Vous recherchez quelque chose ?

Crippled Black Phoenix, en voilà un nom « boiteux », si je puis me permettre. On sent tout l’aspect progressif et conceptuel de cette formation anglaise par le biais de leur patronyme. « Phoenix » seul aurait fait pensé à du rock moderne et en y rajoutant juste « Black » devant, on aurait plus fait allusion à du power metal. Du black metal aurait été légitime pour une appellation « Crippled » et Crippled Phoenix se serait plus apparenté à un musique de cabaret (pourquoi pas ?). Je n’exposerai rien pour « Crippled Black », aucune envie d’avoir plusieurs groupes de population à dos.

Au final, qui y a-t-il derrière ce nom, ma foi intriguant ? Un collectif de musiciens composé à la base d’anciens membres de Mogwai, Electric Wizard, Portishead… Un line-up varié, plutôt versatile, venant d’univers relativement différents qui donne toute la variété de la musique de Crippled Black Phoenix. Un patchwork musical mélangeant post-rock, rock alternatif et rock progressif influencé notamment par Pink Floyd et Sigur Ros.

L’album est divisé en deux parties « Black Side » et « White Side ». Un contraste de terme rendu légitime musicalement. En effet, si la première partie est basée sur une musique lourde avec des rythmiques très mécaniques et doom (« Let’s have an apocalypse now ! », « Parasites »), la seconde moitié de l’album se veut plus légère et lumineuse.

« Black Side » débutant sur une composition (« Sweeter than you ») interchangeable avec « If » de Pink Floyd sur Atom Heart Mother, est rythmé par un son lourd, aux mélodies languissantes mais paradoxalement très prenantes et aux claviers psychédéliques à souhait (« Let’s have an apocalypse now ! », « Black Light Generator »). Une ambiance sombre cadrant des prestations musicales chirurgicales où les frappes de la batterie sont au cœur de cette symbiose instrumentale. La voix détachée, pratiquement reléguée au second plan, apporte ce complément mélodique donnant tout l’aspect fédérateur à la musique des anglais. « No ! Part 2 » est le poumon atmosphérique de cette première partie. Composée de chœurs célestes et de percussions distantes, la ressemblance avec la musique des islandais de Sigur Ros est frappante. Au même titre que David Gilmour et Nick Barett, le feeling des solos et des envolées de la guitare hypnotise. Juste, limpide, puissant, autant d’adjectif caractérisant le jeu de Justin Greaves.

« White Side » utilise les mêmes ingrédients que son « alter-ego » mais  de manière beaucoup plus rayonnant. A l’image du clavier bien plus gaie et « stable », les rythmiques sont plus entrainantes et enjouées (« Northern Comfort » par exemple). La voix se fait plus présente et est moins filtrée, le tout garde une certaine mélancolie et l’accompagnement du piano et de la guitare sèche permet un certain rapprochement avec la musique de Sylvan. La sensibilité vocale se sent beaucoup plus sur cette partie et donne lieu à des mélodies magnifiques (« Wake me up when it’s time to sleep », « Carring breeds the horror », « We remember you »). L’aura de Pink Floyd se fera toujours ressentir (« Wake me up when it’s time to sleep ») mais c’est surtout Sigur Ros qui viendra le plus souvent à l’esprit en cette fin d’album. Les envolées mélodiques, les chœurs féminins et l’ambiance du final de « We remember you » rime de façon déconcertante avec la musique des islandais. « A Brighter Tommorow » restera dans la même veine que la conclusion de son prédécesseur.

Crippled Black Phoenix nous délivre un album à la variété musicale exceptionnelle (qui côtoie même le blues sur « You’ll be murdered »). Une musique inspirée, troublante mais enchanteresse, surprenante par bien des aspects et gardant un fil conducteur fort. Sans aucune compréhension du concept, la magie musicale opère tout de même. Je ne peux donc qu’encourager tous les fans de rock prog et rock alternatif à vous procurer cette galette aux qualités certaines. Rien de bancal ou boiteux donc, juste un assemblage d’expérimentations musicales révélant un tableau homogène et unique. Une belle réussite.

0 Comments 19 mars 2014
Whysy

Whysy

Read more posts by this author.

 
Comments powered by Disqus