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Quatre ans seulement après leur premier album, Opeth confirme bien son statut de groupe prolifique en sortant ni plus ni moins que son quatrième album, intitulé Still Life. Une telle productivité pourrait cependant être source de qualité moyenne, d’un manque de recul ou de maturité par rapport à un processus artistique, et quelques exemples sont là pour nous le prouver, mais raisonner comme cela, c’est mal connaître nos suédois. Cette faculté de composer des titres de qualité, à créer des ambiances uniques et si prenantes, fait partie intégrante du charme, de l’univers du groupe. Et encore une fois, Still Life ne déroge pas à la règle.

Pour ce quatrième album donc, changement de line up : Martin Lopez est confirmé à la batterie, son jeu souple et puissant ayant fait merveille sur My Arms, Your Hearse. Mais c’est à la basse que le changement majeur survient, puisque Martin Mendez intègre le groupe. On joue la carte de la stabilité, puisque ce line up ne changera pas jusqu’en 2006.

Encore une fois, la cover de l’album est évocatrice des ambiances construites par les scandinaves. Objectivement, celle de Still Life restera comme l’une des plus réussies, l’une des plus captivantes du groupe. Pour la première fois, Opeth joue sur le registre de la symbolique religieuse, avec cette statue ressemblant étonnement à la Vierge ou encore cette croix, plantée au milieu de nulle part, qui se reflète en statue dans l’eau rougeoyante du lac.

Musicalement, il y a un certain nombre de choses à dire. Après le chaotique My Arms, Your Hearse, on se rend compte que Still Life va jouer une autre carte, celle de la cohésion, de la tranquillité presque. On retrouve, non sans plaisir, des formats de titre qui approchent tous les 10 minutes, mais c’est la tonalité de l’album qui étonne plus qu’autre chose. Sans totalement délaisser ces riffs destructeurs dont seul Opeth a le secret, les parties death se font moins venimeuses, moins virulentes, pour devenir presque heavy, sans abandonner les inspirations sombres et mélancoliques de la musique du groupe. Les fameuses transitions entre parties métal et parties acoustiques sont plus travaillées, amenées moins brutalement qu’auparavant, et la qualité du mixage apporte un relief tout particulier sur ce point. Le titre Serenity Painted Death est assez éloquent : le riff d’ouverture est certes assez brutal, mais il y a une finesse supplémentaire dans la manière de l’appréhender, c’est moins massif, on a moins cette impression de se noyer avec délectation dans les abymes musicales du groupe. Un peu comme si on avait un certain contrôle sur les chansons.

Autre point, celui de l’acoustique : assez présent sur Morningrise notamment, il prend ici une dimension encore plus grande. Tous les titres sont basés sur l’acoustique, la guitare sèche de Mickael Akerfeldt est partout, déversant ses harmonies noires sur chaque centimètre carré de l’album. Un titre comme Benighted, uniquement à la guitare acoustique, en donne une preuve cinglante.

D’ailleurs, la proéminence des parties acoustiques va de pair avec le chant clair, lui aussi majoritaire. Et force est de constater que Mickael Akerfeldt continue de monter en puissance, son voix en chant clair, parfois dédoublée par l’électronique, est d’une finesse et d’une précision diaboliques, rajoutant un petit côté alternatif bienvenu. Le chant death est bien présent, un peu plus en retrait cependant, mais ces growls monstrueux de profondeur et d’intensité nous envoient toujours ces décharges d’adrénaline salvatrices en pleine figure.

Malgré cela, au fil des écoutes, des titres se détachent petit à petit, d’autres au contraire montrent assez vite leurs limites : Godhead’s Lament vient se positionner comme le titre le plus représentatif et fort de l’album, avec sans doute Serenity Painted Death, mais des titres comme Moonlapse Vertigo ou Face Of Melinda retiennent moins l’attention, manquent peut être un peu d’intensité, même si intrinsèquement ce sont des morceaux de qualité.

Avec Still Life, Opeth laisse plus de liberté à l’auditeur, on se sent moins pris dans ces tourbillons de notes hallucinées, et le rôle de l’acoustique est prépondérant dans ce sentiment. Plus calme, moins brutal, plus heavy, cet album restera à part dans la discographie des scandinaves. On y découvre une autre facette de Opeth, pas moins bonne ou meilleure que les autres, simplement différente. Après, on peut toujours établir un jugement de valeur par rapport à ses prédécesseurs, en notant que certains titres manquent d’homogénéité et d’accroche, tout en restant de qualité. Tout est ici question d’interprétation, et pour ma part Still Life, s’il est un peu en dessous des autres, n’en reste pas moins un incontournable dans l’édifice musical des suédois.

0 Comments 26 mai 2006
Whysy

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