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Steven Wilson est le genre de gars très très occupé, voire hyperactif, qui n'a pas du prendre beaucoup de vacances depuis 20 ans. Heureusement pour nous, il n'est pas cadre chez Renault mais auteur, compositeur, producteur, arrangeur, guitariste, chanteur, joueur de Mellotron et je vous fais grâce du reste. L'un de ses nombreux projets, Blackfield, est une collaboration avec le chanteur israélien Aviv Geffen, et en ce mois de mars sort leur troisième opus.

Wilson a toujours été très clair au sujet de Blackfield: il s'agit d'un groupe pop, dont la principale ambition est de réaliser de belles chansons mélancoliques, et surtout pas de se lancer dans de complexes réalisations technico-prog. A ce titre, Welcome To My DNA ne déçoit pas. Il s'agit tout simplement d'un des plus beaux albums de ces dernières années, en termes de mélodies paisibles et de morceaux suicidaires. Si vous vous êtes fait plaquer la semaine dernière, ou si votre chat s'est récemment éteint après quinze années de bons et loyaux services, je vous conseille amicalement de rester à l'écart du dernier Blackfield. De la première à la dernière note, et hormis quelques rares exceptions, cet album transpire la mélancolie, le mal de vivre ou la tristesse surannée d'un spleen néo-romantique. Les textes, les mélodies, les rythmiques, tout est fait pour arracher une larme au plus solide d'entre nous.

Heureusement, quelques fautes de goûts viennent atténuer ce tableau, notamment et surtout l'utilisation systématique d'un orchestre à cordes. Parfois au mauvais moment, souvent un peu lourdingue, l'influence de Geffen dans ce registre prive malheureusement l'album d'une légèreté qui, même si elle n'a jamais été le point fort de nos deux compères, aurait fait du bien à certains morceaux. Tous les registres du misérabilisme ont été explorés dans Welcome To My DNA, de la complainte lacrymale à la méditation solitaire en passant par la bluette contemplative. Et pourtant, étrangement, il n'y a rien à jeter, hormis peut-être le couplet d'Oxygen, que même Bono aurait sans doute trouvé un peu trop commercial. Mais même dans cet exemple, le magnifique refrain, et l'orchestration parfaite viennent sauver le morceau, si je met de côté évidemment la partie violonneuse, encore une fois beaucoup trop envahissante.

Si Wilson et Geffen alternent leurs parties chantées, il semble que la composition de l'album ait été presque entièrement réalisée par l'Israélien. Ainsi, les slows déchirants sont légion sur ce nouvel opus, que ce soit le sublime Rising Of The Tide ou Waving, assez proche de l'ambiance du dernier Anathema. Pourtant, la touche de Wilson se retrouve bien souvent, que ce soit par certaines tournures mélodiques et surtout dans cette façon caractéristique d'enrober les morceaux, comme par exemple Blood et Go To Hell. Sur ces deux mélopées enivrantes le groupe se fait moins pop, et lorgne pour notre plus grand plaisir vers des territoires moins évidents, avec une réussite certaine. Zigota, reprise d'un morceau solo de Geffen, nous rappelle les grandes heures de Porcupine Tree : longue montée en puissance avant une furtive explosion prog qu'on croirait sortie tout droit d'In Absentia. Mais là n'est pas le propos, et le groupe termine l'album avec beauté et douceur sur le morceau-presque-titre, DNA, empli d'une luminosité presque religieuse.

Malgré ses quelques défauts, et dans un style très particulier qui ravira sans doute peu de fans de metal un brin puristes, le troisième effort de Blackfield est une incontestable réussite, même si on pourra lui reprocher ses tentatives maladroites de plaire à son public, au risque parfois de trop édulcorer son propos. Complaisant, Welcome To My DNA? Pas totalement, mais le fait que les meilleurs moments de l'album soient souvent ceux où le groupe lâche un peu la bride est assez symptomatique. On sera sans doute beaucoup plus exigeant avec les deux camarades au prochain opus.

0 Comments 21 mars 2011
Whysy

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