bonheur entre son chant clair si particulier, et ses hurlements, et la musique alterne entre instruments traditionnels et guitares, passages calmes et plus rapides, chœurs ou chant de Masha. Indéniablement, Arkona commence fort son sixième album. Arkaim est à la fois entraînant et inquiétant, c’est une invitation au voyage, qui remet directement dans le bain de la musique des russes.

Tout contribue à la fabrication des différentes ambiances : les instruments à vent, synonymes de légèreté, les instruments plus traditionnels pour donner du peps, ou pour faire rêver, les guitares et la batterie pour le côté plus sombre, et les chœurs [s]qui rappelleront à certains le temple de la Forêt de Ocarina of Time[/s] pour la solennité... Arkaim promet de grandes choses.
Malheureusement, tout l’album n’est pas de ce niveau.

Certains morceaux peinent à se faire entendre. C’est le cas par exemple de Tam Za Tumanami, chanson plus calme, mélancolique, où Masha est accompagnée d’une guitare sèche et d’instruments traditionnels. La magie n’opère pas, malgré les chœurs très réussis, et qui auraient pu (du ?) faire décoller la chanson. Zimushka, en plus de donner l’impression de répéter les lignes de Vo Moiom Sadochke, n’apporte rien, et laisse un peu l’auditeur sur sa faim au terme de l’album.
Enfin, sans être vraiment mauvaise, Leshiy tombe un peu à plat, puisque les ambiances folk recherchées par le groupe, d’habitude profondes ou festives ne sont ici que caricatures d’elles-mêmes, sans subtilité, et le groupe sombre dans l’amateurisme, ou l’auto-plagiat, au choix. Pourtant le texte, axé sur le vieillissement, la sagesse, et la nature aurait mérité une chanson plus sérieuse.

Et le reste alors ? Tout n’est heureusement pas aussi décevant, même s'il faut un grand nombre d'écoutes pour en venir à l'apprécier. Stenka na Stenku (qu’on connaissait déjà avant), bien que très courte, est un concentré de joie, rythmé et léger, mais à la fois riche et recherché.

Bolno Mne est angoissante, l’introduction aux instruments à cordes frottées couplés aux hurlements de Masha, puis à ses chuchotements pose un cadre sombre et inquiétant. Atmosphère lourde pour une chanson triste, où Arkona évoque la mort, l'empoisonnement, la souffrance qui s’estompe à mesure qu’on se perd. Et quand on pense le morceau fini, il repart de plus belle avec un cri déchirant. La tsarine Masha montre qu’elle maîtrise encore parfaitement son sujet.
Nikogda est un autre moment fort de l’album, où enfin on entend bien les guitares, sous-mixées partout ailleurs, cachées derrière les instruments folk, et le chant. Ici enfin c’est l’aspect metal qui prime. Même si le refrain peut rappeler Goi, Rode, Goi !, cette réminescence est la bienvenue.

Pour une fois, les intermèdes apportent de l’atmosphère, sans couper complètement le rythme de l’album : Predok est une prière aux ancêtres, empreinte de respect et de remords pour avoir dérangé les morts.
Potomok au contraire est l’appel d’un enfant se présentant, fier de ses origines : "Я мал, но велико сердце мое" (Je suis petit, mais mon cœur est grand). Ces deux passages sont émouvants, à leur façon, et apportent de la profondeur narrative à ce Slovo.

La chanson titre justement, est intéressante parce qu’également plus heavy, les instruments folkloriques ne forment qu’une trame de fond, sauf la flute qui accompagne les cris, et le chant de Masha, donnant de la cohérence à l’ensemble.
Odna au contraire joue à fond la carte des instruments traditionnels, et ne se sert de la guitare et de la batterie que pour apporter un rythme, et renforcer la mélodie, sur certains passages seulement. Heureusement, le morceau est construit intelligemment, et la diversité des instruments utilisés, avec encore la maîtrise de Masha, font de cette piste un incontournable de l’album.

Finalement, Vo Moiom Sadochke, malgré une mélodie très (trop ?) facile, est pleine d’émotion, principalement grâce à (comment ça je me répète ?) la performance de Masha. Certes, il s’agit d’une chanson plus lente, mais elle contraste du coup totalement avec Odna et Stenka na Stenku, entre lesquelles elle est judicieusement placée.

Les russes ont ici cherché à se renouveler, et le résultat est un peu en demi-teinte. Heureusement, ils ont une expérience solide, une chanteuse lead au meilleur de sa forme, et des thématiques profondes pour contrebalancer la volonté d’expérimenter ; on espère cependant un retour prochain des guitares et de la batterie au premier plan, et un album peut-être moins décousu la prochaine fois.

Note réelle : 7,5, arrondie à 8 pour les beaux yeux et la fourrure de Masha.



0 Comments 05 septembre 2011
Whysy

Whysy

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