Vous recherchez quelque chose ?

Sorti en août 2000, V, cinquième album de Spock's Beard, marque le retour du groupe au prog à l'ancienne, avec ses qualités et ses défauts. L'emprise de Neal Morse est plus forte que jamais, et notamment sur les deux morceaux phares de l'album, deux longues pièces épiques et gigantesques, mêlant le génial et l'indigeste.  At The End Of The Day ouvre l'album avec seize minutes de prog superbe, rempli jusqu'à la gueule de mélodies sublimes, de breaks heavy, de passages hispanisants (un des dadas de Neal), et de solos époustouflants. Même si c'est un choix étrange et que je ne comprendrai jamais vraiment (commencer un album avec un pièce aussi complexe et longue), la taille du morceau ne nuit pas trop à l'écoute: varié, aéré et très plaisant, At The End Of The Day est un vrai bonheur, digne des grands du prog dont Spock's Beard ne semble pas se lasser de chanter l'hommage. Nous y reviendrons.  Deuxième pilier de V, The Great Nothing clôt l'album avec vingt-sept minutes d'un prog cette fois touffu, beaucoup moins clair et précis et souvent répétitif. C'est donc le moment d'ouvrir le débat.  La question, je vais vous la poser, se justifie de la façon suivante: je crois que je ne suis pas le seul à trouver que vingt-cinq minutes d'hommage à Genesis et Yes c'est beaucoup, du coup on ne peut que se demander, mais pourquoi? Dans toute sa carrière, Genesis n'a atteint les dix minutes que rarement, et ne les a dépassé qu'une seule fois, avec Supper's Ready. Pour Yes, bien sûr, c'est différent: Close To The Edge, The Gates Of Delirium, Tales Of The Topographic Ocean, Awaken, les exemples sont plus nombreux. Moi-même, grand fan de Yes devant l'Eternel, je suis bien obligé d'admettre que dix ou quinze minutes suffisent largement, et les exemples de pièces dépassant allègrement les vingt minutes sans trous d'air ou sans remplissage sont rarissimes. Toute la question est donc de faire un très long morceau, avec un minimum de ces passages à vide. C'est ça, le prog? Vingt-cinq minutes de musique avec trois minutes de bonheur toutes les deux minutes? J'en doute.  Deuxième aspect de la question, la référence permanente aux glorieux ancêtres. Là aussi, ça commence doucement à souler. Si je veux écouter du prog des seventies, j'en ai des tonnes, c'est pas ça qui manque. Je comprends que les mecs soient fans, cette musique est la meilleure qui existe, et moi-même j'en suis fan. Mais de là à friser le tribute band toutes les trois mesures, ou avec un son de clavier sur deux, si ça ne nuit en rien à l'intérêt que présentent ces groupes pour moi ou les autres fans hardcore de prog seventies ça les dessert sérieusement par rapport à l'ensemble des mélomanes.  C'est donc dans les morceaux plus courts qu'on va chercher une identité plus moderne et originale, et heureusement, ça, Spock's Beard sait faire. Revelation, Thoughts pt2, All On A Sunday et Goodbye To Yesterday sont des morceaux intelligents, où le prog et sa prod traditionnelle se mêlent astucieusement à d'autres styles: ballade, pop, metal (le refrain superbe de Revelation). Ce n'est pas toujours une réussite absolue, mais ça a au moins le mérite de faire progresser le débat, et d'offrir des morceaux plus courts et plus audibles.  C'est donc au final un album inégal que ce V. On aurait préféré plus de morceaux courts et audacieux, mieux conçus, et At The End Of The Day aurait conclu l'album avec puissance et majesté. Et puis on se serait passé de The Great Nothing, ou du moins on en aurait conservé les meilleurs passages. En fait c'est ça qui manque à SB, un producteur capable de leur dire quand, et où trancher dans le lard, et que garder. Même si l'ensemble reste positif, il est évident que Spock's Beard est à un tournant en 2000: évoluer, rapidement, ou éteindre rapidement les espoirs qu'il avait fait naître en 1995. Etrangement, ce ne sera ni l'un, ni l'autre.

0 Comments 07 juillet 2011
Whysy

Whysy

Read more posts by this author.

 
Comments powered by Disqus